Une loi du Congrès évite une grève du fret ferroviaire
La Presse Canadienne|Publié le 01 Décembre 2022Une grève du fret aurait amputé l’activité économique américaine de 2G$ US par jour, selon une estimation de l’Association américaine des chemins de fer. (Photo: 123RF)
Washington — Le Congrès américain a adopté jeudi une loi pour éviter une grève du fret ferroviaire potentiellement catastrophique pour l’économie américaine.
Le texte, voté dans l’après-midi au Sénat après un scrutin similaire à la Chambre des représentants mercredi, impose à la profession un accord de branche, en dépit du fait qu’il n’a pas été approuvé par tous les syndicats.
Le président Joe Biden a indiqué qu’il l’entérinerait dès qu’il serait transmis à la Maison-Blanche.
«En travaillant ensemble, nous avons épargné à ce pays une catastrophe de Noël», a-t-il commenté dans un communiqué.
Face à la perspective d’une grève à compter du 9 décembre, le dirigeant démocrate, grand partisan du transport ferroviaire, avait exigé du Congrès qu’il passe en force de façon législative, ce qu’il est habilité à faire en vertu d’une loi de 1926.
Joe Biden, qui ne perd jamais une occasion d’affirmer, en général, son soutien aux syndicats, a jugé la situation actuelle trop périlleuse: une grève du fret aurait amputé l’activité économique américaine de deux milliards de dollars par jour, selon une estimation de l’Association américaine des chemins de fer.
Paralysie du rail
Elle aurait aussi eu des répercussions sur le transport de passagers, puisque la plupart des trains de passagers empruntent des voies appartenant aux compagnies de fret.
Le président américain a redit dans le communiqué sa «réticence à outrepasser» les négociations syndicales. «Mais dans ce cas, les conséquences d’une fermeture étaient tout simplement trop importantes», a-t-il affirmé.
La perspective d’une paralysie du rail américain présentait un risque politique majeur pour le président, alors que l’inflation demeure élevée et que l’économie américaine montre déjà des signes de ralentissement.
Mais en forçant l’adoption de la convention collective et en passant outre le dialogue social, le chef de l’État s’est exposé à des critiques de syndicats et de l’aile gauche de sa majorité.
«Il n’y a pas d’exemple plus clair de la cupidité des entreprises que ce que nous voyons dans l’industrie ferroviaire aujourd’hui», a regretté le sénateur progressiste Bernie Sanders.
Joe Biden s’était défendu de toutes critiques lors d’une conférence de presse jeudi avant le vote au Sénat, assurant qu’il était parvenu «à négocier un contrat que personne d’autre n’aurait pu négocier».
Congé maladie
Le texte prévoit une augmentation de salaire de 24% au cours de la période de cinq ans allant de 2020 à 2024 (avec effet rétroactif), ainsi qu’un jour de congé personnel supplémentaire.
La fédération des entreprises du rail (AAR) s’est félicitée du résultat du vote, qui permet selon elle d’éviter une grève «économiquement dévastatrice». Il représente un «compromis» mais apporte des «gains substantiels» aux employés, affirme-t-elle.
Le texte n’impose pas en revanche aux entreprises du rail d’accorder des jours de congé maladie à leurs employés, une demande pressante de la part de certains syndicats de cheminots. Certaines compagnies n’en proposent aucun pour l’instant.
Pour tenter de résoudre ce contentieux, les démocrates avaient présenté une proposition de loi complémentaire prévoyant sept jours de congés maladie garantis par an. Mais celle-ci n’a pas obtenu les 60 votes requis au Sénat.
«Le fait qu’il n’y ait pas 60 sénateurs qui aient le cran de s’opposer au monde des affaires et de lutter pour les droits basiques des travailleurs du rail est terrifiant», a réagi sur Twitter Sean O’Brien, président du syndicat des Teamsters.
«Presque tous les membres du Congrès font campagne en disant être +pour la classe ouvrière+ ; les actes de nombre d’entre eux aujourd’hui ont démontré qu’ils défendent en fait les entreprises», a aussi déploré un autre syndicat, BRS, dans un message.
Au total, douze syndicats négociaient avec les représentants des employeurs depuis 2020. Face à la première menace d’une grève en septembre, Joe Biden avait mis tout son poids politique pour décrocher un accord préliminaire, qui a par la suite été rejeté par les membres de quatre syndicats.
«J’ai été très clair: je vais continuer à me battre pour la prise en charge des congés maladie, non seulement pour les cheminots, mais pour tous les travailleurs américains», a promis le président jeudi.