«Nous créons un nouvel avantage social : le remboursement de la dette étudiante»


Édition du 29 Septembre 2018

«Nous créons un nouvel avantage social : le remboursement de la dette étudiante»


Édition du 29 Septembre 2018

Par Diane Bérard

­Gregory ­Poulin, cofondateur, ­Goodly

Goodly vient de terminer le programme d'incubation du célèbre Y Combinator. Son application s'attaque à deux problèmes : le recrutement et la rétention des employés ainsi que le poids de la dette étudiante. Son cofondateur Gregory Poulin explique sa vision. Et si les employeurs contribuaient au remboursement de la dette d'études de leurs employés par leur programme d'avantages sociaux ?

Diane Bérard - Pourquoi avez-vous lancé Goodly et à quel enjeu votre entreprise s'adresse-t-elle ?

Gregory Poulin - En fait, nous apportons une solution à deux enjeux. D'une part, le poids de la dette étudiante aux États-Unis. D'autre part, les défis de recrutement, de rétention et de mobilisation des employés que vivent de plus en plus d'employeurs.

D.B. - Quel est votre produit ?

G.P. - Notre application permet aux entreprises d'offrir à leurs employés le remboursement de la dette étudiante comme avantage social. Notre logiciel s'installe en 15 minutes. Il envoie ensuite une invitation à tous les employés de joindre le programme. S'il accepte, l'employé mettra cinq minutes à s'inscrire. Puis, chaque mois, le montant choisi par l'employeur sera versé au créancier de la dette étudiante de l'employé.

D.B. - Pourquoi avez-vous ciblé la dette étudiante comme fondement de votre modèle d'entreprise ?

G.P. - Ce choix repose sur mon expérience personnelle. Mon père est décédé brutalement alors que j'étudiais au Darmouth College, dans le New Hampshire. J'ai dû emprunter 80 000 $ US pour financer mes études. En faisant des recherches, j'ai réalisé que je n'étais pas le seul dans cette situation. Près des trois-quarts (70 %) des étudiants américains terminent leurs études endettés. La dette moyenne s'élève à 40 000 $ US. Et, pour un diplômé sur cinq, cette dette atteint 100 000 $ US. Au total, 45 millions d'Américains traînent une dette étudiante. Ensemble, ils doivent 1,5 billion de dollars américains. Cela affecte de nombreuses sphères de leur vie personnelle et professionnelle. Cette dette retarde, par exemple, la décision d'avoir des enfants. Sans compter qu'elle crée de telles tensions qu'elle devient parfois source de divorce.

D.B. - Comment avez-vous eu l'idée de lier dette étudiante et avantage social ?

G.P. - Mon employeur précédent, Rippling, a développé un logiciel d'intégration des nouveaux employés. Il facilite l'inscription de l'employé dans le système de l'entreprise et l'accompagne dans toutes les étapes de sa vie professionnelle. Mon passage chez Rippling m'a amené à réfléchir aux avantages sociaux qu'offrent les employeurs. On s'en doute, un diplômé qui alloue des centaines de dollars par mois au remboursement de sa dette étudiante ne peut pas contribuer à son régime de retraite. Ce n'est pas sa priorité. Il veut se débarrasser de sa dette étudiante, Ainsi, 49 % des employés de moins de 35 ans préfèrent le remboursement de leur dette étudiante à un régime de retraite comme avantage social. Plus encore, 78 % d'entre eux choisiront un emploi moins bien rémunéré si l'entreprise contribue à régler leur dette étudiante.

D.B. - Comment convainquez-vous les employeurs d'augmenter leurs coûts en ajoutant un avantage social ?

G.P. - Il ne s'agit pas forcément d'un coût supplémentaire. Tous les employés ne se prévalent pas de tous les avantages sociaux qu'on leur propose. Cela dépend de leur situation personnelle. Nous permettons aux employeurs de rendre leur programme d'avantages sociaux plus pertinent. La société change, les besoins des employés aussi.

D.B. - On parle de plus en plus de diversité et d'inclusion. En quoi votre produit favorise-t-il l'une et l'autre ?

G.P. - Le poids de la dette étudiante n'affecte pas tous les groupes démographiques également. Ainsi, les deux tiers des étudiants endettés sont des femmes. On constate aussi que l'endettement est 31/% plus élevé chez les communautés afro-américaine et hispanique. Les employeurs qui offrent le remboursement de la dette étudiante seront donc plus attirants pour ces groupes. Cette mesure est une façon simple de favoriser la diversité.

D.B. - Vous suggérez aussi qu'un employeur qui ajoute le remboursement de la dette étudiante comme avantage social verra son taux de rétention d'employés augmenter...

G.P. - C'est ce que nous disent les sondages. Près de 9 employés sur 10 (86 %) affirment qu'ils demeureront plus longtemps chez un employeur qui contribue au règlement de leur dette étudiante. D'ailleurs, certains employeurs instaurent une contribution progressive. Ils débutent par un montant de 50 $ par mois et ils augmentent le montant chaque année pendant cinq ans, par exemple. Cette méthode augmente l'incitation à demeurer en poste.

D.B. - Cet avantage social peut aussi rééquilibrer la donne pour les employeurs qui ne peuvent offrir des salaires aussi élevés que leurs concurrents...

G.P. - Tout à fait. On estime que si votre employeur défraie 100 $ par mois pour vous aider à rembourser votre dette, celle-ci sera liquidée huit années et demie plus tôt. Plusieurs candidats considéreront que se libérer du boulet de la dette compense pour un salaire moins élevé.

D.B. - Quelle est votre source de revenus ?

G.P. - Elle est très simple : 6 $ US par mois, par participant. Il n'y a pas de frais d'installation ni de frais annuels.

D.B. - La loi américaine de l'impôt a été modifiée récemment et elle favorise votre produit. Expliquez-nous.

G.P. - Le département de l'impôt (IRS) considère que le remboursement de la dette étudiante par l'employeur est un revenu imposable. Mais pas la contribution de l'employeur au régime de retraite (401 k). Récemment, l'IRS a accepté que la contribution de l'employeur au régime de retraite soit transférée au paiement de la dette étudiante, ce qui rend celui-ci non taxable. L'IRS considère désormais que si vous consacré 2 % de votre chèque de paie au remboursement de votre dette (c'est cette proportion qu'un employé doit consacrer à son régime de retraite pour profiter du programme 401 k), cela vous rend éligible à une contribution de votre employeur au remboursement de cette dette. L'IRS crée donc un équité fiscale entre deux avantages sociaux : la contribution au régime de retraite et le remboursement de la dette.

D.B. - Quand avez-vous lancé Goodly ?

G.P. - Nous l'avons lancée en août 2018, en même temps que nous terminions le programme d'incubation de trois mois du Y Combinator, à Silicon Valley.

D.B. - Quel est le plus important défi de votre entreprise ?

G.P. - Nous rencontrons le défi de tout innovateur : il faut changer les habitudes et développer de nouveaux comportements pour favoriser l'adoption de notre produit. Goodly ajoute une catégorie d'avantages sociaux. Il faut faire connaître son existence.

D.B. - À l'été 2015, vous avez travaillé à la Maison-Blanche pendant un été. Racontez-nous votre expérience.

G.P. - À l'époque, j'étais assistant de recherche à Darmouth College. Mon projet principal a été d'organiser une séance de présentations d'entrepreneurs issus de la diversité dans la salle à dîner de la Maison-Blanche, le jour de l'anniversaire de Barack Obama, le 4 août. Une trentaine d'entrepreneurs avaient leur kiosque dans la salle. M. Obama a échangé avec une dizaine d'entre eux.

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