Logo - Les Affaires
Logo - Les Affaires
Philippe Leblanc

Entre les lignes

Philippe Leblanc

Expert(e) invité(e)

Évaluer la qualité d’une équipe de direction (la suite et fin)

Philippe Leblanc|Publié le 07 février 2020

Évaluer la qualité d’une équipe de direction (la suite et fin)

Voici ce que vous devez analyser si vous cherchez à investir dans le prochain Steve Jobs. (Photo: Getty Images)

BLOGUE INVITÉ. Il y a quelques semaines, j’ai reçu cette question très pertinente d’un lecteur: «Je veux détecter les Jeff Bezos, les Mary Dillon, Bill Gates, Steve Jobs. Mais on fait comment avant que le succès soit déjà derrière et que les ratios C/B ne soient nécessairement sujets à dégonfler à la moindre déception?»

Ce blogue est la suite et la fin de cette série qui tente de répondre à la question. Dans les deux premiers blogues (partie 1; partie 2), j’ai soumis cinq critères qui permettent à mon avis de mesurer la qualité d’une équipe de direction. J’ai utilisé l’exemple d’une société que j’ai analysée récemment pour rendre l’exercice moins théorique. Voici les critères présentés précédemment:

1- Sa création de valeur au cours des nombreuses dernières années;

2- La philosophie de rémunération d’une entreprise;

3- L’actionnariat des dirigeants;

4- La vision et la stratégie;

5- L’accent sur le long terme.

Je répète que les critères d’évaluation de la qualité d’une équipe de direction sont forcément subjectifs et difficilement quantifiables.

De plus, comme le dit un vieux proverbe, «La beauté est dans l’œil de celui qui regarde». Ce qui, pour moi, est une qualité pourrait très bien être un défaut pour un autre investisseur. Nous accordons par exemple une importance marquée à la propension de l’équipe de direction à prendre des décisions pour le bien d’une entreprise à long terme. Je suis certain que de nombreux investisseurs seraient en désaccord avec cette façon de voir.

Le dernier critère est à la fois subjectif et relatif:

6- La prudence. Dans notre gestion, nous attachons une grande importance à la préservation du capital. En termes de baseball, nous préférons frapper des simples et des doubles de façon régulière qu’un occasionnel coup de circuit. Nos choix d’entreprises et le type de dirigeants que nous affectionnons reflètent cette orientation.

Comment mesure-t-on la prudence d’une équipe de direction? En analysant plusieurs détails qui peuvent paraître anodins lorsqu’on les prend séparément, mais qui permettent de nous forger une idée générale lorsqu’on les considère dans leur ensemble. Voici quelques éléments que j’ai notés concernant la société que j’ai analysée récemment:

– L’équipe de direction ne tient pas de conférences téléphoniques avec les analystes pour discuter de ses résultats financiers trimestriels.

– La société n’a pas de dette et n’en a jamais eu. Au contraire, elle possède une généreuse encaisse dans ses coffres, laquelle augmente année après année.

– La direction répète sans cesse qu’elle préfère faire croître la société de manière organique plutôt que par des acquisitions qui comportent souvent des risques importants.

– Les hauts dirigeants ont pour la plupart été formés au sein de l’entreprise et y sont employés depuis de nombreuses années. Les cinq plus hauts dirigeants cumulent 151 ans d’expérience au sein de l’entreprise, soit plus de 30 ans en moyenne par personne.

J’aurais certainement pu ajouter le critère de la frugalité à ma liste, mais je crois qu’il fait partie de la prudence. On apprécie une équipe de direction qui est consciente des dépenses superflues. Pas de jet privé. Pas de siège social pharaonique. Pas d’abonnement aux meilleurs clubs de golf pour ses dirigeants.

Pris séparément, chacun de ces éléments ne veut probablement pas dire grand-chose et je ne me fierais pas uniquement à l’un d’entre eux pour prendre une décision de placement. Mais l’ensemble des éléments devrait nous donner une idée générale de la qualité de l’équipe de direction.

J’ajouterais que j’ai rarement vu une entreprise qui obtienne une carte parfaite, un score élevé pour chacun des six critères énumérés dans cette série de blogues. Elles existent pourtant – j’estime que c’est le cas de la société utilisée pour illustrer mes propos!

Nous tentons d’incorporer ces principes dans notre gestion de portefeuille chez COTE 100. Je vous invite à faire de même et à ajouter vos propres critères lorsque vous faites vos choix de sociétés dans lesquelles investir.

Je profite de l’occasion pour vous encourager à me soumettre vos questions et/ou commentaires. Je ferai mon gros possible pour y répondre par le biais de ce blogue.

Philippe Le Blanc, CFA, MBA