Propos diffamatoires: Le procès, une arme à double tranchant

Publié le 23/11/2013 à 00:00

Propos diffamatoires: Le procès, une arme à double tranchant

Publié le 23/11/2013 à 00:00

Photo : Bloomberg

En juillet dernier, un hôtel de la chaîne Jaro, de Québec, a intenté une poursuite contre un client qui a écrit sur le site Internet TripAdvisor qu'il y avait des punaises dans son lit. Peu importe comment se terminera cette affaire, elle amène la question de savoir à quel moment il est légitime pour une entreprise de poursuivre en justice une personne qui a publié un commentaire négatif sur elle.

Et cette question, nous l'avons posée à un expert, l'avocat Marc-André Coulombe, de Stikeman Elliott, qui a agi pour le célèbre golfeur américain Phil Mickelson dans une affaire de diffamation.

Il ne veut pas se prononcer sur la cause de l'hôtel Jaro, mais il se demande combien de consommateurs avaient lu le commentaire sur TripAdvisor par rapport au nombre de ceux qui en ont pris connaissance à la suite de la publication de la poursuite dans les journaux.

«Sur TripAdvisor, il y a des commentaires positifs et négatifs. Une fois qu'un problème est publié dans les journaux, ça lui donne une autre dimension, car il atteint une plus grande diffusion, estime M. Coulombe. Et comme les procédures risquent de s'échelonner sur plusieurs mois, l'affaire pourrait de nouveau attirer l'attention des médias, ce qui va rappeler ces allégations malheureuses au public.»

Une preuve difficileà faire

Une poursuite en diffamation est toujours complexe, souligne M. Coulombe, la grande difficulté étant de prouver le tort que vous avez subi. En l'occurrence, Jaro devra démontrer que des clients ont annulé leur réservation à cause de ce commentaire sur les punaises de lit (et non par la publication de sa poursuite dans les journaux).

L'avocat de la personne que vous poursuivez pourra aussi trouver des gens qui témoigneront que votre réputation n'était pas aussi bonne que vous le prétendez. Et tout ça, dans un débat public ! «Le procès peut se révéler plus dommageable que les propos diffamatoires.»

«Jaro ne veut certainement pas s'enrichir avec cette poursuite, elle veut simplement restaurer sa réputation, opine M. Coulombe. Mais on peut se demander si l'hôtelier ne se fera pas plus de tort à lui-même que ne l'a fait son client mécontent !» Voilà pourquoi les procès en diffamation sont très rares.

Toute vérité n'est pas bonne à dire

«Diffamer, c'est porter atteinte à la réputation et à l'honneur d'une personne ou d'une organisation en l'exposant à la haine, au ridicule ou au mépris», explique l'avocat Marc-André Coulombe, de Stikeman Elliott.

Prenons un exemple : l'absence d'un leader syndical aux assemblées choque un membre qui décide de se vider le coeur. S'il écrit sur un site Web que ce leader préfère fréquenter les bars plutôt que d'aller aux réunions et qu'il peut le prouver, on ne peut certainement pas parler de diffamation. S'il précise qu'il s'agit de bars gais, on entre dans une zone grise. Et s'il écrit que le leader syndical «préfère draguer dans les bars gais plutôt que d'aller aux réunions du syndicat», là, c'est carrément diffamatoire.

«Ce n'est pas parce que c'est vrai [qu'il est gai] que ce n'est pas diffamatoire, explique M. Coulombe. Malgré la liberté d'expression, il existe un principe qui veut que toute vérité ne soit pas bonne à dire.» En effet, dans ce cas-ci, l'orientation sexuelle du leader syndical n'a aucun lien avec ses fonctions, et l'exposer ainsi au grand jour relève de la diffamation.

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