Le Bureau de la concurrence lance une étude sur l'industrie de l'alimentation

Publié le 24/10/2022 à 11:03, mis à jour le 24/10/2022 à 19:10

Le Bureau de la concurrence lance une étude sur l'industrie de l'alimentation

Publié le 24/10/2022 à 11:03, mis à jour le 24/10/2022 à 19:10

Par La Presse Canadienne

Le Bureau de la concurrence fournira une série de recommandations au gouvernement. (Photo: La Presse Canadienne)

Gatineau — Le Bureau de la concurrence lance une étude pour déterminer si l’industrie de l’alimentation, fortement concentrée, contribue à la hausse des prix des aliments.

«Face à la hausse de l’inflation, les consommateurs canadiens ont vu leur pouvoir d’achat diminuer, déclare le Bureau dans un communiqué, lundi. Ce constat est particulièrement vrai pour l’achat de produits d’épicerie. En fait, les prix des produits d’épicerie au Canada augmentent à un rythme jamais vu depuis 40 ans.»

En septembre, les prix des aliments ont augmenté au rythme le plus rapide depuis 1981, avec des prix en hausse de 11,4% par rapport à l’an dernier. Cela se compare à un taux d’inflation de 6,9% pour l’ensemble des composantes de l’indice des prix à la consommation (IPC) de Statistique Canada.

Le taux d’inflation a commencé à baisser depuis son sommet de 8,1% en juin. Non seulement les prix des aliments ont dépassé ce rythme, mais ils continuent d’augmenter.

«Auparavant, les augmentations des prix des aliments passaient au second plan par rapport à d’autres postes de dépense comme l’essence. Aujourd’hui, les prix des aliments dans les épiceries deviennent l’un des principaux moteurs de l’inflation», constate David Macdonald, économiste principal au Centre canadien de politiques alternatives.

Les grands épiciers ont laissé entendre par le passé que la consolidation de leur secteur pouvait apporter des gains d’efficacité et ainsi offrir une plus grande valeur aux consommateurs. Des observateurs de l’industrie de l’épicerie estiment, toutefois, que des efficacités accrues ne signifient pas nécessairement des aliments plus abordables.

«La consolidation peut conduire à plus d’efficacité, mais plus d’efficacité ne signifie pas des prix plus bas, nuance M. Macdonald. Cela pourrait conduire à des prix plus bas, mais cela peut tout aussi bien mener à des bénéfices plus élevés et une rémunération plus généreuse pour les dirigeants.»

De nombreuses chaînes d’épiceries et entreprises du secteur alimentaire ont enregistré des bénéfices records pendant la pandémie et continuent d’afficher des revenus plus élevés, poursuit l’économiste. «Il est vrai que les coûts des intrants augmentent pour ces entreprises, mais leurs bénéfices progressent aussi.»

Le Bureau de la concurrence a expliqué que son étude examinera dans quelle mesure la hausse des prix des épiceries est liée à l’évolution de la dynamique concurrentielle dans le secteur.

Le chien de garde de la concurrence analysera si le gouvernement pourrait agir pour lutter contre les augmentations des prix des produits d’épicerie. Il fournira une série de recommandations au gouvernement dans son rapport final, qu’il prévoit publier en juin.

Le secteur canadien de l’épicerie est concentré, de nombreux ménages achetant auprès de l’une des trois sociétés suivantes: Loblaw (Maxi et Provigo), Metro, qui détient également Super C et Adonis, et Empire, la société mère de Sobeys qui est propriétaire de l’enseigne IGA.

Metro a répondu qu’elle ne commenterait pas l’étude. Sobeys n’a pas répondu avant la tombée. Loblaw a renvoyé les questions au Conseil canadien du commerce de détail.

Le groupe représentant l’industrie dit se réjouir que le Bureau fasse un examen de l’ensemble du système de la chaîne d’approvisionnement alimentaire au Canada. «Afin que le Bureau de la concurrence puisse fournir des informations plus précises aux Canadiens et aux élus qui montreront que les épiciers ne gonflent pas le prix de la nourriture», écrit sa porte-parole Michelle Wasylyshen, dans un courriel

Elle affirme que les épiciers canadiens ont de faibles marges bénéficiaires entre 2% et 4% et que ces marges n’ont pas changé durant cette période inflationniste. «Les Canadiens font face à une augmentation des prix en raison d’une variété de coûts croissants dans la chaîne d’approvisionnement, en particulier ceux causés par l’invasion de l’Ukraine et les événements climatiques.»

Le manque de concurrence a rendu la tâche plus difficile pour les petits épiciers indépendants, déplore Gary Sands, le vice-président principal des politiques publiques de la Fédération canadienne des épiciers indépendants.

«Le pouvoir que les chaînes peuvent exercer sur le marché peut désavantager les indépendants, a-t-il dit. Lorsqu’il y avait des pénuries pendant la pandémie, par exemple, il y avait des cas où les chaînes étaient approvisionnées en produits et… nous avions des étagères vides.»

M. Sands se demande jusqu’à quel point on peut corriger cette situation rétroactivement. «Le cheval ne s’est pas seulement échappé de l’écurie, il est parti au galop dans un autre champ.»

L’étude positionnera mieux le Bureau de la concurrence pour évaluer les futures fusions et acquisitions proposées, mais il est peu probable que des changements à l’industrie de l’alimentation soient imposés, croit Sylvain Charlebois, le professeur de distribution et de politiques alimentaires à l’Université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse.

«L’étude est importante et marque un changement de ton et de style nécessaire au Bureau», a-t-il déclaré. «Mais, je ne m’attends pas à ce que cela change l’industrie. Vont-ils demander à Loblaw de se débarrasser de Provigo ou à Sobeys de se débarrasser de Safeway?»

«C’est la structure que nous avons, ajoute-t-il. Ce qui est important, c’est que le Bureau comprenne mieux les implications des décisions qui seront prises à l’avenir.»

Pourtant, la simple menace de faire l’objet d’une enquête et de voir les consommateurs se tourner vers des concurrents à grande surface comme Walmart ou Costco pourrait inciter les épiciers à s’ajuster, selon les observateurs.

«La menace d’application est souvent aussi efficace que l’application», a dit M. Macdonald. «Ils sentent l’étau se resserrer. Il y a eu beaucoup de pression publique et nous avons déjà vu des épiciers annoncer qu’ils gelaient les prix des marques privées.»

Plus tôt ce mois-ci, le Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire à la Chambre des communes a voté en faveur d’une enquête sur les prix des denrées alimentaires.

La Chambre des communes a également voté à l’unanimité en faveur d’une motion du NPD demandant au gouvernement de s’attaquer à «la cupidité des entreprises» dans le secteur de l’épicerie.

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