Trudeau rencontrera les premiers ministres pour discuter des tarifs de Trump
La Presse Canadienne|Mis à jour le 26 novembre 2024(Photo: La Presse Canadienne//Justin Tang)
Ottawa — Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, convoque une réunion avec les premiers ministres des provinces pour adopter une réponse «Équipe Canada» à la menace de Donald Trump d’imposer de lourds tarifs sur les importations canadiennes et mexicaines.
«On doit travailler ensemble pour défendre les intérêts des Canadiens. On a déjà fait ça, on peut faire ça et on va le faire de façon responsable», a-t-il déclaré à son arrivée au parlement, mardi matin.
La rencontre sera virtuelle et aura lieu mercredi à 17h, a indiqué une source gouvernementale fédérale.
M. Trudeau a déclaré qu’il avait eu «un bon appel» avec le président désigné des États-Unis, lundi soir, soulignant les «relations positives» entre les deux pays.
Donald Trump venait d’annoncer qu’il imposera dès son entrée en fonction le 20 janvier des tarifs douaniers de 25% sur tous les produits entrants aux États-Unis depuis le Canada et le Mexique dans le cadre de ses efforts pour lutter contre l’immigration illégale et la drogue.
Il s’est plaint que «des milliers de personnes affluent par le Mexique et le Canada, amenant la criminalité et la drogue à des niveaux jamais vus auparavant».
Le premier ministre Trudeau s’est également entretenu avec ses homologues de l’Ontario, Doug Ford, et du Québec, François Legault.
M. Ford, qui préside le Conseil de la fédération, avait écrit à M. Trudeau pour demander une réunion urgente afin de discuter d’une approche unifiée sur tous les enjeux, du commerce et de la sécurité des frontières à l’énergie, à la défense et en passant par les chaînes d’approvisionnement transfrontalières.
En point de presse, mardi, le premier ministre ontarien a soutenu que le Canada n’aura d’autre choix que de riposter aux Américains si M. Trump met sa menace à exécution. Il a aussi affirmé que le Canada doit en faire davantage au niveau de la sécurité de la frontière, comme en donnant plus de ressources à l’Agence des services frontaliers du Canada.
Le premier ministre du Québec, François Legault, qui doit faire le point en après-midi, avait déclaré la veille que «l’intégrité des frontières doit être la priorité du gouvernement fédéral» afin d’éviter à tout prix des tarifs américains.
À son arrivée à la réunion du cabinet, le ministre de l’Immigration, Marc Miller, a ouvert la porte à l’ajout de ressources supplémentaires à la frontière, ajoutant que ces questions seront aussi gérées par le ministre de la Sécurité publique, Dominic LeBlanc.
Quant à d’éventuelles mesures de représailles canadiennes aux tarifs que M. Trump promet de mettre en place, la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, est restée vague. «On va continuer de protéger les intérêts des Canadiens et ultimement avoir une approche qui est positive pour les deux pays, tant le Canada que les États-Unis», a-t-elle dit au cours d’un point de presse virtuel après sa rencontre, en Italie, avec ses homologues du G7.
Au cours de la première présidence de M. Trump, le gouvernement Trudeau avait riposté «dollar pour dollar» aux tarifs imposés aux importations canadiennes d’acier et d’aluminium, a récemment rappelé la vice-première ministre Chrystia Freeland.
Le chef conservateur Pierre Poilievre, qui a attendu à mardi pour commenter la sortie de M. Trump, s’est dit prêt à riposter «si nécessaire» à des tarifs américains dans le cas où il serait premier ministre du Canada.
Dans une longue déclaration devant les journalistes parlementaires, il a qualifié d’«injuste», «décevante» et «problématique» la menace faite par M. Trump. Disant vouloir offrir des «propositions non partisanes» pour que le Canada réponde au futur président américain, il a demandé à M. Trudeau de «renverser toutes ses augmentations de taxes et impôts», incluant la hausse de la tarification sur le carbone.
«Il propose maintenant des augmentations de taxes massives sur l’investissement et sur l’énergie. C’était une mauvaise décision avant. C’est impossible maintenant, a-t-il tranché. Avec des tarifs de Trump et des taxes de Trudeau, notre économie serait détruite.»
Il appelle aussi M. Trudeau à investir davantage dans l’armée et à accélérer l’approbation de projets énergétiques «pour pouvoir être plus autosuffisant».
En réponse à la question d’une journaliste qui lui demandait s’il participerait à un front uni et non partisan pour défendre les intérêts du Canada, M. Poilievre a répondu que «ce dont nous n’avons pas besoin est d’un spectacle de plusieurs politiciens qui s’assoient à une table, tiennent des rencontres et des “photo op”», faisant ainsi référence à l’expression anglaise pour désigner des séances de prises d’images.
Un peu plus tôt, les ministres qui arrivaient à la réunion du cabinet ont plaidé que les préoccupations de M. Trump ne sont pas fondées, tout en jugeant que sa menace ne doit pas être prise à la légère.
Le ministre de l’Industrie, François-Philippe Champagne, a appelé à «éviter de faire des amalgames» entre les frontières du Mexique et du Canada.
M. Champagne a insisté sur le fait que des forces de l’ordre sont présentes à la frontière. Il a du même souffle reconnu que le Canada et les États-Unis ont «un intérêt commun (…) à arrêter ce trafic-là qu’on peut constater», sans toutefois préciser sa pensée.
Son collègue ministre de l’Immigration, Marc Miller, a plaidé que les enjeux migratoires survenant en une année entière à la frontière canado-américaine sont «l’équivalent d’un week-end important à la frontière mexicaine». Il a signalé avoir lui aussi «des revendications» quant à la manière dont les Américains gèrent leurs propres frontières.
Quant aux menaces de tarifs, M. Miller appelle à les prendre au «sérieux», même si cela pourrait être un prétexte pour négocier. «Un tarif de 25 %, ça a la capacité de faire du mal au Canada. Ça va faire du mal aux Américains, a-t-il dit. Avec nos économies qui sont intégrées, ils vont se tirer dans le pied, puis à répétition d’ailleurs.»
Le ministre du Logement, Sean Fraser, a pour sa part expliqué qu’à l’heure actuelle, le gouvernement canadien travaille à «tendre la main» à ses contacts aux États-Unis.
«Les Canadiens et les Américains des deux côtés de la frontière veulent s’assurer d’avoir des frontières renforcées qui favorisent l’intégrité, mais qui permettent également la libre circulation des personnes qui alimentent notre économie, ainsi que le commerce entre les entreprises des deux côtés de la frontière», a-t-il expliqué.
– Avec des informations d’Émilie Bergeron
Par Michel Saba