Chaîne de blocs: Facebook assouplit sa politique


Édition du 18 Mai 2019

Chaîne de blocs: Facebook assouplit sa politique


Édition du 18 Mai 2019

Par Philippe Jean Poirier

Le PDG de Facebook, Mark Zuckerberg (Photo: Getty Images)

Pendant plus d'un an, Facebook a bloqué de façon préventive toute publicité contenant le mot blockchain dans sa régie publicitaire, sous prétexte de combattre la fraude liée à la cryptomonnaie.

Durant cette période, Mark Zuckerberg et son équipe ont signalé un intérêt pour ce secteur : le haut dirigeant David Marcus a déclaré sur Twitter avoir créé un groupe de travail pour «explorer comment intégrer la chaîne de blocs (blockchain) à Facebook». Et des sources crédibles ont rapporté que l'entreprise planchait sur un service de paiement en cryptomonnaie, le projet Libra.

Les acteurs de la blockchain que nous avons joints ces dernières semaines ont décrit la situation comme étant «aberrante», «préjudiciable» et susceptible de brimer «indirectement» de «futurs compétiteurs».

Or, voilà que Facebook annonce une mise à jour de sa politique publicitaire en date du 8 mai. L'effet principal est d'assouplir les restrictions sur la blockchain. Problème résolu ? Voyons de plus près.

Un filtre qui ratissait large

En janvier 2018, Facebook a décidé de bannir de sa plateforme la publicité de produits liés à la cryptomonnaie, aux ICO et aux options binaires. Une politique qu'elle a assouplie au mois de juillet suivant, en acceptant des produits de cryptomonnaie «préautorisés» par son équipe.

«C'est une décision qui se défend, dit Frédéric Letendre, avocat associé chez Yulex et spécialiste en droit numérique. C'est actuellement le Far West dans le milieu de la cryptomonnaie. Il y a de tout et n'importe quoi. Il me semble logique que Facebook veuille encadrer sa publicité, en bon citoyen d'entreprise.»

Sans doute. Mais ce que Facebook n'a pas dit à l'époque, c'est que sa politique visait l'ensemble des sujets traitant de la blockchain. Guillaume Déziel, un consultant de la blockchain, raconte avoir été incapable de promouvoir une conférence sur le contrat intelligent et la gestion du droit d'auteur. «Rien de bien menaçant !» s'exclame-t-il. Le Printemps numérique a connu les mêmes problèmes. Et les exemples abondent, au Québec comme ailleurs.

«C'est une aberration totale, proteste David Nathan, directeur de Cryptonews, un site interdit de publicité. La blockchain est une technologie informatique basée sur la décentralisation numérique. Ses applications dépassent de loin les seuls enjeux monétaires, et le public a le droit d'être informé sur ce sujet complexe.»

Par sa mise à jour du 8 mai, Facebook lui donne raison : «Après des mois de réévaluation, à compter d'aujourd'hui, nous restreindrons cette politique afin de ne plus exiger d'approbation préalable pour la diffusion de publicités liées à la technologie blockchain, aux nouvelles du secteur, à la formation et aux événements relatifs à la cryptomonnaie.»

L'obligation d'obtenir une «préautorisation» est toutefois maintenue pour les entrepreneurs. Dave Pouliot, président de BitcoinMiles, en subit les conséquences depuis un moment. Il était incapable d'acheter de la publicité Facebook à quelques semaines du lancement de son application mobile effectuant des remises en argent ou en bitcoin.

«Avec une telle part du marché, Facebook a selon nous la responsabilité d'avoir des politiques transparentes et équitables, nous a-t-il dit avant l'annonce du 8 mai. S'ils décident de bloquer une entreprise, ils doivent le faire pour des raisons d'intérêt public. Or, en ce moment, Facebook nous restreint l'accès sans motif valable, et ça nous cause un préjudice direct.»

Anticoncurrentielle, cette politique ?

En juin 2018, l'investisseur Phillip Nunn a accusé Facebook (et Google) de vouloir mettre le marché à sa main : «Je suspecte que l'interdiction a été implémentée pour cadrer avec les plans potentiels [de Facebook et de Google] d'introduire leur propre cryptomonnaie sur le marché dans un proche avenir et, en retirant les autres annonceurs, ça leur permet de le faire selon leurs propres termes», avait-il affirmé à The Independant.

Le porte-parole que nous avons joint n'a pas voulu commenter cette accusation. Tout comme il a refusé de dire si Facebook s'engageait à traiter les annonceurs de la blockchain de manière juste et équitable. M. Déziel regrette cette attitude : «Le fait de vouloir protéger ses utilisateurs contre de potentielles arnaques financières est bourré de vertu. Or, par ses actions, Facebook se donne indirectement une longueur d'avance par rapport à ses futurs compétiteurs, car, selon plusieurs sources, il envisagerait l'aspect transactionnel pair-à-pair chez ses utilisateurs.»

La situation devra cependant encore évoluer avant d'invoquer la Loi sur la concurrence : «Le simple fait d'être un joueur incontournable et de jouer dur ne crée pas automatiquement une infraction en matière de concurrence, explique M. Letendre. Cette Loi existe pour maintenir une saine concurrence ; nulle part ne fait-on mention d'un monde de licornes et d'arcs-en-ciel où tous sont courtois. La concurrence, par nature, a quelque chose de féroce.»

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