De multiples subventions «hors normes» de l’Économie dénoncées
La Presse Canadienne|Publié le 20 novembre 2019Malgré un manque de justification, le gouvernement « a décidé d’aller de l’avant » quand même dénonce la vérificatrice.
Le ministère de l’Économie a accordé plusieurs centaines de millions de dollars de subventions hors programmes aux entreprises, souvent sans aucune justification, à l’époque où il était dirigé par la libérale Dominique Anglade, constate la vérificatrice générale.
Dans son rapport annuel 2019-2020, déposé mercredi à l’Assemblée nationale, Guylaine Leclerc note que ce ministère a géré de façon « déficiente » ses subventions, souvent accordées sans justification ni recommandation des autorités compétentes.
Quand on dit « hors normes », on veut dire par décret, donc par décision politique, au lieu de s’appuyer sur les directives administratives.
Pour ce qui est des subventions jugées « hors programmes », on est passé d’un total de 42 millions $, en 2014, à 592 millions $, l’année dernière.
Du total, « sur la base d’analyses incomplètes et d’une documentation insuffisante », de 2016-2017 à 2018-2019, le ministère a accordé 262,7 millions $ en subventions hors programmes, écrit la vérificatrice, constatant la « croissance vraiment très, très importante, depuis un certain nombre d’années, entre les subventions normées et les subventions hors normes ».
Malgré un manque de justification, le gouvernement « a décidé d’aller de l’avant » quand même, une situation « préoccupante », a commenté la vérificatrice, en conférence de presse, déplorant par ailleurs ne pas avoir eu accès à toute l’information pertinente de la part du gouvernement, compte tenu « des sommes aussi importantes » qui étaient en jeu.
« On n’a pas eu accès à toute l’information que nous aurions souhaité avoir » du gouvernement, a-t-elle déploré.
Elle constate aussi dans son rapport qu’en fin d’année financière 2016-2017 et 2017-2018, le ministère a devancé le versement de 335,7 millions $ en subventions, pour des projets « qui n’étaient pas ficelés », ce qui a contribué « à diminuer le surplus annuel du gouvernement ».
« Ce qui est problématique, particulièrement problématique, c’est de mettre à risque cet argent-là », car on ne sait pas à l’avance si « l’entreprise va en avoir encore besoin dans quelques années ».
En point de presse, la députée libérale et ex-ministre de l’Économie, Dominique Anglade, a défendu sa gestion du ministère de janvier 2016 à octobre 2018, en faisant valoir qu’elle avait voulu donner une impulsion au développement des secteurs de l’innovation, de la haute technologie et de l’intelligence artificielle. Elle a noté que sous son règne la santé de l’économie s’était améliorée, de même que le taux de productivité.
Par ailleurs, la vérificatrice générale a découvert des failles inquiétantes dans la gestion d’un chantier de 1 milliard $ visant à brancher à internet 340 000 foyers. Certains projets liés à ce chantier qui avaient eu une bonne note ont été mis de côté, tandis que d’autres, avec une moins bonne note, ont été retenus. Mme Leclerc déplore le manque de « planification d’ensemble » dans ce dossier coûteux.
Les partis d’opposition ont aussitôt dénoncé le manque de transparence du gouvernement, qui n’a pas toujours collaboré avec le bureau du Vérificateur général pour lui transmettre les documents réclamés.
« C’est inquiétant d’apprendre que le ministère du Conseil exécutif, celui du premier ministre, ainsi que le Secrétariat du Conseil du trésor ont bloqué l’accès à ces documents », a commenté le porte-parole péquiste, le député Sylvain Gaudreault.
Le porte-parole solidaire, le député Vincent Marissal, a noté que lorsqu’elle était dans l’opposition, « la CAQ a déchiré un nombre incalculable de chemises au sujet de la transparence ».
« C’est une voie dangereuse quand les gouvernements commencent à filtrer les informations de façon aussi arbitraire », a-t-il ajouté, rappelant que la vérificatrice générale était « le chien de garde du gouvernement ».