Le monde de Guy Coulombe

Publié le 03/10/2008 à 19:07

Le monde de Guy Coulombe

Publié le 03/10/2008 à 19:07

Par lesaffaires.com

Guy Coulombe a présidé la Commission d'étude sur la gestion de la forêt au Québec. Il a aussi mené les négociations entre les médecins spécialistes et le gouvernement du Québec. Maintenant, il s'attaque à l'industrie porcine.


Quels aspects de votre expérience professionnelle vous servent le plus dans la réalisation de vos mandats ?

J'ai occupé des postes stratégiques dans la fonction publique québécoise, dont celui de secrétaire général du Conseil exécutif. Ce dernier est le plus haut fonctionnaire de l'État ; il est en quelque sorte le sous-ministre du premier ministre. Dans un poste comme celui-là, il y a toujours des situations complexes à régler. On est confronté à des problèmes d'ordre financier et budgétaire, mais aussi à des défis qui relèvent des relations interpersonnelles. Plus on a de dossiers à suivre et de collaborateurs, plus on apprend à aller à l'essentiel.

Que dites-vous aux acteurs lorsque vous prenez un dossier en main ?

Je leur dis que je ne suis pas LE sauveur. "C'est votre industrie, vous y baignez toute la journée. N'attendez pas de moi que je sois éclairé par le Saint-Esprit ; c'est vous qui possédez déjà les solutions." Nous discutons, nous essayons d'expliquer pourquoi des éléments négatifs existent et persistent dans le dossier et dans le secteur en général. Cela dit, tout le monde ne propose pas les mêmes solutions. Le défi consiste à trouver ensemble les éléments essentiels qui feront avancer les choses. Je suis une personne optimiste. Je tiens toujours pour acquis que ceux qui s'occupent d'un dossier veulent que cela fonctionne.

Lors de négociations, quelles habiletés privilégiez-vous ?

La crédibilité du négociateur est le facteur le plus important. S'il dit "Moi, je pense ceci" ou "J'envisage qu'une recherche sur des données nous donnerait tel résultat" et que ses dires sont confirmés par la suite, sa crédibilité s'en trouve renforcée. Il importe aussi que les gens autour de la table aient le sentiment que nous ne nous perdrons pas dans les détails. Ce qui irrite le plus les hauts dirigeants, c'est de sentir que l'on discute des aspects secondaires du problème. Et puis, il faut donner l'heure juste. Je suis plutôt direct ; lorsque j'ai quelque chose à dire, je n'y vais pas par quatre chemins. Parfois, il faut dire : "Nous avons atteint une impasse. De deux choses l'une : soit on arrête ça là, soit on prend quelques heures ou quelques jours pour étudier le problème sous un autre angle et dans un climat différent".

Quels critères utilisez-vous pour arbitrer entre les considérations économiques et les aspects environnementaux ?

La question environnementale définie en 1975 n'est pas celle de 1995, ni celle de 2005. Ce domaine a beaucoup évolué, tant sur le plan de la perception que sur celui de la recherche scientifique. Je suis très sensible à cela, mais j'essaie de ne pas tomber dans un excès ou dans l'autre. D'un côté, il y a ceux qui voient toute la réalité sous l'angle environnemental. De l'autre, il y ceux qui disent "Tout ce qui compte, c'est le développement économique". À mes yeux, cette opposition est un peu un faux débat qui intéresse surtout les journalistes. Pour les questions environnementales, je m'appuie sur les recherches scientifiques. Sur quoi s'appuyer, sinon ? Sur les perceptions des uns et des autres ?

Les pertes d'emplois se multiplient dans le secteur forestier. Dans quelle mesure croyez-vous qu'elles sont attribuables à la hausse du dollar canadien ? Ou encore à votre recommandation de réduire de 20 % les droits de coupe ?

Les crises de cette ampleur ne sont jamais le résultat d'un seul facteur. La hausse du dollar est certainement un aspect important, mais il y en a d'autres. Quant aux recommandations de notre rapport, leur impact se fera sentir à plus long terme, sur notre manière de gérer notre forêt. Je demeure d'ailleurs convaincu que ces recommandations sont valables. Le recours aux logiciels de prévision les plus récents permettra de mieux connaître l'évolution de la forêt. Nous aurons une perspective plus claire sur trois éléments essentiels : la quantité de bois disponible, la qualité de ce bois, et le coût économique lié à son exploitation. Ces données éclaireront les entreprises et faciliteront les décisions du gouvernement.

Parailleurs,celafait25ansque l'ons'attendàuneconsolidationdu secteur. Dans le contexte international d'aujourd'hui, les petites unités de production se trouvent dans une situation précaire. Mais doit-on maintenir artificiellement ces petites entreprises si elles ne sont pas rentables ? Cela étant dit, les problèmes sont vrais. Le secteur forestier ne peut se développer si on ne tient pas compte de l'aspect social. La consolidation est inévitable, alors aussi bien prévoir les coups, sinon les conséquences risquent d'être plus graves.

Comment envisagez-vous les discussions avec les acteurs de l'industrie porcine ?

Le délai pour réaliser ce mandat est serré, quelques mois à peine, puisque je dois rendre compte de mes démarches au début de mars. Je ne cherche donc pas à faire l'unanimité, c'est impossible. J'espère atteindre une sorte de consensus qui favorisera le développement de l'industrie. Les objectifs ont volontairement été définis de façon large. La crise porcine est bien réelle. Il nous reste à trouver la manière d'agir sur certaines variables, avec la collaboration des principaux acteurs. Nous ne pouvons certainement pas influer sur le cours du dollar américain. En revanche, nous pouvons agir sur les relations entre les acteurs, sur les difficultés de financement et sur les problèmes de mise en marché. Et c'est ce que nous tenterons de faire.

Cet article a été publié dans la revue Commerce en janvier 2008.

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