Buffett a-t-il nui à sa crédibilité ?

Publié le 03/05/2010 à 17:17

Buffett a-t-il nui à sa crédibilité ?

Publié le 03/05/2010 à 17:17

Par Jean-Paul Gagné

Blogue. En félicitant Lloyd Blankfein pour son travail chez Goldman Sachs, Warren Buffet « put his mouth where his money is ». En fait, il a parlé en fonction de ses intérêts financiers.

En effet, Bershire Hathaway, la société que dirige l’Oracle d’Omaha, détient 5 milliards de dollars d’actions privilégiées convertibles qui lui rapportent 500 M$ de dividendes par année.

Si Goldman rachète ces actions, cette dernière devra payer une prime de 10 % par-dessus leur valeur originale. Si ces actions privilégiées ne sont pas rachetées, Berkshire pourra les convertir en actions ordinaires de Goldman, ce qui devrait lui rapporter un important gain en capital. Dans un cas comme dans l’autre Berkshire devrait réaliser un important profit. Warren Buffett peut donc être très reconnaissant envers la direction de Goldman.

Berkshire a acheté ces actions lors d’une émission privée au plus fort de la crise financière en 2008. Cette transaction avait été interprétée comme un vote envers la banque d’investissement newyorkaise, mais reconnaissons que la prime payée par Goldman était fort élevée.

Oubliez la morale

Le commentaire élogieux de Warren Buffett à l’endroit du président de Goldman Sachs aurait surpris des actionnaires qui ont assisté samedi à l’assemblée annuelle de Berkshire. Ce point de vue ne tient pas compte des réticentes « légales ou morales » que d’autres ont envers Goldman, a dit en substance un avocat de New York. C’est l’opinion d’un actionnaire important.

On sait que Goldman Sachs est poursuivie au civil et qu’une enquête est en cours pour déterminer si on va le poursuivre au criminel.

Se pourrait-il que des actionnaires commencent à douter de l’objectivité de leur maître à penser ?

« Armes de destruction massive »

Par ailleurs, après avoir qualifié les produits dérivés d’« armes de destruction massive », Warren Buffet est devenu friand de ces produits, que des filiales achètent comme protection sur certains contrats d’assurance. Bershire mn'utilise toutefois pas de dérivés sur ses placements en Bourse. Warren Buffet s'est expliqué sur cette question des dérivés dans le rapport annuel de Bershire pour 2008. Il explique pourquoi leur utilisation est dangereuse et dans quels cas.

Bershire avait perdu plus de 400 M$ sur des produits dérivés qui se trouvaient dans les actifs du réassureur General Re, à la suite de son acquisition. Buffett avait conclu que les « traders » qui avaient acquis ces contrats à terme ne savaient pas ce qu’ils faisaient.

L'appel entendue à Washington

Il y a quelques semaines, le financier d’Omaha est intervenu auprès de Washington pour faire modifier un projet de loi, qui proposait d’obliger les sociétés qui achètent des contrats à terme à maintenir des réserves financières pour couvrir ces contrats.

Or, cela aurait amené Berkshire à conserver des liquidités que Warren Buffett entend utiliser différemment.

Son appel à Washington a été entendu. On modifiera le projet de loi pour exempter les contrats acquis avant la passation de la loi. On pourrait aussi assouplir cette obligation pour des sociétés bien capitalisées, comme Berkshire.

Il est vrai que Berkshire se distingue des « hedge funds » à cet égard. Alors que celle-ci utilise des contrats à terme comme mesure de protection, les « hedge funds » les utilisent de plus en plus pour spéculer. Voilà d’ailleurs pourquoi on n'appelle plus ces derniers des « fonds de couverture », mais plutôt « fonds spéculatifs », ce qui traduit mieux leur véritable activité.

Pensez-vous que la bénédiction que Warren Buffett a donnée à Goldman Sachs et à son président, Lloyd Blankfein, va altérer sa crédibilité ?

 

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