Entrevue: Jialiang Wang, entrepreneur et fondateur de CooTek

Publié le 03/03/2012 à 00:00

Entrevue: Jialiang Wang, entrepreneur et fondateur de CooTek

Publié le 03/03/2012 à 00:00

Jialiang Wang, entrepreneur et fondateur de CooTek

Jialiang Wang frise la trentaine. En 2008, il a cofondé CooTek, qui développe des applications pour plateformes mobiles. Jialiang Wang appartient à la communauté des Young Global Shapers du World Economic Forum. Son intervention à Davos 2012 a attiré l'attention des médias internationaux.

Diane Bérard - Le mois dernier, à Davos, lors d'un panel sur la Chine, vous avez livré un vibrant plaidoyer en faveur d'une tolérance et d'une ouverture accrues envers la Chine. Pourquoi ?

Jialiang Wang - Mes copanélistes occidentaux ne parlaient que de leurs craintes et de leurs appréhensions envers une Chine qui n'observe pas les règles. Une Chine qui copie, qui ne respecte ni les brevets ni les lois. Cette Chine existe, plusieurs de nos entreprises se comportent de façon inappropriée. Mais vous ne pouvez pas - vous ne devez pas - juger toutes les sociétés chinoises d'aujourd'hui et de demain en fonction de cette réalité. C'est dangereux. L'Occident est en train de créer un stéréotype.

D.b. - En tant que jeune entrepreneur chinois, quel est votre message à l'Occident ?

J.W. - D'ici cinq ans, la plupart des sociétés chinoises seront différentes de ce que vous avez connu jusqu'ici. Mes copanélistes de Davos estimaient que le changement exigerait 10, voire 20 ans. Ils se trompent. D'ici trois à cinq ans, la Chine produira plus d'innovations que Silicon Valley. La crise nous a montré que l'économie mondiale doit changer. Vous ne vous en rendez peut-être pas compte, mais la Chine joue un rôle important dans ce processus. Elle est, et sera, à l'origine de nombreuses innovations. Je ne suis pas un phénomène isolé. J'incarne la nouvelle génération d'entrepreneurs chinois qui réalisent ce changement. Je suis la Chine de demain.

d.b. - Vous oeuvrez en technologie. Où en est le dossier de la propriété intellectuelle en Chine ?

j.W. - Si vous me demandez si le gouvernement s'investit suffisamment, je vous répondrais que la situation est meilleure qu'il y a cinq ans, et qu'elle n'a rien à voir avec ce qui avait cours il y a 10 ans. Évidemment, nous sommes encore loin derrière les États-Unis. Mais, il faut voir au-delà de la conduite du gouvernement. La sensibilité populaire ainsi que celle des entreprises face au respect de la propriété intellectuelle progressent bien plus vite que ne le font les actions du gouvernement. Mon entreprise, par exemple, a recruté les meilleurs spécialistes américains du droit de la technologie pour faire en sorte qu'elle respecte les règles.

d.b. - Vous ouvrez votre premier bureau aux États-Unis, à San Francisco, et vous faites souvent la navette entre la Chine et la Californie. Vous sentez-vous avantagé ou désavantagé par rapport à un entrepreneur de Silicon Valley ?

j.w. - Mes ingénieurs coûtent moins cher, le bassin pour les recruter est plus grand et la plupart des manufacturiers se trouvent en Asie. Des désavantages ? Pour l'instant, je n'en ai pas trouvé. Bien sûr, le coût de la main-d'oeuvre augmente, mais la différence demeure suffisamment importante pour que les entreprises occidentales commencent à sous-traiter leur R-D en Chine.

d.b. - La Chine a-t-elle, comme l'Occident, le culte de l'entrepreneuriat ?

j.w. - De plus en plus. Lorsque j'étais adolescent et jeune adulte, personne ne songeait à devenir entrepreneur. On ne nous en parlait pas à l'école non plus. Depuis que j'ai obtenu mon diplôme, en 2005, mon université, la Shanghai Jiao Tong University, a ajouté un cours sur l'entrepreneuriat. L'engouement est né avec nos vedettes de la techno. La plus grande étant Jack Ma, fondateur d'Alibaba. Et Robin Li, de Baidu.

d.b. - Les Chinois admirent leurs entrepreneurs-vedettes. Mais le gouvernement joue-t-il son rôle pour soutenir l'entrepreneuriat ?

j.w. - Ce qui fait défaut, c'est le capital. Heureusement, la situation évolue rapidement. Il y a trois ans, lorsque j'ai lancé CooTek, la Chine comptait très peu de firmes de capital de risque. Aujourd'hui, on en trouve. Mais elles n'interviennent que pour le deuxième tour de financement. Au premier tour, il nous faut des anges financiers, et la Chine en compte très peu.

D.b. - Deux capital-risqueurs américains et un capital-risqueur européen ont investi dans votre entreprise. Comment avez-vous réussi ce bon coup ? Aviez-vous des contacts ?

j.w. - Aucun dans l'univers du capital de risque. Mon financement, je le dois au premier prix que j'ai décroché en 2010 dans un concours international pour les entreprises en démarrage. J'ai d'abord remporté le volet chinois, puis je suis allé aux États-Unis où j'ai gagné la finale. Parmi les juges se trouvaient de nombreux investisseurs. Certains d'entre eux ont exprimé leur désir d'investir dans notre entreprise.

D.b. - En trois ans, votre entreprise a remporté deux prix internationaux importants, l'un pour son plan d'affaires et l'autre pour son produit innovateur. Cette réussite vous étonne-t-elle ?

j.w. - Je me sens très privilégié, la plupart des entreprises en démarrage (start-ups) échouent. Elles tombent avant même d'avoir eu la chance de tenir sur leurs jambes. Malgré tout, les choses ne vont pas assez vite. Nous ne croissons pas assez rapidement. Internet mobile offre la plus grande occasion d'affaires de la décennie. Si nous ne profitons pas de cette vague, il sera très difficile d'en dénicher une autre aussi profitable.

d.b. - De quoi rêvez-vous pour votre entreprise ?

j.w. - Je caresse deux rêves, un petit et un grand. J'aimerais que tous les utilisateurs de plateformes mobiles utilisent les produits CooTek. Ça, c'est mon petit rêve. Mon grand rêve, c'est ce que je vais léguer comme entrepreneur. Je voudrais que mes innovations aient un effet important sur le monde, qu'elles contribuent à le transformer.

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