Utiliser intelligemment l'intelligence artificielle

Offert par Les Affaires


Édition du 07 Avril 2018

Utiliser intelligemment l'intelligence artificielle

Offert par Les Affaires


Édition du 07 Avril 2018

Des employés de The Co-operators, une compagnie d’assurance qui utilise l’intelligence artificielle afin de calculer les risques.

Vous croyez que l'intelligence artificielle est trop compliquée pour votre entreprise ? Pas si vous êtes en mesure de reconnaître le type de problème auquel pourrait s'attaquer cette technologie, de hiérarchiser et d'implanter des projets sans vous casser le cou. Voici comment démystifier et appliquer l'IA pour vos besoins.

« À la base, à l'intérieur de l'organisation, il faut savoir que l'intelligence artificielle existe et avoir une idée de ce que ça peut faire et de quand on peut l'utiliser. Alors quand un problème ou un défi survient, on peut au moins considérer cette technologie », explique Carl Lambert, vice-président de l'intelligence d'affaires et chef des données et de l'analytique chez The Co-operators, une compagnie d'assurance. Il sera aussi conférencier le 8 mai à l'événement Intelligence artificielle, organisé par le Groupe Les Affaires.

Il y a quelque temps, son équipe et lui ont par exemple jeté un coup d'oeil attentif aux cartes géographiques qu'ils utilisent pour déterminer l'élévation à différents endroits dans le pays. Cela leur permet, au moyen d'un modèle prédictif, d'évaluer les risques d'inondations. Quelque chose clochait. Un des membres de l'équipe, qui regardait un quartier qu'il connaissait bien, s'est aperçu que le modèle prédisait, en cas d'inondation, que l'eau inonderait tout le quartier... sauf le parc municipal.

C'est que les cartes, construites par GPS, prenaient la cime des arbres pour le plancher des vaches. « On a donc réalisé que nos cartes avaient besoin d'être améliorées pour mieux calculer les risques, relate M. Lambert. Sachant ce que peut faire l'intelligence artificielle, on a donc eu le réflexe naturel d'y faire appel pour nous aider. » Mais ce réflexe, l'entreprise l'a eu seulement parce que ses équipes comprenaient bien le potentiel de cette technologie.

Mode labo

Comment améliorer votre compréhension du potentiel de l'intelligence artificielle ? Carl Lambert suggère aux entreprises de passer en mode laboratoire et de faire des essais. La pratique rend parfait. Pas n'importe quel essai par contre. Priorisez de petits projets sans risque pour vos clients et votre image. « Dans notre cas, par exemple, notre premier projet était de créer un outil qui prédisait, dans nos tableaux de bord, quel serait le prochain rapport qu'une personne consulterait. »

Par la suite, son équipe a développé un outil un peu plus complexe qui filtre les messages envoyés à la boîte de courriel générale de l'entreprise. Plus précisément, l'algorithme lit le courriel, en détermine l'objet et le fait suivre à la bonne personne. « On a un taux d'exactitude de 90 %, dit M. Lambert. On peut même améliorer notre performance grâce au machine learning. »

Reste que pour l'instant, le projet est sans risque. La prochaine étape, de répondre aux courriels automatiquement, serait plus risquée parce que l'algorithme pourrait envoyer une réponse inadéquate. Qu'arriverait-il si un client, blessé, écrivait pour obtenir du soutien de son assureur, mais recevait un courriel le remerciant pour ses suggestions d'amélioration du site web ?

« Partez avec l'idée que vos premiers projets sont des expériences d'apprentissage, suggère M. Lambert. Au début, votre but ne devrait pas être d'obtenir des bénéfices. Ne visez rien de révolutionnaire. Vous devez d'abord comprendre la technologie. Faites un projet pilote. »

Il suggère aussi d'employer des étudiants qui se spécialisent en intelligence artificielle. Surtout pour les entreprises dans lesquelles peu de gens sont au fait des nouvelles technologies ; cela peut aider à faciliter la transition vers un milieu de travail plus conscient de la puissance de tels outils.

À deux, c'est mieux

Elie Elia, un professeur de l'ESG-UQAM spécialisé en analytique et en intelligence d'affaires, conseille quant à lui d'aller chercher du soutien. Il estime qu'une PME, lorsqu'elle désire se lancer dans un premier projet d'intelligence artificielle, devrait approcher une ou plusieurs firmes qui se spécialisent dans le domaine. Plusieurs d'entre elles offrent des solutions clés en main.

« Souvent, si vous leur expliquez votre problème d'affaires, ces entreprises peuvent faire un prototypage, c'est-à-dire vous faire une démonstration sans frais de ce que peut accomplir l'intelligence artificielle dans le contexte de votre problème. »

Pour savoir quels problèmes cibler avec cette technologie, il conseille aux entreprises de s'éduquer, notamment en se tenant au courant de projets réalisés par d'autres entreprises. Une tâche qui, à Montréal, ne devrait pas poser problème. Parce que selon lui, la métropole est un véritable centre névralgique pour l'intelligence artificielle, un centre qui possède toutes les ressources pour s'informer à ce sujet et comprendre comment saisir une occasion et opérationnaliser un projet de cette nature.

Si M. Elia reconnaît que les entreprises ne peuvent pas devenir expertes de l'intelligence artificielle du jour au lendemain, il estime qu'elles gagneront beaucoup à commencer dès maintenant à se poser des questions et à se demander ce que cette technologie signifie pour leurs processus ou produits et services.

« D'ici cinq ou dix ans, aucune entreprise n'aura le luxe de ne pas se poser ces questions-là, dit-il. À ce moment, celles qui auront commencé à expérimenter auront une longueur d'avance. »

À la une

C'est quoi, au juste, une «job de m...»?

Il y a 14 minutes | Olivier Schmouker

MAUDITE JOB! «Mon quotidien de caissier est carrément horrible. C'est moi, ou j'ai bel et bien une «job de m...»?

Il faut concentrer les investissements en R-D, dit le Conseil de l’innovation du Québec

24/04/2024 | Emmanuel Martinez

L’État devrait davantage concentrer les investissements en R-D dans certains secteurs, selon le Conseil de l’innovation.

Repreneuriat: des employés au rendez-vous

23/04/2024 | Emmanuel Martinez

REPRENEURIAT. Le taux de survie des coopératives est bien meilleur que celui des entreprises privées.