Combien rapportent les pdg?


Édition du 30 Mai 2015

Combien rapportent les pdg?


Édition du 30 Mai 2015

Par Stéphane Rolland

Actionnaires, les pdg des grandes sociétés québécoises vous en donnent-ils pour votre argent ? La réponse risque de vous décevoir : il n'y a pas de lien entre leur rémunération et la performance de leur entreprise. C'est la conclusion de notre palmarès exclusif, mené en collaboration avec les firmes Inovestor et Gestion de portefeuille stratégique Medici.

À lire aussi:
-Évaluer la performance, une opération complexe
-La rémunération des PDG décortiquée (fichier PDF également téléchargeable ci-contre à gauche)

Notre palmarès mesure le rapport entre la rémunération des dirigeants des 50 plus importantes capitalisations boursières québécoises et la création de valeur au sein de ces entreprises au cours des cinq dernières années. Nous mesurons la performance à l'aide de trois composantes : le rendement du capital investi, la croissance du bénéfice par action et la taille de l'entreprise.

Selon cet indicateur de création de valeur, la corrélation entre rémunération et performance n'est que de 0,15 en 2014, ce qui représente un très faible lien. Une corrélation de 1 aurait signifié une adéquation parfaite entre les deux. «C'est décourageant de voir une rémunération de cette ampleur basée sur des choses qui sont parfois hors du contrôle des dirigeants», souligne Carl Simard, président et gestionnaire de portefeuille chez Medici, qui a conçu l'indicateur.

Même s'il trouve que la méthode comporte «certaines limites», Michel Magnan, professeur et titulaire de la chaire de gouvernance d'entreprise Stephen A. Jarislowsky à l'École de gestion John-Molson de l'Université Concordia, n'est «pas surpris» de notre conclusion. «Mes propres travaux démontrent que ce n'est pas évident de trouver un lien entre la rémunération et la performance, répond-il. Chaque entreprise a sa propre histoire et sa propre manière d'établir la rémunération. Il est difficile de trouver le lien.»

Cette absence de corrélation peut s'expliquer en partie par le jeu de comparaisons auquel se livrent «systématiquement» les sociétés inscrites en Bourse, avance M. Magnan. «Les conseils d'administration utilisent un groupe de pairs comparables afin d'établir une rétribution adéquate. Or, ce que décident les autres sociétés n'a pas nécessairement de lien avec la qualité du travail du dirigeant.»

Même les administrateurs des grandes sociétés internationales, dont la responsabilité est justement de déterminer la rémunération des hauts dirigeants, s'interrogent sur la pertinence des critères auxquels ils se réfèrent. Plus de la moitié des administrateurs des sociétés du Royaume-Uni (54 %) jugent que le système est «modérément dégradé» ou «très dégradé», selon un sondage de la firme de consultants Mercer, cité par le Financial Times.

La rémunération de Louis Vachon, président de la Banque Nationale, peut constituer un exemple de l'effet inflationniste qu'amène la comparaison, croit Carl Simard. M. Vachon a obtenu une rémunération de 10,1 millions de dollars au cours de l'exercice 2014. C'est une augmentation de 33 % par rapport à l'année précédente. Dans l'ensemble, M. Simard juge que les barèmes utilisés par l'institution financière pour mesurer la performance sont pertinents. Le problème n'est pas tant l'évaluation du travail des dirigeants de la banque montréalaise que la taille de la récompense qui y est associée, selon lui. «Comment peut-on justifier une rémunération globale de 10,1 M$ ? demande le gestionnaire de portefeuille. Ce sont les groupes comparables qui ont mené à cette rémunération.»

Inégalités en hausse

Cette généreuse main ouverte «pour conserver le talent» contribue à accroître les inégalités, selon M. Magnan. Il se souvient que ce sujet faisait déjà l'objet d'un débat il y a 30 ans, lorsqu'il était doctorant à l'université de Washington. Et ce, même si l'écart était bien moins prononcé à l'époque. «Ça provoque un effet d'ajustement toujours à la hausse, constate-t-il. Il y a une surenchère dans les conseils.»

Notre exercice permet d'ailleurs de constater que l'écart a continué de se creuser entre les pdg québécois et le travailleur moyen, en 2014. À 4,3 M$, la rémunération moyenne du pdg de notre palmarès représente 97 fois le salaire moyen des Québécois (849 $ par semaine), selon les données de Statistique Canada sur la rémunération hebdomadaire moyenne. L'année dernière, le même exercice nous avait conduits à un ratio de 90 fois. Il faut dire que la rémunération des dirigeants a crû en moyenne de 8,8 % en 2014. Le travailleur moyen a vu son salaire progresser de 2 % durant la même année.

Cette tendance s'observe pour l'ensemble des grandes sociétés canadiennes inscrites en Bourse, selon un rapport de l'Institut sur la gouvernance d'organisations privées et publiques. En 1998, les chefs de la direction des sociétés inscrites au S&P/TSX 60 obtenaient une rémunération équivalente à 60 fois le salaire moyen des travailleurs du secteur privé. Ce ratio a bondi à 140 fois en 2010.

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