Trudeau préférerait que la Chine ne puisse pas adhérer au Partenariat transpacifique

Publié le 06/06/2023 à 12:59

Trudeau préférerait que la Chine ne puisse pas adhérer au Partenariat transpacifique

Publié le 06/06/2023 à 12:59

Par La Presse Canadienne

Ottawa — Alors que le gouvernement libéral fédéral insiste publiquement sur le fait que le Partenariat transpacifique devrait accueillir tout pays qui respecte les normes de cet accord régional de libre-échange, un document interne suggère que Justin Trudeau préférerait que la Chine ne puisse pas y adhérer.

 

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Ses commentaires découlent du compte rendu interne d’un appel téléphonique entre M. Trudeau et l’ancienne première ministre britannique Liz Truss, l’été dernier, peu de temps après le début de son mandat au 10 Downing. Mme Truss n’est plus en poste aujourd’hui.

Un diplomate canadien à Londres a transmis le 11 septembre dernier à Ottawa un «compte rendu non officiel» qui résumait l’entretien téléphonique, et dont La Presse Canadienne a obtenu copie grâce à la Loi sur l’accès à l’information.

Le document indique que Mme Truss estimait que les États-Unis et l’Union européenne devraient faire partie de cet «Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste», qui comprend le Canada et dix autres pays d’Asie et d’Amérique latine — et qui impliquera bientôt le Royaume-Uni.

Selon le compte rendu, le premier ministre Trudeau «a profité de cette occasion pour souligner que c’était exactement pourquoi il était si important de mettre la barre aussi haute, afin que le Royaume-Uni puisse adhérer à l’Accord» et «que cela rende (trop) difficile pour la Chine d’y adhérer». Le compte rendu ajoute que la première ministre Truss était d’accord avec cette affirmation.

Une rhétorique inhabituellement directe pour la professeure d’économie Meredith Lilly, de l’Université Carleton, qui a été conseillère commerciale du premier ministre Stephen Harper. «Je ne pense pas que ce soit quelque chose qui serait formulé de cette manière en public», a-t-elle estimé.

Par consensus des membres

Le Canada insiste sur le fait qu’il n’a aucune position sur la possibilité pour la Chine de rejoindre le bloc commercial: Ottawa affirme plutôt que tout pays peut être admis s’il répond aux critères établis par les membres du groupe, y compris le droit à la syndicalisation et les objectifs environnementaux.

Vendredi dernier, la ministre du Commerce, Mary Ng, a répété ce message lorsqu’elle a été interrogée précisément sur l’adhésion de la Chine à l’accord de libre-échange.

«Le Partenariat fonctionne par consensus entre tous les partenaires commerciaux. Et nous allons devoir réfléchir à la manière dont nous traitons les demandes d’adhésion», a-t-elle déclaré lors d’une conférence organisée par l’Institut canadien des affaires mondiales.

«La conformité et l’applicabilité des normes environnementales, les normes du travail, leur nature inclusive, un bilan en tant que partenaire commercial conforme aux règles — voilà le genre de choses dont (nous) discutons.»

La Chine a demandé à se joindre au bloc commercial en septembre 2021, mais elle doit obtenir le soutien de tous les membres. La professeure Lilly souligne que le Canada est l’une des principales voix au sein du Partenariat, puisqu’il est l’une des plus importantes économies du groupe, avec le Japon et l’Australie.

Or, le ministre australien du Commerce, Don Farrell, déclarait l’automne dernier: «Je ne crois pas qu’il y ait la moindre perspective que la Chine puisse adhérer», étant donné que Pékin a tendance à bloquer le commerce pour des raisons politiques.

Des réformes trop majeures

La professeure Lilly n’a pas vu Ottawa adopter une telle position publique. «Il est très important pour le Partenariat de maintenir son architecture ouverte, a-t-elle admis. Mais les barrières à l’adhésion devraient être extrêmement élevées, de telle sorte qu’il est peu probable qu’un pays comme la Chine se qualifie.»

Car il est peu probable, selon elle, que la Chine envisage une série de réformes qu’elle devrait entreprendre alors, notamment toutes les questions relatives aux entreprises publiques, à l’accès au marché et aux dispositions relatives aux devises.

«L’adhésion ne peut pas simplement être basée sur une promesse d’être meilleure à l’avenir, précisément parce que la Chine en particulier a pris par le passé certains engagements qu’elle n’a pas réussi ensuite à respecter», a-t-elle déclaré.

«Il est important de s’en tenir à des règles et à des normes ambitieuses, car cela crée toujours une occasion pour un pays de changer — ce n’est donc pas seulement une décision dogmatique de refuser un pays.»

«Dans l’intérêt du Canada»

L’ambassade de Chine à Ottawa soutient qu’elle a remarqué un intérêt croissant parmi les experts canadiens pour que la Chine rejoigne le bloc commercial. Pékin note que cette adhésion triplerait sa base de consommateurs et offrirait au Canada d’«énormes» occasions d’affaires. L’ambassade soutient qu’elle est «en contact étroit» au sujet de l’adhésion à l’accord.

«La candidature de la Chine pour rejoindre le Partenariat est l’une des mesures majeures pour étendre davantage son ouverture, indique un communiqué. Il est conforme aux intérêts de la Chine, aux intérêts de tous les membres du Partenariat, y compris le Canada, aux intérêts de la région Asie-Pacifique et aux intérêts de la reprise de l’économie mondiale.»

L’accord de libre-échange regroupe le Canada et dix autres pays de l’Asie-Pacifique: l’Australie, Brunéi, le Chili, le Japon, la Malaisie, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, le Pérou, Singapour et le Vietnam.

La professeure Lilly souligne également que la plupart des membres du bloc commercial sont des économies plus petites, mais qui ont des liens économiques plus forts avec Pékin. Or, plusieurs de ces pays ne veulent pas être perçus comme prenant parti dans la rivalité croissante entre les États-Unis et la Chine.

Taïwan, une île démocratique et autonome que la Chine revendique comme faisant partie de son propre territoire, a demandé à rejoindre le bloc commercial à peu près en même temps que Pékin, et de nombreux pays restent muets quant aux mérites de l’une ou l’autre adhésion.

En outre, souligne la professeure Lilly, le fait que ni Washington ni Pékin ne fasse partie du bloc commercial donne aux petites économies plus de possibilités de faire avancer leurs propres intérêts au sein du Partenariat.

Dans une déclaration écrite, Affaires mondiales Canada indique que l’adhésion au Partenariat transpacifique dépend des pays qui soutiennent des marchés ouverts et des normes réglementaires élevées.

«La position du Canada sur toute économie aspirant à adhérer sera toujours guidée par les meilleurs intérêts et valeurs des travailleurs et des entreprises canadiens», a écrit la porte-parole, Charlotte MacLeod.

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