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Climat: près de 500 000 manifestants dans les rues de Montréal

LesAffaires.com et AFP|Publié le 27 septembre 2019

La jeune militante écologiste Greta Thunberg s’est adressée pour la première fois au public montréalais.

Près de 500 000 personnes ont défilé vendredi à Montréal avec la militante suédoise Greta Thunberg dans le cadre d’une nouvelle « grève mondiale pour le climat », ont annoncé les organisateurs de la manifestation.

« Non seulement on est la plus grosse manifestation de l’histoire du Québec, mais on est la plus grosse manifestation de la semaine dans le monde », a annoncé à la foule François Geoffroy, du collectif La Planète s’invite au Parlement. La police n’a pas donné de chiffre officiel.

« On est au moins 500 000 », s’est félicitée la jeune Suédoise en s’adressant à la foule. « Vous pouvez être fiers de vous ! ».

La jeune femme a estimé que « plusieurs millions » de personnes ont manifesté partout dans le monde vendredi. « Nous continuerons à le faire jusqu’à ce qu’ils nous écoutent », a-t-elle prévenu sous les ovations.

Greta Thunberg a estimé que la mobilisation de vendredi dernier, lors de la précédente « grève pour le climat », avait réuni « plus de 6,6 millions de personnes » dans le monde, selon les derniers chiffres disponibles. Les organisateurs parlaient jusqu’à présent de plus de quatre millions de personnes pour ce « Friday for future ».

Des manifestants de tous les âges

Quelques centaines de milliers de personnes ont défilé dans les rues du centre-ville de Montréal vendredi après-midi pour réclamer des actions concrètes afin de lutter contre les changements climatiques.

La foule était si dense que le passage du cortège a nécessité au moins deux heures et demie à l’intersection de la rue Sherbrooke et du boulevard Saint-Laurent.

Les manifestants se sont rassemblés vers midi sur l’avenue du Parc, au pied du mont Royal. Jeunes et moins jeunes brandissaient des pancartes, souvent confectionnées à partir de boîtes en carton, sur lesquelles on pouvait notamment lire « Terriens en détresse », « Planète à vendre » et « Il est temps de se réveiller ».

On pouvait percevoir plusieurs familles dans la foule. Bon nombre d’élèves portaient leur uniforme scolaire, sur lequel ils avaient épinglé un cercle vert, symbole de cette mobilisation pour l’environnement. Des manifestants jouaient des percussions et divers instruments de musique. En tête du cortège, des manifestants portaient une large banderole colorée ornée de dessins de la planète, de fleurs et d’animaux sur laquelle on pouvait lire : « Au front pour la Terre Mère ».

Un optimisme inquiet perçait dans les propos de plusieurs manifestants. »Je veux que les choses changent, a expliqué Thani Ratelle, une élève âgée de 16 ans. Faut commencer par faire quelque chose. Puisque tout le monde se réunit, ça va finir par changer les choses. »

Pour plusieurs participants, il était important d’être là. « C’est quand même notre futur, a dit une autre élève de 16 ans, Taicha-Cloé Théodore. S’il y a un réchauffement climatique, c’est sûr que nos enfants vont vivre dans un monde pourri. Et ça, ce n’est pas l’fun. »

Plusieurs chefs politiques fédéraux et provinciaux ont été vus dans la manifestation, dont Justin Trudeau, Yves-François Blanchet et Manon Massé.

M. Trudeau s’est fait apostropher par des manifestants qui lui reprochaient l’achat par son gouvernement de l’oléoduc TransMountain. « Pas de pipelines! », lui a-t-on crié. Le chef libéral s’est contenté de les remercier de leur présence.

La foule et M. Trudeau ont ensuite scandé « On avance pour la planète » en claquant des mains.

La présence de M. Trudeau n’a pas été appréciée par tous les manifestants. Des agents de sécurité ont même dû intervenir pour empêcher un individu de lui lancer des œufs.

Des journalistes de La Presse canadienne sur le terrain ont constaté un important déploiement policier : plusieurs agents étaient visibles, mais plusieurs autres se tenaient aussi discrètement en réserve sur les rues avoisinantes.

Thunberg l’invitée vedette

La jeune militante écologiste suédoise Greta Thunberg s’est adressée à la foule à deux reprises : au début et à la fin de la manifestation. Après avoir souhaité un vaste mouvement de mobilisation pour accélérer la lutte contre les changements climatiques, elle a marché au deuxième rang en compagnie de jeunes des Premières Nations.

Elle portait une pancarte sur laquelle il était écrit en suédois « Skolstrejk fur klimatet » (grève scolaire pour le climat en suédois).

L’adolescente a prononcé un deuxième discours à la fin de la manifestation. Acclamée par la foule nombreuse et enthousiaste, elle a lancé, en parlant des centaines de milliers de manifestants : « Ça fait du bien n’est-ce pas? »

Elle a plus tard proclamé en français en guise d’avertissement aux élites mondiales : « Le changement arrive, si vous l’aimez ou pas ».

La militante écologiste a rappelé la déception qu’elle a éprouvée à la suite du sommet de l’ONU sur le climat qui s’est déroulé la semaine dernière. Les dirigeants mondiaux « nous ont déçus avec leurs phrases vides et leurs plans insuffisants ».

Elle a rappelé l’importance de s’unir parce que les « dirigeants ne nous écoutent pas ».

« Nous avons été des millions à faire la grève, nous allons poursuivre [la mobilisation] jusqu’à ce qu’ils finissent par nous écouter », a-t-elle soutenu.

Avant le début de la manifestation, elle a échangé quelques mots avec le célèbre écologiste David Suzuki, au pied du mont Royal.

La jeune Suédoise s’était auparavant entretenue avec Justin Trudeau. Elle a dit ne pas vouloir personnaliser le débat et souhaite que tous les décideurs sur la planète se rendent compte de l’urgence climatique et écoutent ce que dit la science.

Des milliers à Québec

À Québec, des milliers de manifestants ont formé un cortège sur les plaines d’Abraham, près du Musée national des beaux-arts, pour descendre la Grande Allée et se rendre devant le parlement. Les participants déambulaient avec entrain et dans la bonne humeur, en scandant des slogans.

« Il est important de sortir les rues, tous au même moment, pour que le gouvernement n’ait pas le choix d’agir face à cette quantité monstre de gens dans les rues pour une même cause, partout dans le monde », a lancé Juan Poirot, un élève du secondaire qui s’est adressée à la foule, composée en majorité de jeunes.

Plusieurs affiches interpellaient le premier ministre François Legault. Des porte-parole des manifestants ont tenu à réagir à une lettre ouverte de M. Legault publiée le jour même. Il dit avoir entendu le « cri du cœur » des jeunes et rappelle qu’il va présenter un plan d’action au début de l’an prochain.

« C’était très, très paternaliste, c’est bien beau de dire que les jeunes sont beaux à voir, maintenant il faut qu’il pose des gestes, le gouvernement Legault continue à être complètement incohérent », a déploré Alice-Anne Simard, directrice de l’organisme Eau Secours.

Elle a notamment évoqué deux projets qu’elle condamne, soit le « troisième lien » _ le nouveau tunnel routier entre Québec et Lévis _, ainsi que le projet d’une usine de liquéfaction de gaz naturel à Saguenay.

« Aujourd’hui, on marche pour que dans 100 ans d’autres puissent marcher sur une Terre qui n’est pas souillée, qui est traitée avec respect, on marche pour préserver la beauté du monde dans lequel on vit! » a déclaré Audrey Croteau, sous les applaudissements.

À Saguenay, les organisateurs de la marche ont fait état d’une mobilisation qui a dépassé leurs attentes. Adrien Guibert-Barthez, co-porte-parole de la Coalition Fjord, estime que plusieurs centaines de personnes se sont déplacées dans le cadre du mouvement mondial, mais aussi pour démontrer leur opposition au projet de GNL Québec, un enjeu bien régional.

Le projet, qui consiste en la construction d’un gazoduc de 750 km qui transporterait du gaz naturel de l’Ouest jusqu’à une usine de liquéfaction à Saguenay pour ensuite l’exporter par des navires, est soutenu par le gouvernement de François Legault.

« On ne pense pas qu’un ministre, un premier ministre ou n’importe quel élu _ qu’il soit provincial, fédéral ou municipal _ puisse appuyer un projet comme GNL et ensuite dire qu’on va réduire les gaz à effet de serre », a-t-il fait valoir en entrevue téléphonique avec La Presse canadienne.

Ailleurs au pays

Plus de 140 manifestations étaient en cours ailleurs au pays.

Dans le centre-ville d’Ottawa, la foule s’étirait sur plus d’une dizaine de quadrilatères.

À Toronto, le rassemblement a pris place devant le parlement ontarien. « Systems change, not climate change », scandaient les manifestants, pour réclamer des changements d’ordre systémique.

Plus tôt en journée, des milliers de Néo-Écossais s’étaient réunis devant les quartiers généraux de Nova Scotia Power, à Halifax. Julia Sampson, une des organisatrices de la marche, âgée de seulement 17 ans, a réclamé un rehaussement du financement provincial des énergies vertes et une plus grande sensibilisation aux changements climatiques à l’école.

À Saint-Jean de Terre-Neuve, une foule s’est massée devant la tour de l’horloge de l’Université Memorial. Bon nombre de manifestants ont dénoncé l’industrie pétrolière de la province.