" Les entreprises sont naïves et innocentes face à l'espionnage "

Publié le 15/01/2011 à 00:00, mis à jour le 21/01/2011 à 08:55

" Les entreprises sont naïves et innocentes face à l'espionnage "

Publié le 15/01/2011 à 00:00, mis à jour le 21/01/2011 à 08:55

Michel Juneau-Katsuya est pdg de l'entreprise Northgate. L'expert en sécurité met les organisations canadiennes en garde au moment où le projet de voiture électrique de Renault est la cible d'espions industriels.

Le phénomène de l'espionnage industriel est-il en croissance ?

Tout à fait. Depuis la fin de la guerre froide, on est passé d'une confrontation militaire à une confrontation économique. Beaucoup de pays, et pas juste les grandes puissances, utilisent leur service de renseignements nationaux pour espionner des sociétés étrangères et transmettre l'information à leurs propres entreprises.

Dans 80 % des cas, on s'aperçoit que ce sont des gens auxquels les entreprises avaient donné un accès légitime à de l'information qui ont espionné celles-ci : des employés, des contracteurs, des sous-contracteurs... L'espionnage est toujours une histoire humaine.

Le Canada est-il particulièrement visé ?

Oui, car le Canada est une société basée sur le savoir et qui a beaucoup à offrir en matière d'innovation. Malheureusement, les lois canadiennes protègent très mal les entreprises, et le gouvernement ne parle jamais du problème. Les entrepreneurs sont donc très peu sensibilisés au fait que le Canada est peut-être la cible numéro un en Occident, davantage que les États-Unis, toutes proportions gardées. Les entreprises canadiennes sont naïves et innocentes face à l'espionnage, et cela est dû à un manque de connaissances. Et malheureusement, lorsque l'entrepreneur va voir le SCRS pour se faire aider, il est trop tard : la propriété intellectuelle a disparu. Les conséquences de ce phénomène sont énormes : on estime que le gouvernement canadien perd de 20 à 24 millions de dollars par année en retombées de toutes sortes.

Comment les entreprises peuvent-elles se protéger ?

Il faut d'abord faire une évaluation de la menace : que dois-je protéger dans mon entreprise ? Puis, de la provenance de cette menace, soit les organisations qui pourraient tenter de nous attaquer et de voler notre technologie. Ensuite, il faut adapter sa culture d'affaires. Au Canada, elle n'est malheureusement pas aussi sophistiquée que dans d'autres pays. Des PME vont à l'étranger et font affaire avec des partenaires plus expérimentés, dont les façons de faire diffèrent des nôtres et pour lesquels le vol et la copie sont des pratiques totalement acceptables. Une fois qu'on s'est fait voler, il n'y a plus rien à faire, surtout à l'étranger. Les Canadiens croient que leurs lois peuvent les protéger. À tort !

( CV )

Nom: Michel Juneau-Katsuya

Âge: 51 ans

Fonction: Pdg

Entreprise: The Northgate

Cet ancien cadre du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) a fondé cette firme d'analyse du risque basée sur le renseignement stratégique pour les entreprises.

À la une

Il faut concentrer les investissements en R-D, dit le Conseil de l’innovation du Québec

24/04/2024 | Emmanuel Martinez

L’État devrait davantage concentrer les investissements en R-D dans certains secteurs, selon le Conseil de l’innovation.

Repreneuriat: des employés au rendez-vous

23/04/2024 | Emmanuel Martinez

REPRENEURIAT. Le taux de survie des coopératives est bien meilleur que celui des entreprises privées.

De nouvelles règles fiscales favorisent le repreneuriat familial

Édition du 10 Avril 2024 | Emmanuel Martinez

REPRENEURIAT. Elles devraient stimuler le transfert d'entreprise à des proches.