Un exportateur québécois renonce au marché américain


Édition du 15 Juin 2019

Un exportateur québécois renonce au marché américain


Édition du 15 Juin 2019

Par François Normand

Club Tissus exploite quatre magasins au ­Québec. Elle importe des tissus d’Europe et d’Asie pour les revendre ensuite en ­Amérique du ­Nord. (Photo: 123RF)

Club Tissus jette l'éponge par rapport aux États-Unis. Les nouvelles règles du libre-échange visant le commerce de détail ont convaincu la PME de Longueuil d'arrêter de vendre ses produits au sud de la frontière.

«Depuis quelques mois, les consommateurs américains ne peuvent plus acheter nos produits, car on leur a volontairement bloqué l'accès à notre plateforme transactionnelle», explique au bout du fil le PDG Frédérik Guérin.

L'entreprise de 150 employés qui exploite quatre magasins au Québec importe des tissus d'Europe et d'Asie pour les revendre ensuite en Amérique du Nord, et ce, en faisant relativement peu de transformation à ces produits.

Le nouvel Accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM) a toutefois modifié une règle qui affecte sa stratégie d'affaires sur le marché américain. Il a réduit drastiquement le seuil de minimis, soit le niveau à partir duquel les Américains commencent à payer des taxes de vente et des tarifs douaniers sur les importations des produits de Club Tissus aux États-Unis - certains tarifs persistent malgré le libre-échange. Avant la renégociation de l'ALÉNA, ce seuil s'élevait à 800 $ US.

Aujourd'hui, il s'établit à 100 $ US, explique Pierre-Emmanuel Paradis, économiste et président d'AppEco, une firme d'analyse économique qui a réalisé une étude sur l'impact des nouvelles règles de l'ACEUM pour le compte du Conseil québécois du commerce de détail.

Les coûts pour exporter ont bondi

La réduction du seuil de minimis a fait bondir les coûts pour les consommateurs américains qui achètent des tissus au Canada dont la valeur est supérieure à 100 $ US, souligne l'économiste.

Cette nouvelle règle a non seulement miné la compétitivité de Club Tissus aux États-Unis, mais elle a aussi accru la paperasserie pour y vendre ses produits, confie M. Guérin.

«Auparavant, nous n'avions pas à remplir les papiers documentant la provenance des fibres pour chaque produit pour une commande inférieure à 800 $ US. Maintenant, il faut le faire, de sorte que le temps pour remplir les formulaires est devenu plus onéreux que le profit que nous faisons sur une commande.»

C'est pourquoi la PME a changé de stratégie en Amérique du Nord. «Nous quittons le marché américain pour nous concentrer désormais sur la croissance de nos ventes dans les autres provinces canadiennes», dit l'entrepreneur.

Cela dit, cette décision aura peu d'impact sur le chiffre d'affaires de l'entreprise, qui s'élève à quelque 12 millions de dollars canadiens.

La société a lancé sa plateforme transactionnelle il y a trois ans. Les ventes en ligne sont donc modestes pour l'instant, soit environ 4 % de ses revenus totaux. Et seulement le quart de ces ventes provenaient du marché américain.

Du reste, Club Tissus n'exclut pas de revenir un jour sur le marché américain, mais l'entreprise ne le fera pas directement comme elle le faisait auparavant.

Elle pourrait par exemple cibler 50 de ses produits (sur un total de 35 000) qui génèrent les ventes les plus élevées et les offrir sur la plateforme du géant américain du commerce de détail Amazon.

«On y songe, mais aucune décision n'a été prise pour l'instant», dit M. Guérin. Le cas échéant, Club Tissus réduirait ses frais administratifs par ventes de lots de tissus sur le marché américain.

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