Zeffy, cofondée par François de Kerret et Thibault Jaurou, est une plate-forme de collecte de dons qui ne coûte rien aux organisations qui l’utilisent. (Photo: courtoisie)
ENTREPRENEURIAT. Donner est probablement un des actes les plus nobles qui soient. La start-up montréalaise Zeffy a trouvé un moyen ingénieux de puiser dans cette vertu pour aider au maximum les organismes sans but lucratif (OSBL) tout en étant en mesure de prospérer.
Elle propose donc une plateforme de collecte de dons qui ne coûte rien à ces organisations. Par conséquent, toutes les sommes versées par un donateur reviennent à l’OSBL de son cœur.
« L’important pour un OSBL, c’est que tout l’argent récolté puisse aller à sa mission, explique le cofondateur et PDG de Zeffy, François de Kerret. Elle veut montrer à ses donateurs qu’elle a le plus d’impact possible et que les fonds vont au bon endroit. »
Alors comment la jeune pousse réussit-elle à survivre avec ce modèle unique ? La réponse : en sollicitant un don de ceux qui contribuent.
« On fonctionne comme Wikipédia, précise l’ingénieur de formation. On mise sur la générosité de ceux qui utilisent nos services pour nous offrir sans aucune obligation une petite somme. C’est un modèle profitable pour nous, qui est aussi accessible et sans frais pour les organismes. »
Ce pari ambitieux connaît du succès. Zeffy a déjà traité 500 millions de dollars en don vers des OSBL et elle devrait atteindre la barre du milliard de dollars dans six mois.
« On aide 20 000 organismes et on vise 100 000 organismes d’ici la fin de 2025, note le Français d’origine. Juste l’an prochain, plus d’un milliard de dollars devraient transiter par notre plateforme. »
Viralité surprenante
La start-up s’appelait Simplyk avant de changer de nom en 2022 lors de son expansion aux États-Unis. Cette nouvelle formulation est plus neutre pour cette clientèle anglophone, selon son fondateur qui souligne également que l’ancienne dénomination était collée au premier modèle d’affaires de l’entreprise.
« Quand je suis arrivé au Québec en 2016, je voulais faire du bénévolat, mais cela m’a pris trois semaines avant de trouver une organisation, explique François de Kerret. C’était beaucoup trop long pour quelqu’un de ma génération qui est impatiente. Donc Simplyk a été fondée pour aider des citoyens à s’impliquer dans des OSBL, pour mettre en relation ces organisations et des bénévoles. Cela a très bien fonctionné, mais on s’est rendu compte qu’on pouvait encore mieux soutenir les OSBL. »
Son intuition était la bonne, car sa nouvelle plateforme a connu du succès après son lancement à la fin de 2018. « On grandissait très doucement, mais quand on a lancé ce volet de dons en ligne sans frais, on a vu la croissance exponentielle se mettre en marche, explique celui qui a étudié à Polytechnique Montréal. C’était une viralité qui était absolument extraordinaire. »
Depuis que l’outil a été lancé, le nombre de dons et de montants a quasiment triplé tous les ans, ajoute-t-il. « C’est le bouche-à-oreille qui a fait la différence. »
La peur de perdre de l’argent a vite disparu, car à la base, les fondateurs ignoraient si les contributions volontaires allaient être suffisantes pour couvrir leurs dépenses.
« Cela nous coûtait quand même très cher au début, dit-il. On payait plus que 3 % sur chaque transaction. Donc, le pari, c’était que les donateurs ajoutent plus que 3 %. Sinon, on allait faire faillite rapidement. Ce qui est extraordinaire, c’est qu’on a constaté que presque trois donateurs sur quatre offraient une contribution pour Zeffy. »
La banque des OSBL
Rentable, Zeffy a maintenant les ressources pour en faire encore plus pour les OSBL. Que ce soit pour une association de riverains qui veut protéger un lac, un refuge pour animaux ou un club communautaire de danse pour enfants, la jeune pousse souhaite leur offrir des conseils.
« On espère devenir un genre de porte-voix pour ces organisations, précise-t-il. Donc, outiller des gens à créer des OSBL et à bien les administrer. Notre objectif à long terme, c’est de soutenir des millions d’organismes pour qu’ils aient davantage d’impact. »
Son autre grand projet est de se transformer en banque des OSBL. Il souligne que ces dernières font affaire avec des institutions financières qui leur facturent des frais parfois trop élevés et qui ne sont souvent pas guidées par la même éthique dans la gestion de fonds, par exemple en appuyant des industries fossiles.
« En plus, cela va répondre aux besoins d’efficacité des OSBL, parce que si l’endroit où on collecte des dons et où on le dépense est le même, c’est génial pour la transparence, les rapports aux donateurs, la communication et pouvoir vraiment prouver que l’argent a été bien utilisé », soutient François de Kerret.
Puisqu’il estime qu’il y a environ 500 000 organisations au Canada et aux États-Unis qui pourraient avoir recours au service de son entreprise, Zeffy se concentrera uniquement sur ces deux marchés. Un choix également plus simple afin de respecter les différentes lois et lutter contre la fraude.