GameStop a récemment refait surface en tant que titre « meme » extraordinaire. (Photo: 123RF)
EXPERT INVITÉ. Comme le casino ou l’achat de billets de loterie, la Bourse sert régulièrement de plateforme spéculative pour faire un coup d’argent rapide, sans trop avoir à faire d’efforts.
Les vagues spéculatives emportent parfois l’ensemble du marché boursier (fin des années 1990?), ou certains secteurs tels que le cannabis en 2018, les sociétés d’acquisition à vocation spécifique (SPACs) en 2020 et les «meme stocks» en 2021.
Je me suis amusé à poser quelques questions sur ce phénomène des «memes» à ChatGPT et voici une partie de la réponse que j’ai obtenue. J’ai souligné quelques mots clés.
«Le terme « meme » faisait initialement référence à toute idée, comportement ou style se propageant au sein d’une culture, souvent par imitation. Cependant, dans le contexte des « meme stocks », il désigne des actions qui connaissent une augmentation rapide de leur prix et de leur volume de transactions, principalement alimentée par les communautés Internet, les tendances sur les réseaux sociaux et les forums en ligne, plutôt que par des indicateurs financiers traditionnels ou des fondamentaux.»
Le phénomène des «memes» boursiers («meme stocks») a fait rage en 2021. On a tendance à vouloir oublier cette période de confinement liée à la COVID-19. Il reste que, à cette époque, de nombreuses personnes travaillant à la maison étaient devenues des spéculateurs boursiers, des «day traders». Combinez l’engouement pour la spéculation boursière avec la popularité des réseaux sociaux, en particulier la plateforme Reddit (RDDT, 54,16$US), et vous avez le potentiel de faire exploser des titres en Bourse.
Maintenant, ajoutez à cela le fait que les titres visés sont souvent des titres largement vendus à découvert (vendre un titre à découvert consiste à vendre un titre que l’on ne possède pas dans l’espoir de le racheter plus tard à un prix moins élevé, empochant ainsi un bénéfice) et vous obtenez un cocktail potentiellement explosif.
Je prendrai l’exemple de GameStop (GME, 18,32$US), car il a récemment refait surface en tant que titre « meme » extraordinaire. Voici comment son titre s’est comporté en 2021 alors que la folie des titres «meme» a fait rage :
(Source: FactSet)
À la fin de 2020, le titre de GameStop valait 4,71$US. Le 25 janvier 2021, soit 25 jours plus tard, il atteignait un sommet de 120,75$US! Pourtant, comme l’indique ChatGPT, cette hausse fulgurante n’était fondée sur aucune base fondamentale.
En plus de GameStop, les titres de sociétés telles qu’AMC (AMC, 4,55$US), BlackBerry (BB, 3,92$), Nokia (NOK, 3,85$US) et Bed Bath & Beyond (cette dernière a essentiellement fait faillite en 2023) ont aussi été la proie d’une grande vague de spéculation en 2021. Dans chaque cas, on parle de sociétés pratiquement moribondes dont les perspectives sont peu reluisantes et les titres largement vendus à découvert.
Or, il semblerait que le phénomène « meme » ait récemment refait surface. En effet, le 13 mai dernier, le titre s’est apprécié de 74% pour clore la journée à 30,45$US. Le lendemain, le titre a connu une hausse maximale de 113% à son haut de la journée (64,83$US). De son côté, le titre d’AMC s’est apprécié de 78% au cours de la journée du 13 mai, en plus d’atteindre une hausse maximale de 129% le 14 mai. Apparemment, cette frénésie a été lancée par quelques messages publiés sur X par Keith Gill, celui-là même qui avait attiré l’attention du monde sur GameStop en 2021.
À court terme, d’innombrables facteurs peuvent faire fluctuer un titre en Bourse, parfois de manière explosive. À long terme cependant, un titre finira toujours par suivre l’évolution des bénéfices par action de cette entreprise.
Spéculer sur des «memes» équivaut à aller passer une soirée au casino. Dans les deux cas, on peut faire un coup d’argent rapide. Mais à la longue, on est presque certain de perdre toute sa mise. Personnellement, même si je me fais un point d’honneur de ne jamais mettre les pieds dans un casino, je préférerais le casino à la spéculation sur un titre « meme ». Au moins, on court la chance d’y obtenir une ou deux consommations gratuites.
Philippe Le Blanc, CFA, MBA
Chef des placements chez COTE 100 et auteur du livre Avantage Bourse