Un juge du Wisconsin n'ordonne pas la fermeture de la Ligne 5 d'Enbridge

Publié le 08/09/2022 à 09:41, mis à jour le 08/09/2022 à 18:32

Un juge du Wisconsin n'ordonne pas la fermeture de la Ligne 5 d'Enbridge

Publié le 08/09/2022 à 09:41, mis à jour le 08/09/2022 à 18:32

Par La Presse Canadienne

Dans sa décision, le juge du tribunal de district William Conley reconnaît que la fermeture de la canalisation pétrolière et gazière aurait de graves répercussions sur la politique étrangère du Canada et des États-Unis. (Photo: 123RF)

Washington — Un juge du Wisconsin a tranché en faveur d’une communauté autochtone du Wisconsin dans son différend avec Enbridge au sujet de la canalisation 5, mais il n’a pas ordonné la fermeture du controversé pipeline transfrontalier canadien.

Le juge du tribunal de district William Conley estime que la communauté Chippewa de Bad River, sur le lac Supérieur, a démontré qu’elle avait le droit de révoquer l’autorisation accordée à Enbridge en 2013 de faire passer le pipeline par son territoire.

Le juge Conley a également estimé que la Première Nation, qui souhaite que la canalisation soit retirée de la réserve de Bad River, a droit à une compensation financière — bien qu’il n’entre pas dans les détails à ce sujet.

Le juge a toutefois rejeté la requête de la communauté de Bad River visant à faire carrément fermer le pipeline, citant de graves conséquences potentielles sur la politique étrangère et le commerce, tant pour le Canada que pour les États-Unis.

Il reconnaît la décision de la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, à la fin du mois dernier, d’invoquer officiellement un traité canado-américain de 1977, qui couvre spécifiquement les pipelines transfrontaliers.

Dans sa décision, publiée mercredi soir, le juge Conley exige également qu’Enbridge déroute d’ici cinq ans le pipeline pour contourner le territoire de Bad River — une initiative qui, selon l’entreprise de Calgary, serait déjà amorcée.

Une «intrusion»

Les préoccupations environnementales sont au cœur de ce dossier au Wisconsin, où le pipeline traverse directement la réserve de Bad River, soit plus de 500 kilomètres carrés de zones humides vierges, de ruisseaux et d’étendues sauvages.

La première nation Chippewa plaide en cour depuis plus de trois ans qu’Enbridge commet une intrusion sur son territoire en violant les termes des servitudes qui ont permis au pipeline de traverser la réserve à partir de 1953.

Enbridge, de son côté, a fait valoir qu’un accord de 1992 avec la communauté de Bad River permettait au pipeline de continuer à fonctionner jusqu’en 2043.

Le juge Conley a toutefois conclu que la communauté de Bad River était dans son droit de décider de ne pas renouveler les servitudes accordées en 2013, et que l’entente de 1992 n’était pas en soi une garantie que le pipeline pourrait continuer à fonctionner jusqu’en 2043.

«L’objectif convenu n’était pas, comme Enbridge l’affirme maintenant, de lui permettre d’exploiter (l’oléoduc) sur l’ensemble de la réserve pendant 50 ans, écrit le juge. De plus, Enbridge était consciente du risque que ses servitudes de 20 ans […] ne soient pas renouvelées, et pourtant elle n’a pas réussi à se protéger de ce risque.»

Dans un communiqué, Enbridge applaudit la décision de maintenir ouverte la Canalisation 5 et déclare qu’elle reste déterminée à résoudre le différend «à l’amiable» avec la communauté de Bad River. Les plans de l’entreprise pour contourner la réserve sur 66 km datent déjà de deux ans, et 100% des propriétaires fonciers privés le long de la nouvelle route ont déjà signé des accords, soutient l’entreprise.

«Le projet de relocalisation sera construit par un entrepreneur du Wisconsin et créera environ 700 emplois syndiqués, a déclaré Enbridge. Environ 46 millions $ US seront dépensés auprès d’entreprises appartenant à des Premières Nations, et pour l’embauche et la formation de travailleurs autochtones, qui représenteront au moins 10% de la main-d’œuvre du projet.»

La canalisation 5 a été contestée devant les tribunaux au Wisconsin et au Michigan voisin pendant la majeure partie des trois dernières années. La décision de mercredi sera probablement considérée comme une victoire pour ses opposants, qui plaident pour sa fermeture pure et simple.

Des groupes d’affaires et des chambres de commerce des deux côtés de la frontière, des gouvernements provinciaux et Ottawa se sont ralliés à Enbridge dans ses efforts pour présenter la survie de la canalisation 5 comme un élément essentiel à la sécurité énergétique au Canada et aux États-Unis.

Les alliés ont fait valoir, tant devant les tribunaux que dans des forums publics, que la canalisation 5 constituait une source d’énergie vitale pour plusieurs États du Midwest et un lien essentiel pour les raffineries canadiennes, qui alimentent certains des aéroports les plus achalandés du pays.

À la fin du mois dernier, Enbridge a remporté une victoire clé dans un procès au Michigan: une juge de la Cour fédérale a rejeté la requête de la procureure générale Dana Nessel pour renvoyer l’affaire devant une «cour de circuit», où l’État a de meilleures chances de succès. Mme Nessel a depuis indiqué qu’elle prévoyait d’interjeter appel de cette décision.

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