Pour l’avancement des femmes en affaires

Publié le 15/04/2010 à 16:34

Pour l’avancement des femmes en affaires

Publié le 15/04/2010 à 16:34

«J'ai fait beaucoup pour l'avancement des femmes. Mais tout ce que je fais, je le fais dans l'optique de permettre à nos organisations d'avoir les meilleurs talents», affirme Anne-Marie Hubert.



Cette associée directrice aux services consultatifs chez Ernst & Young Canada s'investit depuis des années dans l'avancement professionnel des femmes.

Urgenceleadership.com a rencontré cette professionnelle qui a accédé en 2009 au palmarès des 100 femmes les plus influentes du Canada, organisé par le Women's Executive Network de Toronto.

Urgence Leadership : Vous avez présidé le comité consultatif canadien de votre firme sur l'avancement des femmes de 2002 à 2006 et participé à plusieurs conférences et initiatives en ce sens au sein de votre société. Qu'est-ce qui vous pousse à déployer autant d'efforts pour le développement professionnel des femmes?

Anne-Marie Hubert :
Il y a plusieurs défis dans notre société, mais je constate qu'il y a un défi particulier avec les femmes. Je suis plus associée à la cause des femmes, mais l'objectif ultime est l'accès aux meilleurs talents. C'est critique pour le succès de nos organisations et de notre économie à plus long terme. On s'en tirera mieux que les autres si on donne aux femmes le potentiel de se réaliser. Cela est aussi vrai pour les immigrants.

UL : Vous avez été mandaté pour représenter le Canada sur le «Ernst & Young Gender Equity Task Force» des Amériques. Quelle était votre mission?

AMH :
Comme firme, j'ai rapidement réalisé que nous étions meilleurs que nos compétiteurs, que le marché en général et que les autres régions au sein des Amériques. Mais malgré tout, on n'était pas très bon! Quand on comprend le vécu des femmes sur le terrain, il est assez évident qu'il y a des situations inacceptables.

À l'heure actuelle, peu importe où l'on se trouve dans le monde, il y a très peu de pays où les hommes et les femmes ont des chances égales. Il y a donc des biais systémiques, des biais de société. Comme entreprise, on doit les comprendre pour s'assurer qu'on est à même d'attirer, de développer et de conserver les meilleurs talents.

UL : Trouvez-vous que le rôle de la femme en entreprise a évolué depuis le début de votre carrière, que ce soit au sein de votre entreprise ou de votre industrie?

AMH :
Quand je parlais à mes associés qui étaient sur le point de prendre leur retraite, ils me disaient : «Anne-Marie ce n'est pas une évolution, c'est une révolution». Quand eux ont fini HEC, il y avait trois femmes sur 500 finissants! Moi, qui a commencé ma carrière il y a 25 ans, quand j'ai fini l'université il y avait 50% de femmes. Donc pour moi, il y a eu une grande évolution.

J'ai l'impression qu'il y a  eu du changement au cours des dix dernières années. Malheureusement, les préjugés et les stéréotypes sont encore très présents et créent des situations où on peut faire des erreurs de gestion, perdre du talent et ne pas nécessairement permettre aux meilleurs de progresser.

UL : Depuis 2006, la Norvège impose un quota minimum de 40 % de femmes au sein d'un conseil d'administration. D'autres pays contemplent des mesures similaires. Au Canada, le taux moyen stagne autour de 13%. Qu'en pensez-vous?

AMH :
Ça, c'est si on inclut les sociétés d'État! Si on se limite aux sociétés publiques, c'est beaucoup plus bas que cela, je pense que c'est autour de 6 %. C'est désastreux!

UL : Qu'est-ce qui explique cette situation à votre avis?

AMH :
Il y a le processus de nomination, quoique cela évolue grandement avec tous les défis de gouvernance. Mais souvent, on veut au sein d'un conseil d'administration des gens avec qui on se sent à l'aise, en qui on a confiance.

Donc quand on choisit les candidats, on veille à ce que quelqu'un donne une référence positive et connaisse la personne et son vécu. On cherche souvent des candidats qui ont de l'expérience de CEO. Si on se limite à certains critères de sélection limitatifs, comme toujours demander des CEO, on aura moins de femmes dans les CA, car il n'y a pas beaucoup de femmes CEO de grandes corporations au pays.

UL : En quoi une plus grande proportion de femmes dans les conseils d'administration ferait une différence?

AMH :
Fondamentalement, les hommes et les femmes n'analysent pas toujours les choses de la même façon. C'est important d'avoir la perspective de 50 % de la population quand on prend des décisions!

Si je me retrouve dans n'importe quelle organisation aujourd'hui, je voudrais être certaine que quand je prends une décision importante, j'ai la perspective des hommes, des femmes, et aujourd'hui j'aimerais aussi avoir celle des jeunes parce qu'ils ne communiquent pas de la même façon. Et quand tu regardes une ville comme Toronto, 47 % de la population est née ailleurs qu'au Canada. Le point de vue de ces gens, les relations qu'ils peuvent avoir à l'étranger si je travaille à l'international, leur compréhension des modes de fonctionnement ailleurs dans le monde, peuvent être très utiles.

Il est donc très important d'avoir une grille de compétences recherchées et ensuite, de trouver les candidats qui y correspondront le mieux. Il ne faut cependant pas négliger la relation de confiance, car il faut que les gens travaillent bien ensemble.

UL : Pensez-vous qu'il y a des différences dans la façon dont les hommes et les femmes exercent leur leadership?

AMH :
Il n'y a  pas de réponses faciles, parce que chaque individu à son style propre. Il y a des hommes qui ont des compétences féminines et des femmes qui ont un style plus masculin... C'est propre à l'individu.

UL : Quelle est votre définition d'un leadership efficace en affaires?

AMH :
D'abord et avant tout, il faut avoir des valeurs. Ensuite, il faut une vision et des aspirations. Et il faut rêver. Il faut être capable de communiquer tout cela et de les traduire en objectifs et en résultats. Mais il faut que tout soit fondé sur des valeurs et sur une vision inspirante pour l'ensemble des gens qu'on veut rallier.

UL : Vous êtes non seulement impliquée dans l'avancement de la femme, mais vous avez été membre du Conseil consultatif mondial d'Ernst & Young, vous présidez le comité éducation, formation main-d'œuvre à la Fédération des chambres de commerce du Québec et êtes membre du Comité des affaires publiques de l'Institut Canadien des Comptables Agréés, de même que du conseil du Forum de politiques publiques. Où trouvez-vous le temps et l'énergie à accorder à tous ces engagements?

AMH :
J'aime ça! Quand on aime ce qu'on fait, on trouve le temps et l'énergie. Le grand défi est de gérer nos passions! Et puis d'allouer du temps à toutes nos passions. C'est également de s'entourer dans nos activités paraprofessionnelles, personnelles et professionnelles de gens compétents et de gens fiables.

UL : Quel est votre secret pour arriver à trouver un équilibre entre votre carrière, vos engagements et votre vie personnelle?

AMH :
La qualité des gens qui m'entourent, la qualité de mes équipes, leur compétence professionnelle et leur sens des responsabilités. On peut se fier à eux quand on a besoin d'eux et réciproquement ils peuvent se fier à nous quand ils ont besoin de nous. Je pense que c'est la meilleure recette : avoir des gens solides autour de soi, des gens de confiance. Et avec ça, on peut faire de grandes choses.

UL : En quoi pensez-vous que ces multiples implications font de vous une meilleure leader?

AMH :
Cela élargit mes horizons. Cela me fait voir d'autres façons de faire les choses, d'autres façons de penser. Cela me fait rencontrer des gens différents des ceux que je côtoie au quotidien pour faire mon travail. Donc tout cela est enrichissant et me permet de contribuer avec des horizons plus élargis à mon propre travail.

UL : Vous avez reçu plusieurs hommages (prix Rosemary Meschi - qui rend hommage aux personnes qui soutiennent le perfectionnement et l'avancement professionnels des femmes au sein d'Ernst & Young - finaliste en 2009 au Top 100 des canadiennes les plus influentes du Canada.) De quoi êtes-vous le plus fière?

AMH :
Oubliez les prix! Ce dont je suis le plus fière, ce sont mes enfants! J'ai trois enfants. Professionnellement, il n'y a pas de prix ou de rôle auquel je pense en particulier. Je pense que c'est la capacité au quotidien d'avoir un impact positif sur les gens qui m'entourent.

Cela peut aboutir à des prix, à des résultats, mais surtout à faire une différence sur les gens qui m'entourent. Et si tu veux faire une différence sur les gens qui t'entoure au travail, il faut livrer des résultats, leur donner des opportunités. Un va avec l'autre. Je pense que c'est le plus grand bonheur.

UL : À partir de 1997, vous avez été prise sous l'aile d'Alain Benedetti, aujourd'hui associé retraité d'Ernst & Young. En quoi le fait d'avoir un mentor a été bénéfique pour votre carrière?

AMH :
Alain a été très important. Il m'a donné des chances. J'avais peu d'acquis derrière moi et il voyait du potentiel. Il m'a donné la chance de faire une différence. Il a eu le courage de le faire et de m'aider quand j'en avais besoin, de me conseiller sur les choses à faire et à ne pas faire pour réussir dans les défis qu'il m'a donnés. S'il ne m'avait pas donné cette chance, je ne serais certainement pas ici aujourd'hui.

UL : Quel est le message que vous aimeriez lancer aux femmes en affaires?

AMH :
Il est important de faire ce que l'on aime, des choses qui nous passionnent. Il est également important de comprendre les biais systémiques et d'avoir du soutien pour naviguer à travers tout cela. Car il y en a des biais, qu'on le veuille ou pas. Il faut créer des liens pour être capable de comprendre les règles du jeu.

 

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