Une image aérienne de Paris, en France (Photo: 123rf)
Avec la chute brutale de son économie, la France est entrée officiellement en récession, conséquence directe de l’épidémie de coronavirus dont le bilan humain ne cesse de s’alourdir, dépassant les 10 000 morts dans le pays.
Chute historique de 6% du PIB de janvier à mars, soit la pire performance trimestrielle depuis 1945: le chiffre publié jeudi par la Banque de France témoigne des brutales pertes d’activité notamment dans les secteurs de la construction, du commerce, des transports, de l’hébergement et de la restauration.
L’activité a notamment été inférieure d’environ un tiers (-32%) à la normale sur les quinze derniers jours de mars, alors que le confinement, commencé le 17 mars, devra vraisemblablement être prolongé au-delà du 15 avril.
Les Français sont plus que jamais appelés à rester chez eux.
Dans son dernier avis, rendu public mardi soir, le Conseil scientifique considère que la fin du confinement ne pourra être envisagée que lorsque la «saturation» des services de réanimation aura été «jugulée», qu’une «réduction du nombre de cas de COVID-19 sur le territoire national» aura été observée et que les «mesures de contrôle» qui prendront le relais seront «opérationnelles».
Mais pour l’heure, «l’élément essentiel et capital est la poursuite d’un confinement strict sur plusieurs semaines», a insisté mercredi son président, Jean-François Delfraissy, sur franceinfo.
Nouvelles restrictions
De nouvelles restrictions sont entrées en vigueur alors qu’autorités et soignants craignent un relâchement avec la conjonction des beaux jours et des vacances de Pâques (en zone C pour le moment, Ile-de-France et Occitanie).
Dans la capitale et cinq autres départements franciliens, toute activité sportive individuelle est désormais interdite de 10h00 à 19h00, face au nombre inhabituel de «joggeurs» multipliant les sorties.
Mercredi matin, le long du canal Saint-Martin à Paris, ils étaient nombreux à courir au soleil ou à pratiquer ping-pong, tai-chi, rollers ou encore stretching, avant que les policiers ne sifflent, à 10H00, la fin de la partie.
La France a enregistré mardi un nouveau très lourd bilan quotidien dans les hôpitaux, avec 597 décès supplémentaires en 24 heures, soit un total de 7 091 depuis début mars. S’y ajoutent 3 237 morts recensés dans les Ehpad et établissements médico-sociaux, soit un total de 10 328 morts.
Au total, 7 131 patients nécessitent des soins lourds en réanimation, «un indicateur que l’épidémie continue sa progression», a relevé le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon.
Toutefois, avec les sorties, l’augmentation nette du nombre de patients en réanimation est de moins en moins forte, avec un solde de +59 mardi.
«Nous ne sommes pas encore au pic», a répété le N°2 du ministère de la Santé. «Nous ne sommes qu’à la phase ascendante même si elle ralentit un peu, donc aborder le déconfinement aujourd’hui n’a aucun sens».
Selon Jean-François Delfraissy, le pire semble passé dans le Grand Est, première région durement touchée par l’épidémie.
Quant à la région parisienne, dont les hôpitaux restent soumis à très rude épreuve, «on est probablement juste à la limite», a-t-il estimé. «Il faut être extrêmement prudent là-dessus, mais on a l’impression que le système de soins (…) a tenu le choc et va tenir le choc en région parisienne, grâce à l’effort de l’ensemble des soignants, aux transferts.»
La maladie pourrait avoir touché jusqu’au porte-avions nucléaire Charles-de-Gaulle, où une quarantaine de marins porteurs de «symptômes compatibles» font l’objet d’une «observation médicale renforcée», selon le ministère des armées.
Signes dermatologiques
Sur le front des traitements, les premiers essais cliniques devraient commencer à donner des résultats dans les prochains jours.
«C’est une maladie qui est beaucoup plus compliquée qu’on ne le croyait, qui touche des organes, le système nerveux, la coagulation, le cœur», a décrit Gilles Pialoux, chef de service de l’unité des maladies infectieuses et tropicales de l’hôpital Tenon, sur BFMTV et RMC.
Les dermatologues ont eux alerté sur ce qu’ils considèrent comme des «manifestations cutanées» de la maladie COVID-19: pseudo-engelures, urticaire, ou rougeurs persistantes.
Le secrétaire d’État aux Transports, Jean-Baptiste Djebbari, a conseillé aux Français «d’attendre» avant de réserver des voyages pour les vacances d’été.
Pour autant, le gouvernement prépare bien l’après, et planche au développement d’une application sur téléphone intelligent, utilisable «sur la base du volontariat» pour identifier les personnes ayant été en contact avec une autre par le coronavirus, ont annoncé mercredi le ministre de la Santé Olivier Véran et le secrétaire d’État au Numérique Cédric O dans un entretien au Monde.
Par ailleurs, la France poursuit ses efforts pour s’approvisionner en masques, convoités par l’ensemble de la planète où l’épidémie a fait plus de 75 000 morts. Les «commandes sûres» atteignent désormais 1,6 milliard d’unités, selon M. Véran.
Un port généralisé du masque reste une «question ouverte» mais le gouvernement maintient pour l’heure sa recommandation d’en réserver l’usage aux soignants et personnes infectées, a-t-il également dit.
Lorsque viendra le temps du déconfinement, celui-ci devra certainement s’accompagner d’une «utilisation très large des masques» dans la population, a estimé Jean-François Delfraissy.
«Le déconfinement, d’un point de vue scientifique, est lié à notre capacité à fournir des outils de prévention dont le masque, il y aussi les solutions hydroalcooliques, la distanciation sociale, et surtout du dépistage à très haut niveau», a résumé le Pr Gilles Pialoux.