Classement expérience client : le plaisir des sens et la spécialisation priment

Offert par Les Affaires


Édition du 21 Novembre 2015

Classement expérience client : le plaisir des sens et la spécialisation priment

Offert par Les Affaires


Édition du 21 Novembre 2015

Lush.

Finalement, le consommateur québécois n'est guère différent d'un nouveau-né. Offrez-lui de sentir, de goûter, d'entendre ou même de toucher, et vous obtiendrez du coup toute son attention.

Voilà l'une des principales conclusions qu'on peut tirer de la plus récente étude de Léger sur l'expérience de magasinage des consommateurs, dont Les Affaires a obtenu copie. Un total de 143 chaînes de magasins présentes au Québec ont été analysées, jugées et classées en fonction de l'appréciation des milliers de consommateurs sondés.

Découvrez le classement complet et la méthodologie à la fin de l'article

Ainsi, des enseignes comme Yves Rocher, Chocolats favoris, Lush ou David's Tea se retrouvent dans le peloton de tête du palmarès expérientiel produit par Léger. Même que des sept détaillants qui ont réussi à obtenir un indice d'appréciation supérieur à 90, cinq exploitent sans ménagement le plaisir des sens des consommateurs qui, loin de s'en offusquer, semblent en redemander !

«Il n'y a là rien de plus normal, s'esclaffe au bout du fil Benoît Duguay, professeur et chercheur spécialisé en consommation à l'Université du Québec à Montréal. Le plaisir est une donnée fondamentale dans la consommation. Connaissez-vous beaucoup de gens qui n'aiment pas se faire chouchouter, sentir des odeurs qui les transportent ou recevoir un échantillon de crème ?»

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Faire sentir que le client est roi, voilà ce que partagent les cinq lauréats du prix Wow, un honneur remis chaque année depuis six ans par les artisans de l'étude intitulée «L'Indice Wow d'Expérience Client 2015». Cette année, ce prix est allé à Sephora, Nespresso, Lush, David's Tea et Chocolats Favoris. En plus de se classer parmi les meilleurs du palmarès, ces détaillants se démarquent, selon Hélène Crépin, vice-présidente, division consommateurs, par leur capacité de faire vivre à leurs clients une «expérience vraiment surprenante, divertissante et innovante en magasin».

Cet art encore nouveau, que maîtrisent les meilleurs, est qualifié dans l'industrie de «retailtainment», une contraction des mots anglais retail (commerce de détail) et entertainment (divertissement). Par leur agilité ou leur aptitude à se maintenir à l'avant-garde des goûts des consommateurs et des pratiques de l'industrie, ces détaillants parviennent à faire mentir les statistiques qui montrent, depuis des années, une baisse continue de la fréquence et de la durée des activités de magasinage, dit Christian Bourque, vice-président exécutif de Léger.

Les détaillants champions de l'expérience client savent donc, par leur stratégie de mise en marché ou la nature des articles vendus, titiller ou bien l'odorat ou bien les papilles gustatives des consommateurs. Les deux seules chaînes des sept championnes (indice de 90 et plus) à ne pas répondre directement à ce critère de l'appel aux sens sont Mondou, qui se spécialise dans la vente de produits pour les animaux domestiques, et Penningtons, qui se spécialise dans la vente de vêtements mode pour femmes de taille 14 et plus.

Les spécialistes avant les généralistes

Mondou a développé une panoplie de services pratiques et gratuits (coupe-griffes, pèse- animal, lavage et toilettage, service à l’auto) qui facilitent la vie des propriétaires de toutous et de chatons.

Dans ces deux derniers cas, Christian Bourque suggère que les détaillants savent toucher une clientèle spécifique, peu ou mal servie dans l'univers actuel. Penningtons (2e rang), comme Addition-Elle (11e rang), s'adresse aux femmes qui arrivent difficilement à trouver ailleurs des vêtements mode à leur taille. Mondou (7e rang) a développé une panoplie de services pratiques et gratuits (coupe-griffes, pèse-animal, lavage et toilettage, service à l'auto) qui facilitent la vie des propriétaires de toutous et de chatons.

La même logique s'applique lorsque des magasins d'une même catégorie sont comparés entre eux, fait remarquer M. Bourque. On constate que les détaillants spécialisés, qui s'adressent à une clientèle spécialisée souvent mal servie ailleurs (les chasseurs et pêcheurs, par exemple), obtiennent la faveur des consommateurs.

Ainsi, dans la catégorie des détaillants d'articles de sports, Sail (20e rang) et Golf Town (30e rang) déclassent aisément Sports Experts (96e rang), bon dernier de sa catégorie, malgré des ventes et une présence inégalées dans la province.

Parmi les détaillants d'ordinateurs et d'articles électroniques, Apple Store (24e rang) déclasse haut la main la chaîne Best Buy (128e rang), généraliste et championne des objets emballés à double tour. À sa décharge, souligne Jacques Nantel, spécialiste du marketing à HEC Montréal et vice-président exécutif de Léger, voilà une entreprise en plein repositionnement à la suite de la fermeture de Future Shop.

Les secteurs favoris

Outre la catégorie des boutiques spécialisées (Chocolats favoris, Nespresso, Teavana, etc.) et d'autres chaînes de parfum, de cadeaux et de soins de beauté (Yves Rocher, Bath & Body Works, Fruits et Passion, etc.), le secteur de la pharmacie tire bien son épingle du jeu. Familiprix (15e rang) domine le secteur composé de six enseignes, où le moins performant, Uniprix, occupe tout de même la 37e position au classement général.

Dans l'alimentation, IGA (26e rang) et Metro (28e rang) sont au coude à coude et profitent toutes deux, grâce à une stratégie menant à une plus grande variété d'aliments, de l'appréciation des foodies, en particulier. Cela dit, selon les données recueillies, cette stratégie semble jouer un mauvais tour à IGA qui souffre, selon Léger, d'une perception négative de prix élevés.

À l'opposé, les catégories de détaillants les moins bien notées au plan de l'expérience client sont les dépanneurs Boni-Soir (Sobeys) et Dépanneur du Coin (Ultramar) - qui affichent les pires scores de leur catégorie, respectivement au 135e et 142e rang du classement général - ainsi que les magasins de meubles, de cuisine et de décoration, dont l'expérience inexistante ou sans réelle valeur ajoutée est peu souvent positive.

Dans cette dernière catégorie, outre Ameublements Tanguay (12e rang) qui fait office d'exception, toutes obtiennent un classement inférieur au 82e rang de J.C. Perrault. Hélène Crépin est d'avis que l'attachement de Québec à la famille Tanguay lui procure une crédibilité dont ne peuvent profiter les autres enseignes. «À Québec, le client est prédisposé à aimer l'expérience avant même son entrée en magasin», soutient-elle.

Des descentes inquiétantes

Des détaillants ont connu de fortes variations de leur indice par rapport à l'année dernière. C'est le cas, entre autres, de Marché Adonis (65e rang), maintenant membre de la famille Metro, qui a vu son indice se réduire de plus de 7 points (ou 10 %) par rapport à l'année dernière. Christian Bourque croit que ce détaillant est victime de son succès. «J'ai l'impression qu'il paie pour un trop grand achalandage et pour sa difficulté en conséquence à gérer l'attente aux caisses.»

Le secteur du vêtement a connu peu de fluctuations ; par rapport à l'année dernière, Penningtons (2e rang), Addition-Elle (11e rang) et Reitmans (39e rang) dominent cette catégorie de vingt chaînes. Quant à Laura/Petite/Plus (47e rang), elle a enregistré la pire décroissance annuelle avec une baisse de plus de 8 points par rapport à l'indice de l'année dernière. Les difficultés de la chaîne, qui a recouru aux tribunaux en août dernier pour se protéger de ses créanciers, pourraient avoir eu un effet, estime M. Bourque.

Le secteur du jouet perd aussi des plumes. Au 141e rang sur 143, Toys"R"Us arrive de moins en moins à rendre l'expérience d'achat agréable selon les résultats de l'Indice Wow. Le détaillant a vu son indice perdre 8 points (ou 15 %) en 2015.

Léger pense que le secteur du jouet risque de voir sa clientèle migrer vers les achats en ligne s'il ne parvient pas à s'ajuster aux attentes des consommateurs. Pour toute une génération, le cellulaire est devenu un cerveau externe, dit le professeur Benoît Duguay. Les clients souhaitent un service rapide ; les détaillants n'ont d'autres choix que de s'ajuster.

Des moyens de se relever

C'est ce que tente de faire Sports Experts avec son nouveau magasin de Laval, qui fait appel à plusieurs technologies susceptibles de transformer l'expérience de la clientèle : écrans tactiles, iPad, puces RFID. Dans la foulée, l'entreprise lancera également un site transactionnel.

«Si c'est pour reproduire le catalogue, ce n'est bon à rien. Mais s'il s'agit de donner de l'information sur les produits, leur taille, leur poids, les façons de l'utiliser ou de l'installer, comme le ferait un employé ou mieux qu'il ne pourrait le faire, là tu parles d'une réelle valeur ajoutée pour le client», fait valoir Jacques Nantel.

Autre secteur qui pourrait s'inspirer du virage technologique de Sports Experts : celui des quincailleries et des centres de rénovation. Canac (17e rang) et Patrick Morin (40e rang) dominent cette catégorie de neufs acteurs, tandis que Réno-Dépôt (114e rang) et Unimat (125e rang) ferment la marche.

Les clients de ces centres sont affamés de conseils et d'aide pour leurs projets, ce qu'ils trouvent très difficilement, en particulier dans les grandes surfaces exploitées par Rona et Home Depot. «Le premier d'entre eux qui innovera dans l'utilisation des technologies numériques en magasin en sortira gagnant», prédit Mme Crépin.

L’indice Wow Léger de l’expérience client 2015

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