Où s'en va financièrement La Presse+?

Publié le 24/09/2014 à 20:36

Où s'en va financièrement La Presse+?

Publié le 24/09/2014 à 20:36

Guy Crevier, grand patron de La Presse. Photo: Courtoisie.

Comment évolue le projet de La Presse +? L'éditeur Guy Crevier a fait le point avec ses troupes mercredi. Quelques échos nous sont parvenus. Un chapitre important de l'histoire est sur le point de s'écrire.

L'application La Presse + a passé le cap des 575 000 téléchargements.

Elle est en moyenne ouverte plus de 160 000 fois à chaque jour. Sur une base hebdomadaire, la moyenne est à 260 000, et sur une base mensuelle, elle est à 330 000.

Les données sur les ouvertures sont intéressantes, mais on suspecte que La Presse + vend davantage aux annonceurs des paires d'yeux que des ouvertures d'édition. La question est de savoir combien de lecteurs consultent l'édition une fois qu'elle a été ouverte. Le chiffre n'a pas été fourni, mais, il y a quelques mois, on était tombé sur une évaluation de Crop qui utilisait un multiplicateur de 1,5.

C'est dire que sur une base hebdomadaire, la portée de La Presse + est vraisemblablement actuellement autour de 390 000 lecteurs.

À la fin avril 2013, dans une entrevue qu'il nous accordait, Guy Crevier avait indiqué avoir pour objectif un auditoire de 400 000 usagers pour le mois de décembre. Ce 400 000 était la pierre angulaire du projet. L'éditeur jugeait qu'à l'atteinte du repère, il aurait suffisamment de portée pour pouvoir cogner aux portes des agences et vendre la plate-forme comme un média de masse. Il pourrait alors monter ses prix et indiquait qu'après le 400 000, "on ne serait plus très loin de la rentabilité".

Constat: il y a 6-7 mois de retard, mais, ça y est, on y est. La pierre angulaire est posée.

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Et les prix publicitaires viennent également de grimper significativement. La carte de tarifs que l'on a sous les yeux indique que le premier plein écran d'une édition La Presse + était jusqu'à présent vendu à 10 800$ (plus on avance dans une édition, plus les écrans baissent de prix parce que la fréquentation descend. Il y en a aussi à 5000$). Il est cependant aussi indiqué que le tarif de ce même premier écran sera révisé en septembre et passera à 18 000$. Une mise à jour devait être faîte en juin, et on ne sait pas trop ce qui a été décidé. Mais notre vieille carte donne quand même une idée du bond que l'on avait à l'esprit avec l'atteinte de la pierre angulaire.

Vogue-t-on vers une aventure rentable?

Une très grande question.

Des sources racontent que monsieur Crevier parle de revenus publicitaires qui proviendraient désormais à 40% du iPad.

C'est un chiffre que l'on interprèterait avec une grande prudence. Il est d'abord étonnant parce que, comme on l'a vu, les tarifs iPad étaient jusqu'à maintenant sur la petite vitesse. Si la tablette représente réellement 40% des revenus, les résultats du journal papier doivent être vraiment catastrophiques. La vérité est que l'on a apparemment offert à l'annonceur d'abaisser le prix de son annonce papier (23 000$ pour une page, selon notre carte de tarif) s'il prenait également un écran iPad. Au final, l'annonceur se retrouvait donc avec une facture publicitaire dans les mêmes eaux.

La stratégie est excellente, mais elle ne fait probablement pas rentrer beaucoup plus de revenus dans l'entité La Presse. Et les revenus qui rentrent sur le iPad sont, comme dirait l'autre, un peu mous, en ce qu'on ne sait trop jusqu'à quel point l'annonceur serait commis à la plate-forme si le papier ne lui était pas offert.

Le plus intéressant pour les prochains mois, ne se trouve cependant pas là.

La question est maintenant de savoir quelle sera la réponse des annonceurs face à la nouvelle hausse de tarifs publicitaires que Gesca tente d'amener. On l'a vu, celle-ci n'est pas petite (10 800$ à 18 000$). Les tarifs semblent maintenant non loin de ce que l'on demande pour le journal papier, mais la portée du iPad demeure nettement moindre (400 000 usagers hebdomadaire versus 800 000 au papier à l'époque de l'entrevue avec monsieur Crevier).

Le défi est important.

Avant de conclure à l'impossibilité du succès de La Presse +, d'autres facteurs doivent cependant aussi être pris en compte.

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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