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Le G15+ lance un outil pour mesurer le bien-être du Québec

Catherine Charron|Publié le 18 janvier 2022

Le G15+ lance un outil pour mesurer le bien-être du Québec

Le temps où seuls le PIB et le niveau d'emploi dictaient les décisions des gouvernements est révolue selon le G15+. (Photo: 123RF)

Le bien-être des Québécois ne se mesure plus qu’en gardant sur son radar la progression du produit intérieur brut (PIB) et la création d’emplois, et le G15+ a pris les grands moyens pour brosser un portrait plus exhaustif de la situation.

Mardi, le regroupement a lancé une plateforme qui rassemble 51 indices économiques, sociétaux et environnementaux qui seront mis à jour annuellement afin d’aiguiller les gouvernements — fédéral, provincial ou même municipal — pour façonner la société de demain, comme en Italie et en Nouvelle-Zélande.

Cette initiative, d’abord portée par la directrice générale de l’Institut du Québec (IDQ), Mia Homsy, est le fruit du travail des 15 leaders économiques, syndicaux, sociaux et environnementaux et de leurs partenaires qui, depuis juin 2021, s’affairent à identifier quels sont les facteurs qui permettent le mieux d’observer l’évolution de la situation au Québec.

«Ça fait longtemps que je voulais faire ce projet avec l’IDQ, […] j’aurais pu choisir les indicateurs à partir de ma revue de la littérature, mais la richesse [de cette co-construction], c’est les discussions qui ont suivi», raconte-t-elle en marge du lancement.

L’enjeu était de taille: trouver un consensus entre des organisations qui n’ont pas toujours les mêmes priorités. «Ce n’est pas une surprise pour personne», souligne Denis Bolduc, secrétaire général de la FTQ, d’où l’intérêt de ce travail colossal. «Si les gouvernements les suivent, ils [sauront] que pas mal toutes les sphères risquent d’être satisfaites des politiques, si elles améliorent les objectifs sur la table.»

«Ce n’est pas un bulletin du gouvernement, précise le président et chef de la direction du Conseil du patronat du Québec, Karl Blackburn. C’est une mobilisation générale qui nous amène à proposer des pistes de solution intéressantes, qui vont nous permettre d’avoir une croissance comme société et de tendre vers ce qu’on souhaite en tant qu’organisation. Et ce en toute transparence».

Même le secteur privé pourra se fier de ce «tableau de bord» du bien-être du Québec pour contribuer à celui de leurs employés. Si déjà, de nombreuses entreprises ont entamé une transition en ce sens, et ce avant le début de la pandémie, observe Karl Blackburn, «un pas de géant» a depuis été franchi.

«Mais il faut manger la salade que l’on sert, souligne Denis Bolduc. Si on dit au décideur que ces données sont suffisamment importantes pour élaborer des politiques, il faut que ça serve aussi à ce qu’on fait d’un point de vue syndical. […] Il n’y a plus de raison pour qu’il y ait un écart de rémunération entre les hommes et les femmes pour un même travail».

 

 

Des données manquantes

Pour qu’il soit retenu, chaque indicateur devait répondre à trois critères: se baser sur des données fiables, être mis à jour régulièrement, et permettre de se comparer. Toutefois, force est de constater que pas moins de 17 des 51 indices ne sont pas chiffrés.

«Pour plusieurs organisations, le fait de ne pas mentionner ces données-là, ça aurait été de présenter un rapport incomplet. On est mieux de les nommer, c’est la meilleure façon de changer les choses, car peut-être que d’autres vont commencer à les mesurer. C’est un équilibre entre l’exhaustivité des indicateurs, et la qualité des données», explique Mia Homsy, qui compare ce travail à un avion que l’on construit en plein vol.

Si les informations concernant 2020 et 2021 sont manquantes, c’est principalement parce que le G15+ désirait jauger l’évolution sur une période de cinq ans de ses indicateurs, comme les émissions de gaz à effets de serre, ou l’utilisation de l’eau potable par exemple. En d’autres termes, l’organisation souhaite départager les bris de tendances conjoncturels, et identifier les changements structurels engendrés par la crise sanitaire.

«On en a discuté longuement, car ça donnait vraiment deux portraits différents. […] C’est sûr qu’on va continuer de les documenter pour capter l’impact de la pandémie. […] On l’a vu avec le marché du travail qui a été très résilient», explique la directrice générale de l’IDQ, qui souligne aussi un décalage entre le moment de référencement et de publication de certains renseignements.

Bien qu’il ne soit «pas parfait», n’en demeure pas moins qu’il permet d’apporter de nombreuses nuances là où les indicateurs actuellement utilisés laissent des zones d’ombres. «Si le PIB est une donnée qui est aujourd’hui facile pour se comparer, elle ne montre pas tout ce qu’il y a derrière, comme l’état des répartitions de la richesse dans ta société. On n’a aucune idée sur la mobilité sociale et les inégalités. Ça donne un portrait tellement réducteur».