Des conflits moins nombreux mais plus complexes

Publié le 07/12/2013 à 00:00

Des conflits moins nombreux mais plus complexes

Publié le 07/12/2013 à 00:00

Le climat de travail au Québec demeure paisible, et le nombre de conflits est au plus bas. Mais ceux qui éclatent sont souvent longs et complexes.

«Les relations de travail au Québec se sont beaucoup pacifiées depuis 30 ans», lance Michel Grant, professeur associé à l'École des sciences de la gestion de l'UQAM.

«C'est vrai que les relations de travail sont bonnes, mais les conflits qui apparaissent sont souvent difficiles à régler», nuance le président de la CSN, Jacques Létourneau.

Le bilan du ministère du Travail (MTQ) montre effectivement que, malgré la baisse du nombre de conflits, le nombre de jours- personnes perdus a augmenté au Québec, de 1991 à 2010.

«Les conflits touchent souvent à des questions cruciales, mettant en cause la survie même des emplois, comme le recours à la sous-traitance», explique Jacques Létourneau. Il cite la grève chez Mapei, qui dure depuis mai 2012, ou le lock-out chez Kronos, décrété en juin 2013 et réglé en novembre dernier.

Du neuf du côté du fédéral

Les règles entourant les relations de travail ont relativement peu évolué ces dernières années. Mais cela pourrait changer. «Deux projets de loi du gouvernement fédéral risquent de bouleverser les syndicats des entreprises de juridiction fédérale, comme les banques ou les télécommunications», note Chantal Lamarche, associée chez Heenan Blaikie.

Le projet de loi C-525, s'il est adopté, obligerait les syndicats à tenir un vote secret lors d'une demande d'accréditation. Présentement, cette procédure n'est nécessaire que si moins de 51 % des employés ont signé une carte de membre.

De son côté, le projet de loi C-377 visait à obliger les syndicats à dévoiler publiquement à quoi avaient servi leurs fonds, que ce soit pour les transactions ou les salaires des dirigeants syndicaux. Les sénateurs l'ont amendé de telle sorte que seules les transactions de plus de 150 000 $ feraient l'objet d'un dévoilement détaillé, et que les salaires ne seraient divulgués que s'ils dépassaient 444 661 $ (comme pour les sociétés d'État).

Toujours du côté fédéral, Michel Grant note que les conservateurs interprètent très largement la notion de «service essentiel» et interviennent rapidement dans des conflits comme ceux d'Aveos ou d'Air Canada. «Tout ce qui a un impact sur l'économie semble être reconnu comme un service essentiel, note-t-il. Une telle vision tend, dans les faits, à vider le droit de grève de sa substance et à faire pencher le rapport de force en faveur des patrons.»

Les travailleurs de remplacement

Ni les patrons ni les syndicats ne militent activement pour une réouverture du Code du travail au Québec. Pourtant, Guy-François Lamy, directeur, affaires juridiques au Conseil du patronat (CPQ), admet que le Code, après 50 ans d'existence, «reflète une vision un peu dépassée des relations de travail».

Il donne en exemple les dispositions contre les briseurs de grève, qu'il aimerait bien voir modifiées. «Cette loi a été adoptée dans la foulée de conflits très durs, dit-il. Son objectif était de prévenir les violences sur les lignes de piquetage. Mais le climat a changé, les conflits ne sont plus comme ça. La grève ne devrait pas nécessairement pouvoir s'étendre à l'ensemble d'une entreprise.»

Ces propos font grincer des dents le président de la FTQ, Daniel Boyer. «C'est grâce à cette loi que les conflits sont moins violents, dit-il. Si les patrons ont recours aux travailleurs de remplacement, la tension va grimper de nouveau.»

Les syndicats seraient plutôt en faveur d'une modernisation de cette loi pour refléter le fait que des travailleurs de remplacement peuvent agir sans se rendre physiquement sur les lieux de travail, comme l'ont démontré les conflits au Journal de Québec et au Journal de Montréal.

Pour l'instant, la paix tient le coup. Mais, comme toujours, le feu couve sous la braise...

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