Entrevue n°239: Charles Fombrun, fondateur et président, The Reputation Institute


Édition du 14 Mars 2015

Entrevue n°239: Charles Fombrun, fondateur et président, The Reputation Institute


Édition du 14 Mars 2015

Par Diane Bérard
D.B. - La réputation d'une entreprise repose sur sept dimensions, quelles sont-elles ?

C.F. - D'abord la performance financière. Ensuite, est-ce un bon employeur ? Se comporte-t-elle en bon citoyen ? Ses produits et ses services sont-ils de qualité ? Est-ce une entreprise innovante ? Fait-elle preuve de leadership, ses dirigeants sont-ils considérés comme influents ? Que peut-on dire de sa gouvernance : cette entreprise a-t-elle des valeurs ? Un code de conduite ? A-t-elle un comportement éthique ? Ce sont ces sept dimensions que nous mesurons avec le RepTrack. Ensemble, elles donnent le score de réputation d'une entreprise.

D.B. - Qu'est-ce que le pouls d'une réputation et comment le prend-on ?

C.F. - Le pouls d'une réputation, c'est la réaction instinctive que l'on manifeste à l'égard d'une entreprise. Ça se résume à «j'aime» ou «je n'aime pas». Prendre ce pouls est la première étape de la gestion des perceptions. La deuxième consiste à passer à travers les sept dimensions énoncées plus haut pour déterminer celle ou celles qui font baisser le pouls. La troisième étape consiste à examiner 30 indicateurs encore plus détaillés pour cerner les actions précises à poser pour faire grimper le pouls de votre réputation.

D.B. - Une entreprise peut-elle avoir une bonne réputation malgré un pdg peu charismatique ?

C.F. - Oui, à condition que cette entreprise possède une culture et des valeurs fortes. Prenez Johnson & Johnson. Pour la plupart desconsommateurs, c'est une société qui fabrique des produits pour bébés. Même si ces produits ne constituent plus qu'une faible portion de son portefeuille, l'image rassurante était si forte qu'elle est restée dans nos esprits. Tout comme les valeurs qui y sont associées.

D.B. - Qu'arrive-t-il si une moitié des parties prenantes d'une entreprise lui attribue une bonne réputation, et l'autre, une mauvaise ?

C.F. - C'est probablement le pire scénario, quand les actions que vous posez font grimper votre cote auprès du premier groupe et qu'elles provoquent la colère du second. Vous pouvez toujours établir une priorité parmi vos parties prenantes. Mais cela peut se retourner contre vous. Un groupe que vous jugiez moins influent peut le devenir en s'organisant. Pensez aux tribus qui se sont dressées violemment contre les minières ou les exploitants forestiers. Bref, vous ne voulez pas que vous battre contre l'une des vos parties prenantes ni que ces parties prenantes s'affrontent entre elles. Il vaut mieux que tout le monde soit un peu instatisfait qu'un seul groupe entièrement satisfait. Parfois, il faut viser la décision la moins mauvaise...

D.B. - Une entreprise qui mène des affaires dans plusieurs pays peut-elle «standardiser» sa réputation ?

C.F. - Non, aucune entreprise ne peut gérer sa réputation à l'échelle mondiale. Les influenceurs de réputation varient d'un pays à l'autre. Certains enjeux sont plus délicats, comme l'eau. Coca-Cola ne peut pas se présenter dans un pays d'Afrique et dire «vous n'avez pas d'eau potable ? Buvez du Coke !» Pour être acceptée localement, elle doit contribuer à l'apport en eau potable.

D.B. - Une entreprise peut-elle empêcher un dérapage local de contaminer sa réputation ailleurs ?

C.F. - Non, l'information voyage trop vite. Il ne reste qu'une solution : communiquer les faits rapidement, afin d'éviter les distorsions.

D.B. - Comment gère-t-on sa réputation auprès des politiciens et des autorités de réglementation, par exemple ?

C.F. - C'est délicat. Les politiciens se soucient de leur réélection. Ils ont besoin d'être rassurés, de savoir que votre entreprise ne portera pas préjudice à leur réputation. Vous devez leur prouver que n'avez pas de squelette dans votre placard.

D.B. - Un dernier conseil ?

C.F. - La réputation d'une entreprise est un actif, traitez-la comme tel.

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