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Premières Nations: la vérificatrice générale «découragée»

La Presse Canadienne|Publié le 19 mars 2024

Premières Nations: la vérificatrice générale «découragée»

Les rapports déposés à la Chambre des communes mardi dressent un sombre tableau du bilan d’Ottawa en matière de logement et de maintien de l’ordre pour les Premières Nations. (Photo: La Presse Canadienne)

La vérificatrice générale du Canada est «complètement découragée» de constater si peu d’améliorations quant aux logements insalubres dans les Premières Nations au cours des deux dernières décennies, indique un nouveau rapport. 

Karen Hogan a également examiné l’expansion prévue du Programme des services de police des Premières Nations, très critiqué, et a constaté qu’une mauvaise gestion laisse les communautés mal desservies et des fonds non dépensés.

Les rapports déposés à la Chambre des communes mardi dressent un sombre tableau du bilan d’Ottawa en matière de logement et de maintien de l’ordre pour les Premières Nations.

C’est la quatrième fois depuis 2003 que le Bureau du vérificateur général du Canada tient le gouvernement responsable des logements dangereux et inadaptés des Premières Nations.

Le rapport de Mme Hogan indique que les communautés où les conditions de logement sont les plus mauvaises ont reçu le moins de financement et que le gouvernement n’a pas réussi à garantir que les logements respectaient les normes du code du bâtiment.

«De nombreuses personnes vivant dans les collectivités des Premières Nations n’ont pas accès à des logements sécuritaires et en bon état, alors qu’il s’agit d’un droit fondamental de la personne», indique le rapport.

«L’amélioration du logement pour les membres des Premières Nations est essentielle à leur santé et à leur bien−être physique, mental et économique.»

De 2018−2019 à 2022−2023, Services aux Autochtones Canada et la Société canadienne d’hypothèques et de logement ont fourni du financement pour construire 11 754 nouveaux logements et pour réparer 15 859 logements existants.

Cela représente environ le cinquième de ce qui est nécessaire dans les nouvelles constructions et les réparations pour combler les lacunes existantes, a indiqué Mme Hogan.

Elle a souligné que la construction dans les communautés peut être difficile, surtout si elles se trouvent dans des régions rurales et éloignées, ce qui limite la saison de construction et les travailleurs disponibles. La pandémie a également entraîné certains retards dans les projets.

Pourtant, le manque de logements convenables est associé à la violence familiale, à la consommation de substances, au suicide et aux obstacles économiques, a−t−elle relevé et cela peut contribuer à une perte de culture s’il n’y a pas d’options de logement dans les communautés, forçant ainsi la migration.

Et à mesure que le temps passe, dit−elle, les écarts continueront de se creuser.

Les 3,86 milliards de dollars (G$) alloués au logement pour les communautés des Premières Nations au cours des cinq dernières années ne représentent qu’une fraction des 44 G$ que l’Assemblée des Premières Nations estime nécessaires pour améliorer le logement d’ici 2030, a noté Mme Hogan. 

Elle a estimé que 16 G$ supplémentaires seraient nécessaires pour répondre aux futurs besoins en matière de logement liés à la croissance démographique de 2022 à 2040.

Services aux Autochtones Canada a pour mandat de transférer les responsabilités, y compris le logement, aux Premières Nations.

Le rapport de Mme Hogan révèle que le ministère en est aux premiers stades de cette démarche, mais qu’aucun cadre politique global n’est en place pour guider son approche.

«Il importe de disposer d’une stratégie, compte tenu de la courte période restante pour corriger l’écart à laquelle le gouvernement s’est engagé, de la taille de l’écart, des fonds disponibles limités et des difficultés que les Premières Nations doivent surmonter pour la construction des infrastructures», souligne−t−elle.

 

Critiques sur les services de police 

Dans un autre rapport, la vérificatrice a également découvert de graves problèmes liés à l’expansion prévue d’un programme très critiqué qui fournit des services de police aux Premières Nations et aux Inuits.

Les libéraux ont investi 500 millions de dollars (M$) dans l’expansion du programme en 2021, ce qui permettra aux gouvernements fédéral et provincial de combiner des fonds pour financer les services de police auprès des Premières Nations.

Le rapport de M. Hogan indique également que la Gendarmerie royale du Canada (GRC) ne respectait pas ses engagements envers les communautés, ne dépensait pas l’argent de manière équitable et était sur le point de laisser 45 M$ alloués au programme non dépensés cette année.

Par exemple, dans un échantillon de 26 communautés desservies par la GRC dans le cadre du programme, seulement 38% avaient des agents capables de consacrer 100 pour cent de leur temps aux communautés qu’ils desservaient, selon les besoins.

«En ne s’acquittant pas de certaines de leurs responsabilités dans le cadre du Programme, Sécurité publique Canada et la Gendarmerie royale du Canada ont pris des mesures qui ne s’arriment pas à l’objectif visant à renforcer la confiance des collectivités des Premières Nations et des Inuit et à l’engagement à l’égard de la vérité et de la réconciliation du gouvernement du Canada.»

Le Programme de services de police des Premières Nations et des Inuits a longtemps fait l’objet de critiques, à la fois lors d’un audit de performance antérieur et dans le cadre d’une plainte et d’un litige en matière de droits de la personne.

Alessia Passafiume et Laura Osman, La Presse Canadienne