Assainir les cours d'eau en Afrique et au Québec


Édition du 05 Novembre 2016

Assainir les cours d'eau en Afrique et au Québec


Édition du 05 Novembre 2016

Marisol Labrecque devant la berge des Baigneurs, dans le vieux Sainte-Rose, à Laval. [Photo : Annie Zielinski]

Depuis environ un an, Technologies Ecofixe, une jeune pousse d'une dizaine d'employés, adapte sa solution qui permet un traitement écologique des eaux usées à la réalité de la commune de Sô-Ava, au Bénin. Cette région pauvre de l'Afrique utilise la technologie développée par la PME de Laval pour assainir les multiples cours d'eau traversant une quarantaine de villages composés de plusieurs maisons sur pilotis. Ce projet, qui ne procure aucun revenu à la PME québécoise et qui relève davantage de la coopération internationale, est réalisé en collaboration avec Umalia, une entreprise de consultation en matière de responsabilité sociale des entreprises.

L'innovation de Technologies Ecofixe réside dans un réacteur biologique, comprenant un système d'aération et un support bactériologique, qui augmente, sans produit chimique, la capacité de traitement des eaux usées dans les étangs aérés.

L'engin entraîne notamment une réduction de l'azote ammoniacal et du phosphore, deux substances présentes en concentration trop élevée dans plusieurs cours d'eau du Québec. L'implantation de cette technologie prend quelques semaines seulement, comparativement à d'autres systèmes qui nécessitent un aménagement qui dure plusieurs mois. «Notre technologie, très légère, se prête très bien aux défis de traitement de l'eau en Afrique», souligne Marisol Labrecque, présidente de Technologies Ecofixe.

L'expérience au Bénin permet à l'entreprise de tester son innovation dans un contexte africain et de mieux connaître le marché en vue d'éventuels contrats sur le continent. «Est-ce que l'Afrique est un marché où il y aura des ventes potentielles à très court terme ? Non, répond-elle. Par contre, on sait que c'est un marché difficile, qui exige beaucoup d'efforts.»

Elle prévoit sonder le marché africain à Marrakech, où elle s'envolera pour la COP22 en compagnie de la délégation mise sur pied par le Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec. Elle en profitera pour tenter de découvrir des partenaires potentiels en vue d'établir des liens avec des acteurs de ce continent, mais aussi des États-Unis, pays qui constitue «la prochaine étape à très court terme» des visées internationales de la PME. «On a encore beaucoup de développement à faire ici dans notre marché local du Canada et des États-Unis», dit Mme Labrecque.

Production de bières biologiques

Au Québec, la PME compte une dizaine de clients, dont des entreprises, surtout dans le secteur agroalimentaire, et de petites ou moyennes municipalités sans stations d'épuration. L'été dernier, elle a installé sa technologie à l'usine de la microbrasserie Beau's, à Vankleek Hill, une municipalité de l'est de l'Ontario, située à une quinzaine de kilomètres de la frontière québécoise. Cette entreprise de 160 employés était alors en pleine croissance, avec une augmentation de plus de 30 % de ses ventes par année. Les eaux usées générées devenaient trop importantes pour être traitées par la municipalité. Beau's a investi environ 300 000 $ pour mettre en place un système de traitement en faisant appel à Technologies Ecofixe.

L'entreprise, qui produit des bières biologiques, a arrêté son choix sur la PME de Laval, entre autres en raison de ses préoccupations en matière d'approvisionnement local et de respect de l'environnement. «On ne voulait pas juste le minimum. On voulait s'assurer qu'on faisait les choses de la bonne façon», explique Steve Beauchesne, pdg de Beau's. Il ajoute que des entreprises essayaient de leur vendre «plus que ce qui était nécessaire, tandis qu'Ecofixe a vraiment regardé ce dont nous avions besoin et a implanté une solution personnalisée. Elle pouvait respecter nos échéanciers et notre budget.»

Changements à la réglementation environnementale

L'innovation derrière Technologies Ecofixe est due à la volonté de Jean Labrecque, un ancien ingénieur civil qui travaillait dans le secteur du traitement des eaux usées, de trouver un moyen pour répondre aux besoins des municipalités où les étangs aérés fonctionnaient au maximum de leur capacité et où aucun terrain n'était disponible pour agrandir les installations.

«C'est comme ça qu'il a pensé mettre les réacteurs directement dans l'étang. C'est parti d'une idée à la limite un peu farfelue que mon père a eue en 2009», explique sa fille, Marisol Labrecque. En 2014, elle a pris les rênes du projet après le décès de son père pour conduire les essais, les validations et les ajustements entourant la concrétisation de la technologie avant d'en lancer la commercialisation.

Simplement avec les contrats déjà signés pour 2017, Technologies Ecofixe est certaine de doubler son chiffre d'affaires l'an prochain. Mme Labrecque nourrit beaucoup d'espoir à l'égard du remaniement de la Loi sur la qualité de l'environnement, annoncé par le ministre David Heurtel en juin dernier, qui entraînerait une révision du régime d'autorisation environnementale. «Pour des entreprises qui oeuvrent dans le secteur des technologies vertes comme la nôtre, c'est une très bonne nouvelle, dit-elle. Quand on a une nouvelle technologie, on tombe souvent dans une zone grise au moment de faire des demandes d'autorisation.»

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