Et si votre entreprise achetait un chalet?


Édition du 26 Octobre 2022

Et si votre entreprise achetait un chalet?


Édition du 26 Octobre 2022

Par Catherine Charron

Aussi bucolique soit-il, le chalet corporatif est considéré au sens de la loi comme un établissement de travail. (Photo: Mark Olsen Unsplash)

En mai 2023, la PME Rablab inaugurera un chalet de 2700 pieds carrés spécialement conçu pour ses télétravailleurs, à un jet de pierre de Rawdon, dans Lanaudière. Ce nouveau «bureau» dont l’objectif est de resserrer les liens qui unissent les membres de l’équipe est le fruit de plus d’un an de préparatifs autant de la part de la direction que d’un comité d’employés.

La PME a d’ailleurs loué, depuis avril 2021, différentes propriétés, une semaine par mois, sorte de laboratoire qui sert à peaufiner la formule. «Ce sont les mêmes règles de conduite que celles qu’on appliquera dans notre chalet», raconte son président Jean-Philippe Dauphinais. Ces escapades ont braqué les projecteurs sur l’importance de miser sur un solide wifi, tout comme de bien définir le rôle de cet espace dans l’écosystème de l’entreprise.

«Ce n’est pas un chalet de party, c’est un autre lieu de travail», souligne son cofondateur.

 

1. Des attentes claires

La PME ne laisse donc pas place à l'interprétation. «On l’a présenté comme si on ouvrait à Longueuil: les gens vont au bureau. Ils sont responsables d’apporter leur lunch et leurs choses pour être confortables. […] On a créé un guide de conduite, établi les heures de travail, d’arrivée et de départ, le genre de comportement qu’on y tolère ou pas», énumère-t-il. Mikaël Maher, avocat en droit du travail et de la personne à Fasken, encourage les entreprises qui envisagent d’offrir un chalet à ses employés à établir clairement ses attentes. Elles doivent adapter leur politique de travail afin de définir notamment ce qui relève ou pas de la sphère privée et de la sphère professionnelle lorsqu’ils y passent quelques jours.

En effet, aussi bucolique soit-il, cet espace est considéré au sens de la loi comme un établissement de travail, un prolongement du bureau, et les responsabilités qui incombent aux entreprises s’y appliquent.

«Ce n’est pas parce qu’on sort des heures de travail que l’employeur n’a plus d’obligation à l’égard de son équipe. Au contraire, il continue à en avoir, particulièrement dans un contexte où on offre un chalet à nos employés», souligne-t-il

 

2. Des responsabilités partagées

Certaines organisations pourraient être tentées de faire signer un document qui les déresponsabilise en cas d’accident au chalet. Or, un employé ne peut se soustraire à la protection d’une loi publique, rappelle Jean-Claude Turcotte, associé du cabinet d’avocats Loranger Marcoux. Selon l’article 51 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, le patron doit notamment s’assurer que l’espace est sécuritaire. «Si, de bonne foi, il décide de louer un chalet sans trop vérifier qu’il n’est pas dangereux, il peut faillir à ses responsabilités.»

L’employé doit aussi prendre les mesures nécessaires pour demeurer en sécurité, stipule l’article 49 de la loi. Ainsi, s’il se blesse alors qu’il est en état d’ébriété en soirée, ce ne serait «a priori» pas un accident de travail, à moins qu’un test applicable ne prouve le contraire, préviennent les deux experts.

«Puisque c’est un chalet mis à la disposition des employés, il y a un risque que ce soit considéré comme survenu "à l’occasion du travail"», indique Mikaël Maher.

 

3. Un espace adapté

Des craintes à cet égard n’ont jamais freiné Rablab dans sa démarche, précise Jean-Philippe Dauphinais. C’est plutôt le léger retard qu’ont accusé certains employés lorsqu’ils étaient de passage dans les chalets loués au cours des derniers mois qui les a inquiétés.

Cependant, l’«espace n’était pas tout à fait adapté pour travailler. Le Rablodge aura des bureaux et une salle de conférence, de même qu’un wifi incroyable. Ces deux petits facteurs qui nous achalent vont donc être réglés», assure le patron.

Le chalet pourra y accueillir confortablement autant pour travailler que pour dormir de 16 à 20 télétravailleurs, de 8 h le lundi à 18 h le vendredi.

 

4. S’entourer d’experts

En plus d’examiner comment d’autres entreprises s’y sont prises, la PME a sollicité un avocat et un cabinet comptable pour que l’expérience se déroule sans trop de heurts.

En effet, un tel espace de travail peut représenter un avantage imposable dans certains cas, rappelle Jean-François Thuot, CPA et associé en fiscalité chez PwC Canada.

«Le simple fait d’exercer son emploi dans un endroit différent d’un bureau ne crée pas un avantage imposable, nuance-t-il. Si le chalet est disponible le week-end pour un usage personnel, là oui.»

Il ajoute que la disposition à la loi rendant inadmissible la déduction des dépenses liées à «un chalet/hôtel» pourrait ne pas s’appliquer, puisque celle-ci concernait davantage les installations rudimentaires de chasse ou de pêche. « S’il ne sert qu’à des activités commerciales, les dépenses qui s’y rapportent vont être déductibles.» D’où l’importance de faire preuve de prudence et d’être bien accompagné.

«On peut avoir peur que nos employés se pètent la face le mardi soir et perdent en productivité le mercredi, concède Jean-Philippe Dauphinais. Ça ne nous est pas arrivé. Je ne dis pas que ça ne surviendra jamais, mais quand tu fais confiance aux gens, la grande majorité du temps, ils vont bien te traiter en retour. Il faut instaurer un cadre, oui, mais leur laisser de la latitude aussi.»

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