Après un an, la guerre en Ukraine n'a pas bouleversé le marché canadien du pétrole

Publié le 24/02/2023 à 18:17

Après un an, la guerre en Ukraine n'a pas bouleversé le marché canadien du pétrole

Publié le 24/02/2023 à 18:17

Par La Presse Canadienne

L’Alberta a établi un record annuel de production de pétrole et de gaz naturel, à 3,73 millions de barils par jour, selon ATB Financial. (Photo: 123RF)

Calgary — Lorsque les chars et les soldats russes sont arrivés en Ukraine il y a un an, personne n’a été surpris de voir le cours du pétrole brut franchir le cap des 100$ US le baril pour la première fois depuis 2014.

La Russie contrôlant 10% de l’approvisionnement mondial en pétrole brut, de nombreux observateurs ont prédit, au début du conflit, que la guerre et les sanctions occidentales contre la Russie pourraient perturber les marchés de l’énergie pour les années à venir.

Il est donc étonnant, 12 mois plus tard, au premier anniversaire de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, que les prix du pétrole oscillent de nouveau autour de la barre des 75$ US le baril, très près d’où ils se trouvaient juste avant le début de l’opération militaire du président russe Vladimir Poutine.

«Le consensus en mars et avril était que la production russe ralentirait de trois millions de barils par jour, et c’est la principale chose qui a été renversée», a observé Rory Johnston, analyste énergétique établi à Toronto et fondateur du Commodity Context Newspaper.

«Au lieu de cela, nous avons eu une perte initiale d’un million de barils par jour de la production russe, puis elle a rebondi.»

Malgré les sanctions occidentales, couper le monde du pétrole russe ne s’est pas révélé facile. L’approvisionnement mondial était limité avant l’invasion, et la Russie a trouvé des marchés alternatifs — dont la Chine, la Turquie et l’Inde — pour ses produits énergétiques.

On ne sait pas, un an après le début du conflit, si la Russie sera en mesure de maintenir ses niveaux de production actuels, d’autant plus que la demande chinoise rebondit après l’assouplissement des restrictions liées à la COVID-19. Mais pour l’instant, le marché mondial du pétrole est relativement équilibré et les prix records de l’or noir observés au premier semestre de 2022 ne se sont pas maintenus.

Cela signifie que la guerre en Ukraine n’a pas changé la donne pour le secteur pétrolier et gazier canadien. Alors que le pays a augmenté sa production l’année dernière — l’Alberta a établi un record annuel de production de pétrole et de gaz naturel, à 3,73 millions de barils par jour, selon ATB Financial — une grande partie de cette augmentation de la production était progressive et était déjà planifiée par les entreprises avant l’invasion de Poutine.

«Le Canada, à mon avis, n’a rien fait que nous n’allions pas faire de toute façon», a souligné Richard Masson, chercheur principal de l’école de politique publique de l’Université de Calgary.

«Donc je ne voudrais pas que nous nous sentions trop bien pour avoir aidé le monde dans cette année, parce que je ne pense pas que nous l’ayons fait.»

Peu d’investissements des producteurs

Les sociétés pétrolières et gazières canadiennes ont profité des prix élevés des produits de base plus tôt cette année, affichant dans de nombreux cas des bénéfices records. Mais une grande partie de ces bénéfices a été consacrée au remboursement de la dette et à la récompense des actionnaires plutôt qu’à l’expansion ou à l’annonce de nouveaux projets.

Selon M. Masson, cette situation, qui survient malgré toutes les discussions sur la sécurité énergétique mondiale, s’explique par le fait que le secteur canadien du pétrole et du gaz naturel est toujours paralysé par un manque d’infrastructures d’exportation.

L’agrandissement de la canalisation Trans Mountain, qui apportera une capacité d’exportation de pétrole indispensable, ne sera terminé que plus tard cette année, et LNG Canada — le premier terminal d’exportation de gaz naturel liquéfié du pays — ne sera pas opérationnel avant 2025 environ.

L’analyste Dulles Wang, de la firme Wood Mackenzie à Calgary, a souligné que même si la guerre avait mis au premier plan les problèmes de sécurité et de fiabilité énergétiques, ce sont les États-Unis, et non le Canada, qui en ont profité. Grâce à leurs nombreux terminaux d’exportation en activité, ils ont pu exporter plus de gaz naturel liquéfié que tout autre pays au monde.

«L’élan des contrats de gaz naturel liquéfié aux États-Unis est probablement le meilleur indicateur de l’importance accordée l’an dernier à la fiabilité énergétique», a estimé M. Wang.

«Les États-Unis en ont certainement beaucoup profité.»

En fin de compte, a noté M. Masson, la guerre en Ukraine n’a pas changé le fait qu’il existe un conflit inhérent entre la demande mondiale d’augmentation de la production de pétrole et les engagements climatiques du Canada. Cela crée une incertitude en matière d’investissement et rend les entreprises réticentes à augmenter considérablement leurs dépenses en immobilisations.

«Nous voulons passer à zéro émission nette et à l’énergie verte et toutes ces choses. Eh bien, si nous avançons au rythme préconisé par plusieurs personnes, cela envoie un message aux entreprises: “ne dépensez pas beaucoup d’argent sur de nouveaux projets”», a estimé M. Masson.

«À mon avis, nous sous-investissons dans l’approvisionnement énergétique dont le monde a besoin, mais il n’y a rien pour convaincre les entreprises de le faire.»

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