«Le premier ministre du Québec et ses missions de différents niveaux sont toujours les bienvenus en Chine pour approfondir les échanges et la coopération entre les deux parties. Le Consulat général est prêt à fournir de l’aide effective», a déclaré le consul général Yuming Dai (Photo: 123RF)
Le premier ministre François Legault est toujours bienvenu en Chine, a fait savoir le consul général de la République populaire de Chine à Montréal.
Le chef du gouvernement du Québec, qui a autrefois critiqué durement ce partenaire économique, est ainsi invité à renouer avec la tradition instaurée par ses prédécesseurs depuis René Lévesque.
La superpuissance asiatique est le deuxième partenaire commercial du Québec, a rappelé le consul, mais les relations du Canada avec Pékin s’étaient refroidies au cours des dernières années, notamment en raison de l’affaire Meng Wanzhou.
La ministre des Relations internationales, Martine Biron, avait évoqué à pareille date l’an dernier la fermeture de représentations du Québec en Chine parmi les quatre existantes, tout en restant soucieuse des conséquences sur les relations diplomatiques. En 2022, François Legault avait pour sa part accusé à mots couverts la Chine de concurrence déloyale.
Le gouvernement chinois appelle maintenant à un réchauffement.
«La porte de la Chine demeure toujours ouverte», a déclaré le consul général Yuming Dai dans une entrevue avec La Presse Canadienne.
«Le premier ministre du Québec et ses missions de différents niveaux sont toujours les bienvenus en Chine pour approfondir les échanges et la coopération entre les deux parties. Le consulat général est prêt à fournir de l’aide effective.»
Yuming Dai souligne néanmoins que les tensions sont toujours présentes.
«La situation difficile actuelle où se situent les relations sino−canadiennes n’est pas celle que souhaite la Chine», a-t-il pris la peine d’indiquer, tout en appelant à «se respecter mutuellement» et à «reconstruire la confiance».
«Contexte changeant»
Dans une allocution récente à Montréal, Martine Biron a évoqué un «contexte géopolitique changeant en Indo−Pacifique».
«La pandémie et les tensions entre le Canada et la Chine ont ralenti nos échanges ces dernières années», a expliqué le ministère, appelé à préciser à quoi la ministre faisait référence exactement.
«Mais les choses se replacent», poursuit−on dans un courriel transmis à La Presse Canadienne.
Le consul de Chine à Montréal a mis l’accent sur «d’importants intérêts communs» entre son pays et le Québec, en évoquant notamment «la promotion de l’ouverture et de l’inclusivité, le multilatéralisme, le libre−échange, le développement vert, la lutte contre le changement climatique, la conservation de la diversité biologique, etc.».
Concernant la filière batterie et les minéraux critiques dont le Québec dispose et qui font l’objet de convoitise, le consul de Chine a mentionné que son pays développe aussi son industrie de batteries «dont la chaîne industrielle est la plus complète du monde» et que l’État chinois «entend travailler ensemble avec toutes les parties prenantes, y compris le Québec, pour faire avancer le développement vert, bas carbone, durable dans le monde entier».
Le Québec pourrait en outre tirer de nombreux avantages de la croissance de la classe moyenne en Chine, selon lui.
«La demande du marché chinois sera ainsi très forte dans les domaines de l’éducation, de la santé, de la culture, du divertissement», a évoqué Yuming Dai.
Le Québec a néanmoins choisi de diversifier ses entrées dans le marché de l’Indo−Pacifique, le «nouveau centre géopolitique et économique de la planète», soutient le ministère des Relations internationales.
C’est ainsi que Mme Biron a annoncé que les bureaux du Québec à Séoul et à Singapour allaient passer au statut de délégations, donc avec des moyens plus imposants.
La balance commerciale entre le Québec et la Chine est encore immensément favorable à cette dernière, mais l’écart s’est légèrement rétréci au cours des années récentes.
Les exportations du Québec en Chine sont passées de 3,5 milliards de dollars (G$) en 2022 à 4,2 G$ en 2023, une augmentation de 20%, selon l’Institut de la statistique du Québec.
En revanche, les importations chinoises au Québec sont passées de 15,7 G$ en 2022 à 13,4 G$ en 2023, une baisse de 14,8%.
Les relations du Canada avec la Chine ont commencé à se détériorer sérieusement à partir de l’arrestation de Meng Wanzhou, une haute dirigeante de Huawei, à Vancouver en décembre 2018. La Chine a par la suite arrêté deux Canadiens sur son territoire, Michael Kovrig et Michael Spavor, qui ont été détenus jusqu’à la libération de Meng Wanzhou en septembre 2021.
Le gouvernement fédéral de Justin Trudeau avait amorcé en automne 2022 un «découplage» avec la Chine, qu’il qualifie de «puissance perturbatrice», visant à se défaire de la dépendance commerciale envers Pékin.
En novembre 2022, François Legault avait laissé entendre que «tous les pays industrialisés (ont) des préoccupations avec la Chine».
En 2021, il avait affirmé qu’«il faut se poser des questions sur nos relations commerciales avec la Chine, si elle ne se donne pas des normes environnementales semblables aux autres».
Dans cette entrevue à la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques à Glasgow, le premier ministre avait lancé un avertissement: «Il va falloir se poser des questions sur nos échanges commerciaux avec la Chine. La Chine ne compétitionne pas à armes égales avec l’Amérique du Nord.»
Depuis René Lévesque en 1984, les premiers ministres du Québec ont effectué régulièrement des missions en Chine. Le dernier à avoir perpétué cette tradition est Philippe Couillard, en 2014 et 2018. Le Québec est en outre jumelé à un partenaire, l’État du Shandong.
Le Québec a quatre représentations en Chine: à Pékin, Shanghai, Quingdao et Shenzhen.
Patrice Bergeron, La Presse Canadienne