BLOGUE. La confiance. C'est bien connu, on ne gagne celle d'autrui que si on donne d'abord la sienne. Le hic? Comment faut-il s'y prendre pour bien donner sa confiance à l'autre, c'est-à-dire pour faire le premier pas d'un échange crucial? Car les écueils sont nombreux : nous avons tous déjà vécu la pénible expérience d'avoir accordé une confiance aveugle à un collègue, par exemple, et à le regretter encore aujourd'hui amèrement…
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La solution est pourtant évidente : il suffit de savoir inspirer confiance. En effet, à partir du moment où nous sommes nimbés d'une aura de confiance, l'autre va irrésistiblement s'intéresser à nous et à ce qu'on a à lui dire. Il convient donc de poser la question autrement : comment faire pour inspirer confiance?
Une réponse intéressante se trouve dans une étude intitulée I'm sorry about the rain! Superfluous apologies demonstrate empathic concern and increase trust. Celle-ci est signée par : Alison Wood Brooks, professeure en gestion des affaires à l'École de commerce Harvard (États-Unis); et Maurice Schweitzer, professeur en management à Wharton (États-Unis), assisté de son étudiante Hengchen Dai.
Ainsi, les trois chercheurs se sont intéressé à un point très particulier de la vie au travail, à savoir les excuses. Les excuses que l'on présente au client insatisfait, les excuses que l'on formule lorsqu'on a commis une erreur, ou encore les excuses qui nous viennent à la suite d'un retard impardonnable. Bref, les excuses que nous exprimons à longueur de journée. Et ils se sont demandé quel type d'impact a réellement ce type d'excuses.
Mmes Wood Brooks et Dai ainsi que M. Schweitzer ont procédé à quatre expériences. La dernière, menée sur le terrain, est la plus intéressante…
Par une journée pluvieuse, un jeune homme (en fait, un acteur) déambulait dans le hall d'une gare, l'air embêté. Il finissait par aborder une personne seule et lui dire :
> Soit «Est-ce que je peux vous emprunter votre cellulaire?»;
> Soit «Je suis désolé pour la pluie! Est-ce que je peux emprunter votre cellulaire?».
Autrement dit, dans un cas, l'acteur demandait de l'aide de manière un peu abrupte, et dans l'autre, en formulant au préalable une excuse superflue, pour ne pas dire absurde, en l'occurrence similaire à une formule de politesse.
Pourquoi avoir choisi de faire dire «Je suis désolé pour la pluie!» à l'acteur en question? D'une part, parce que cette formule est devenue célèbre en 1995, le jour où le président américain Bill Clinton a débuté un discours par «Salut, tout le monde! Je suis désolé pour la pluie!». D'autre part, parce qu'elle fait allusion à un problème commun indépendant de notre volonté : ce n'est pas notre faute s'il pleut, mais nous en subissons tous les deux les conséquences. Bref, parce qu'elle permet d'établir un pont entre les deux personnes concernées.
Résultat de cette petite expérience amusante? Il est très simple :
> Net avantage à l'excuse superflue. Seulement 9% des personnes à qui il a été demandé un peu abruptement leur cellulaire ont accepté de le prêter pour rendre service. Ce pourcentage a bondi à 47% dès que la formule «Je suis désolé pour la pluie!» a été ajoutée au préalable.
Surprenant, n'est-ce pas? Pour s'assurer de la robustesse de ce résultat, les trois chercheurs ont effectué trois autres expériences, en laboratoire et via le Web. Celles-ci ont toutes confirmé l'avantage que présentait d'exprimer une excuse superflue avant de présenter une demande à autrui.
Que retenir de tout cela? Un conseil ultrasimple, immédiatement applicable à votre quotidien au travail :
> Qui entend inspirer confiance a tout intérêt à présenter au préalable une excuse superflue bien sentie. C'est-à-dire à faire montre d'empathie pour l'autre à propos d'une nuisance indépendante de la volonté de tout le monde.
Voilà. À vous maintenant de jouer, en prenant soin, toutefois, de ne pas sortir «Je suis désolé pour la pluie!» à tout bout de champ, car il n'y a rien de pire que d'être répétitif dans ses excuses.
En passant, l'écrivain américain Caleb Carr a dit dans L'Ange des ténèbres : «Il y a un fossé entre explication et excuse».
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