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Ottawa — Google taille en pièces le projet de réglementation d’Ottawa qui précise la portée de la Loi sur les nouvelles en ligne dans son document soumis au fédéral durant des consultations, l’entreprise évoquant qu’elle pourrait suspendre de sa plateforme tout lien vers du contenu journalistique canadien.
«Bien que le Règlement cherche à “clarifier l’application de la loi » (C-18), il crée malheureusement davantage d’incertitudes en tentant de transformer le modèle de négociation obligatoire prévu par la loi en un modèle d’imposition», peut-on lire.
Le gouvernement fédéral, quand il a présenté en septembre son projet de réglementation, a soutenu que celui-ci visait notamment à répondre aux préoccupations et demandes de Google.
Or, au terme d’une consultation de 30 jours sur le sujet, l’entreprise a exprimé son insatisfaction: d’abord dans une déclaration envoyée aux médias dès lundi, puis vendredi dans les documents de la consultation rendus publics.
«Le résultat de cet exercice est un modèle hybride qui représente le pire des deux mondes», a-t-on écrit.
Selon le «géant du web», la feuille de route d’Ottawa revient à «impos(er) les obligations d’une taxe sans offrir de certitude et (à) demand(er) à Google d’absorber toutes les responsabilités et les coûts associés à la négociation des accords et au versement des fonds, sans que l’entreprise dispose d’une marge de manœuvre pour prendre de véritables arrangements qui visaient à répondre à ses préoccupations».
La loi C-18, qui doit entrer en vigueur en décembre, vise à forcer les géants du numérique à conclure des ententes d’indemnisation avec les médias d’information pour le partage de leur contenu.
Le projet de réglementation, présenté en septembre, est venu préciser que toute plateforme ayant un chiffre d’affaires d’au moins un milliard de dollars canadiens par année et comptant minimalement 20 millions d’utilisateurs au Canada chaque mois sera soumise à la loi.
Ottawa s’attend à ce que la législation s’applique à Meta, la société mère de Facebook, et Google — à condition qu’elles permettent le partage de nouvelles.
Les plateformes qui ne permettront pas pareil partage échapperont aux dispositions de la loi.
Meta a déjà entamé un tel blocage depuis août pour les utilisateurs canadiens de ses plateformes. Google a menacé de faire de même, mais n’est pas passé à l’action pour l’instant, sauf temporairement, au printemps dernier, pour mener des «tests».
Dans ses documents publiés vendredi, Google ne menace pas de couper le robinet définitivement, mais évoque une possible suspension.
L’entreprise fait cette mention dans un passage critiquant les échéanciers prévus dans la loi et la réglementation. Plus précisément, des délais sont prévus pour qu’une plateforme soit exemptée d’un cadre de négociation obligatoire qui, lui, comporte aussi ses propres échéanciers. Pour être exempté, un «géant du web» doit conclure des ententes volontairement avec un «éventail» de joueurs, y compris des médias locaux.
Google estime qu’il pourrait se retrouver dans une situation où il demande une exemption en même temps qu’il est engagé dans un processus de négociation obligatoire.
«Le problème d’échéancier demeure, ce qui pourrait mettre Google dans une position où elle devrait suspendre les liens vers les contenus de nouvelles pendant le processus d’obtention d’une exemption», fait-on valoir.
La contribution exacte que Google pourrait devoir verser aux médias sera établie en fonction d’une formule qui pourrait encore être modifiée.
Selon la proposition fédérale actuelle, la compensation sera établie en fonction du montant des recettes globales de la compagnie multiplié par la part canadienne du PIB mondial, puis multiplié par 4%.
Google qualifie ce taux de «chiffre arbitraire qui surestime la valeur commerciale des liens portant sur l’actualité».
Plus tôt cette semaine, la ministre du Patrimoine, Pascale St-Onge, a dit avoir «encore confiance» de trouver un terrain d’entente avec Google même si l’entreprise du numérique avait déjà exprimé son insatisfaction.
«Les canaux de communication sont ouverts», a affirmé la ministre mercredi.
Vendredi, elle a soutenu que même si la Loi sur les nouvelles en ligne n’est pas parfaite, le paysage médiatique évolue trop rapidement pour que le gouvernement attende plus longtemps.
S’exprimant à une conférence de l’agence de presse internationale MINDS, à Toronto, Pascale St-Onge a déclaré que le gouvernement entend maintenir la loi. Elle a tenu ces propos avant la publication des documents de Google.