BLOGUE. La Caisse de dépôt semonce SNC-Lavalin quant aux montants versés à des membres de sa direction. Bravo. On aurait cependant aimé la voir aller juste un peu plus loin, avec une simple question supplémentaire.
Alors que les investisseurs institutionnels semblent pour le moins apathiques dans ce dossier, il faut saluer l'effort de l'institution.
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Il y a quelques jours, on déplorait en cet espace l'inaction de la Caisse de dépôt quant à l'indemnité de départ de 4,9 M$ accordée à l'ancien grand patron Pierre Duhaime (SNC-Lavalin: qu'attend la Caisse pour intervenir?).
On ne sait si l'épître a eu une influence sur la réflexion de l'institution, mais, même s'il n'est pas nommément visé par la lettre de la première vice-présidente aux Affaires juridiques, monsieur Duhaime est nettement l'objet principal des doléances.
Là où est le problème
Pierre Duhaime a été relevé de ses fonctions il y a quelques semaines parce qu'il a personnellement autorisé des paiements inexpliqués de 56 M$ (il a ordonné le paiement de 33,5 M$, et était informé du premier paiement de 22,5 M$). Une entente conclue avec SNC-Lavalin est à l'effet qu'il recevra une indemnité de départ évaluée à 4,9 M$.
L'ancien dirigeant n'a pas nécessairement commis une faute lourde dans l'exécution de sa tâche, et il est possible qu'il ait droit à cette indemnité. Il est cependant également possible qu'il ait commis une faute lourde, et, dans ce cas, l'indemnité devrait lui être, sinon totalement refusée, à tout le moins substantiellement réduite.
La difficulté dans toute cette histoire réside dans le silence de SNC quant au témoignage de monsieur Duhaime lors de l'enquête interne. Il est réputé y avoir collaboré. Alors: savait-il à quoi était destiné cet argent et comment il avait été utilisé? Était-il au courant d'activités de corruption ou de potentielles activités de corruption?
Rien dans les indications données par le conseil d'administration de SNC ne permet de savoir ce qu'il a dit.
L'annonce de l'arrestation de l'ancien vice-président Riadh Ben Aïssa par les autorités suisses cette fin de semaine vient en outre jeter une nouvelle interrogation sur la connaissance qu'avait monsieur Duhaime de ce qui se passait en Afrique du nord lorsqu'il a autorisé un paiement de 33,5 M$ en décembre 2011. Cette autorisation a eu lieu alors que les Suisses enquêtaient depuis un bon moment puisque les déclarations des autorités révèlent qu'ils sont sur l'affaire depuis un an. Il est possible que la police ait su des choses que la haute-direction ne savait pas, mais, quand même, il est étonnant qu'au 31 décembre 2011, le bruit fait par ce qui se passait en Afrique était parvenu aux oreilles de la police depuis plusieurs mois, mais n'était pas encore parvenu à la haute-direction.
C'est pour cette raison que l'on aurait aimé que la Caisse fasse un pas supplémentaire et demande dans sa lettre au conseil de rendre public, dans son essence, le témoignage de monsieur Duhaime lors de l'enquête interne.
En ne demandant pas d'explications supplémentaires sur ce qu'a dit monsieur Duhaime, la Caisse et les autres actionnaires institutionnels choisissent de faire un acte de foi dans le conseil d'administration de SNC.
Malheureusement ce conseil a, à ce jour, fait quelques faux pas qui n'autorisent pas un pareil acte de foi.
Qu'il suffise de se rappeler que le 26 mars, l'entreprise indiquait "que M. Pierre Duhaime a démissionné de sa fonction" (ce qui ne donne généralement pas droit à une indemnité), alors que, quelques semaines plus tard, la circulaire indiquait plutôt "qu'il a été relevé de ses fonctions" (ce qui, lorsqu'il n'y a pas de cause, donne droit à une indemnité).
Dans ce contexte, le refus du conseil de donner des précisions sur le témoignage de son ancien chef de direction est susceptible de donner l'impression qu'un cadeau a pu lui être fait parce qu'on l'aimait bien ou parce qu'on souhaitait son silence.
Qu'a dit au juste monsieur Duhaime au sujet de ces paiement de 56 M$?
On ne sait toujours pas. Mais croisons les doigts, même si elle ne pose pas la question, la Caisse invite le conseil à une plus grande transparence. On saura peut-être enfin jeudi.