Eric Girard a indiqué que la dette nette du Québec sera majorée de 12 milliards $, à la demande de la vérificatrice générale. (Photo: Jacques Boissinot pour La Presse canadienne)
Le ministre des Finances, Eric Girard, déposera le budget du Québec 2021-2022 le jeudi 25 mars, un budget écrit à l’encre rouge.
L’annonce a été faite mardi matin à l’Assemblée nationale par le ministre Girard en point de presse. Ce sera son troisième budget, un exercice financier dédié à relancer l’économie, malmenée depuis un an par la crise sanitaire.
Malgré des finances publiques en mauvais état, les entreprises peuvent certainement s’attendre à recevoir un coup de pouce additionnel de l’État pour traverser la crise, récupérer les emplois perdus et en créer de nouveaux dans des secteurs d’avenir.
Chose certaine, M. Girard a promis de donner l’heure juste à la population, à cette occasion, sur l’état de santé financière du Québec, « en toute transparence ».
On sait déjà que la dette nette du Québec, qui atteint 189 milliards $, va s’alourdir de 12,4 milliards $ supplémentaires. Le ministre des Finances a indiqué mardi que le Québec allait se conformer à la recommandation en ce sens formulée par la vérificatrice générale, Guylaine Leclerc. Elle a jugé que le Québec devait revoir ses normes comptables reliées au calcul des paiements de transfert fédéraux.
À ce propos, le ministre Girard a tenté de se faire rassurant, en affirmant que cette modification comptable n’aurait aucun impact sur la dette brute du gouvernement, ni sur sa capacité d’emprunter, et ne devrait pas influencer non plus le jugement porté sur le Québec par les agences de notation de crédit, selon lui.
Dans sa mise à jour économique de novembre dernier, on apprenait que le Québec devrait composer avec des déficits totalisant 30 milliards $ de 2020 à 2023.
Alors qu’à son arrivée au pouvoir le gouvernement caquiste nageait dans les surplus, on anticipait en novembre un déficit de l’ordre de 15 milliards $ en 2020−2021, suivi d’un déficit de 8 milliards $ en 2021−2022, puis d’un autre de 7 milliards $ en 2022−2023.
Le 25 mars, il devrait faire le point sur son plan de retour à l’équilibre budgétaire. Pour se conformer à la loi, le Québec doit afficher un déficit zéro en 2025−2026. On maintiendra par ailleurs les contributions obligatoires au Fonds des générations.
En dépit de ce gouffre financier et des ratés dans la colonne des revenus, le gouvernement Legault s’est engagé à maintes reprises à ne pas alourdir le fardeau fiscal des contribuables, donc à s’abstenir de hausser les taxes et les impôts, tout en maintenant à son niveau actuel le panier de services publics. L’avenir dira s’il réussira à tenir promesse dans un contexte financier aussi fragile.
En ces temps difficiles, il n’est pas question pour autant de réduire les dépenses de l’État, a dit le ministre des Finances, à la fois pour maintenir les services à la population, mais surtout pour stimuler l’économie. Après un an de pandémie, il faut s’attendre une fois de plus à ce que le ministère de la Santé, qui accapare déjà près de la moitié du budget de l’État, gruge la part du lion.
« À très court terme, il n’est pas question de réduire les dépenses. On est en pandémie. On fait des efforts colossaux au niveau de la santé et on va continuer », a-t-il promis, conscient que les besoins ne cessent de croître.
Le cadre financier présenté par le ministre des Finances s’étendra sur cinq ans.
Exceptionnellement, en raison du respect des mesures sanitaires, seuls les journalistes de la tribune de la presse pourront assister au huis clos du budget. Normalement, quelques centaines de personnes (experts, porte-parole des différents lobbys, membres des médias et de la classe politique) s’agglutinent au Centre des congrès de Québec pour éplucher et analyser le budget de 9 h à 16 h, soit jusqu’au moment de la présentation en Chambre.
Un budget féministe?
Au lendemain de la Journée internationale des femmes, les partis d’opposition ont réagi en mettant l’accent sur la nécessité d’avoir une préoccupation particulière pour les femmes, alors que les études démontrent qu’elles ont été davantage affectées par la pandémie que les hommes, notamment quant aux pertes d’emplois.
La députée solidaire de Sherbrooke, Christine Labrie, a réclamé que les femmes soient au cœur du plan de relance du gouvernement avec « des investissements massifs » qui leur seraient destinés dans le prochain budget, notamment dans le réseau des maisons d’hébergement pour femmes victimes de violence conjugale.
La veille, la ministre responsable de la Condition féminine, Isabelle Charest, avait annoncé un plan d’action visant à contrer les effets négatifs de la pandémie sur les femmes. Mme Labrie s’est montrée « profondément insultée » par ce document ne contenant que des « grenailles » pour les femmes en difficulté.
La cheffe de l’opposition officielle, Dominique Anglade, a renchéri pour dire avoir l’impression que ce document avait été écrit « sur le coin d’une table ».
« Tous les milieux s’entendent pour dire que la sortie de crise va être longue et qu’il faudra plusieurs années pour s’en sortir. Et avec ce qui a été présenté, je pense que c’est une vision bien limitée de la question de la place des femmes dans la relance post-COVID », a-t-elle fait valoir, réclamant à son tour un budget et une relance qui soient inclusifs pour les femmes.
La députée péquiste de Gaspé, Méganne Perry-Mélançon, a réclamé elle aussi beaucoup plus d’argent pour les femmes dans le besoin dans le budget du 25 mars. Le ministre des Finances doit relancer l’économie « en ayant en tête l’aspect féministe », a-t-elle dit, en fixant à 70 millions $ les sommes additionnelles requises uniquement pour répondre aux besoins de consolidation du réseau des maisons d’hébergement pour femmes victimes de violence.
Au cours des prochains jours, les partis d’opposition auront l’occasion de formuler leurs attentes budgétaires, sur un plan plus général.