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La construction peu affectée par les restrictions

La Presse Canadienne|Publié le 15 janvier 2021

La construction peu affectée par les restrictions

Tous les chantiers sont demeurés actifs durant le reconfinement. (Photo: Paul Chiasson, La Presse Canadienne)

L’industrie de la construction n’a pas ralenti ses activités malgré les nouvelles consignes émises la semaine dernière par le gouvernement Legault lorsque celui-ci a imposé un couvre-feu.

Québec demandait alors au secteur de réduire ses activités «au minimum nécessaire pour assurer la réalisation des engagements» et d’ajuster les quarts de travail «pour limiter les présences sur les sites (…) de construction au même moment». 

Cette ouverture à la «réalisation des engagements» signifie, dans les faits, que tous les chantiers en cours sont demeurés actifs. Les vérifications de La Presse Canadienne auprès des trois grandes associations de la construction du Québec indiquent qu’on a maintenu le rythme.

«Tout ce qui est en cours est considéré comme étant essentiel», résume Guillaume Houle, porte-parole de l’Association de la construction du Québec (ACQ), qui représente les entrepreneurs des domaines institutionnel, commercial et industriel.

 

Livrer à temps

Le respect des engagements est essentiel dans le domaine de l’habitation, fait valoir de son côté François Bernier, vice-président de l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ).

«On a tous ces chantiers à livrer au cours des prochains mois», raconte-t-il en faisant état de 20 000 chantiers à livrer au premier semestre de 2021. «Évidemment, s’il y avait retard, c’est toute la problématique de laisser du monde dans la rue. L’idée de respecter les engagements, c’est aussi de respecter ces gens qui sont là et qui attendent leurs unités à très court terme et on n’a pas beaucoup de marge de manoeuvre si on ne respecte pas nos échéanciers.»

 

Pénalités et «clauses COVID»

Guillaume Houle rappelle également que les ententes contractuelles prévoient des pénalités pour les retards de livraison. «Plusieurs contrats mis en suspens au printemps (lors de la première vague de COVID-19) font actuellement les frais de débats en Cour», note-t-il.

Il ajoute que plusieurs nouveaux contrats contiennent désormais des «clauses COVID» qui font en sorte que «le donneur d’ouvrage, qu’il soit public ou privé, se déleste de la responsabilité et des retards de livraison dus à la COVID et aux mesures sanitaires supplémentaires à mettre en place. Tout le fardeau repose sur les entrepreneurs.»

La troisième association, celle des constructeurs de routes et grands travaux (ACRGTQ), n’est que marginalement concernée: «Le niveau d’activité des gens qu’on représente était déjà à son plus bas. À ce temps-ci de l’année, COVID pas COVID, on est au minimum», explique son porte-parole, Christian Croteau, qui signale tout de même certaines exceptions, comme le chantier du REM qui poursuit ses activités.

 

Jugement et difficultés d’approvisionnement

La décision de prendre de nouveaux engagements d’ici au 8 février, lorsque le couvre-feu sera levé, repose sur deux variables inhabituelles, le jugement et l’approvisionnement.

«Ce que le premier ministre et ce que le décret nous disent, c’est d’user de notre gros bon sens pour déterminer la nature essentielle des travaux», explique Guillaume Houle.

François Bernier souligne qu’il n’y a pas vraiment de problème à prendre un engagement, par exemple, pour la construction d’une maison en septembre. La restriction face aux nouveaux engagements vise le futur immédiat: «À ce moment-ci, pour diminuer l’intensité sur les chantiers, diminuer le nombre de chantiers, faut-il donner suite à une demande aujourd’hui? Ta nouvelle salle de bains, peut-on la réaliser un peu plus tard?»

De toute façon, ajoute-t-il, il est plus difficile qu’à l’habitude de prendre de nouveaux engagements: «Certains n’ont pas le choix que de refuser de nouvelles demandes parce que l’année s’ouvre sur une sérieuse difficulté d’approvisionnement en toutes sortes de matières: le bois, les fenêtres. La chaîne de production, bien qu’elle ait repris ses activités dans l’année, elle a des problèmes. Essayez aujourd’hui d’aller voir quelqu’un dans l’industrie des fenêtres pour vous faire un contrat. Il va vous dire oui, mais d’attendre quelques mois.»

 

Baisse forcée des éclosions

La décision du gouvernement de maintenir l’activité du secteur sans entrave s’explique entre autres par les données de l’Institut national de la santé publique (INSPQ) sur les éclosions et le nombre de cas actifs sur les chantiers en date du 2 janvier, la plus récente semaine où les données sont disponibles. Ainsi, on y rapporte 33 éclosions sur des chantiers, soit 4,5 % du total des éclosions dans l’ensemble des milieux de travail (excluant les milieux hospitaliers, les CHSLD, les écoles et services de garde). Le nombre de cas confirmés, lui, se situait à 134 personnes, soit 3,7 % du total.

Il s’agit d’une importante baisse par rapport aux semaines précédentes, où l’on avait dénombré jusqu’à 60 éclosions et près de 200 travailleurs infectés. Au 19 décembre, le secteur de la construction représentait alors 8,6 % des éclosions et 5,8 % des travailleurs infectés. Cette diminution s’explique par le fait que le gouvernement avait mis les chantiers en pause durant deux semaines pendant les Fêtes.

Les entrepreneurs sont cependant fort conscients qu’une augmentation marquée de cas et d’éclosions avec la reprise pourrait amener le gouvernement à changer d’idée et tous les porte-parole rejoints ont insisté sur le resserrement des mesures sanitaires: «Il n’y a personne qui puisse se vanter d’être parfait dans la gestion de la pandémie et le secteur de la construction ne fait pas exception. Par contre, on s’est pris en main, on a un guide avec des mesures sanitaires très strictes à respecter sur les chantiers et nous avons rappelé à nos membres la semaine dernière qu’il faut appliquer de la manière la plus stricte possible ces mesures sanitaires», plaide Guillaume Houle.