(Photo: 123RF)
Quelque 500 petits drapeaux blancs ont parsemé symboliquement samedi matin une partie du parc Bernard-Landry, à Laval, afin d’interpeller les élus et les candidats municipaux des prochaines élections à bannir ou restreindre les pesticides à usage esthétique sur leur territoire.
L’initiative de Vigilance OGM visait aussi à féliciter la Ville de Laval. Celle-ci est devenue ce printemps la première municipalité au Québec à avoir interdit l’utilisation des pesticides à base de glyphosate sur les pelouses. La Ville souhaite «protéger la santé humaine, les pollinisateurs, la faune et les milieux naturels».
Vigilance OGM souhaite que d’autres municipalités emboîtent le pas pour éviter que la population soit exposée inutilement à ce type de produits.
«Si Laval l’a fait, on peut le faire dans toutes les autres municipalités du Québec. Laval est aux prises avec les mêmes enjeux. Il n’y a pas vraiment de raisons de ne pas aller de l’avant», a soutenu la responsable de la campagne Sortir du glyphosate pour Vigilance OGM, Laure Mabileau, à La Presse Canadienne.
L’installation des petits drapeaux blancs évoque ceux utilisés pour indiquer que des pesticides viennent d’être répandus sur un terrain. «C’est pour rappeler la hauteur de notre exposition aux pesticides», a expliqué Mme Mabileau.
L’organisme à but non lucratif mentionne que «des études démontrent leur lien avec l’apparition de certaines maladies, comme la maladie de Parkinson, de cancers, de troubles cognitifs et d’autres problèmes de santé».
Probablement cancérigène
En 2015, l’Organisation mondiale de la Santé a qualifié le glyphosate de probablement cancérigène. Vigilance OGM propose aux municipalités d’étendre la réglementation déjà en vigueur du côté des CPE et des écoles qui ont plutôt recours à des biopesticides notamment. Ces institutions ont une liste blanche de produits autorisés n’ayant aucun danger pour la santé.
«C’est beaucoup moins permissif. Sur le reste du territoire, on est plus avec une liste noire. À l’opposée de la liste blanche, ce sont des produits interdits, mais le fardeau de la preuve est inversé. Il faut prouver que le pesticide utilisé est dangereux», a détaillé Mme Mabileau. Laval connaît une bonne transition depuis le bannissement, selon son maire suppléant, Stéphane Boyer, qui est venu appuyer l’action militante de Vigilance OGM.
«Les citoyens ont très bien reçu la mesure, on a reçu beaucoup de félicitations. Très peu de commentaires négatifs. Ça fait longtemps qu’on parle des impacts négatifs des pesticides, il est le temps d’agir», a relaté le candidat à la mairie, qui qualifie ce geste de nécessaire en 2021.
«La santé est bien plus importante que d’avoir une belle pelouse, surtout qu’il y a d’autres moyens pour la garder belle», a ajouté M. Boyer. Laval autorise toujours l’utilisation de biopesticides et de produits à faible impact pour un entretien plus écologique.
La Ville n’a pas subi de pressions indues de la part de l’industrie, mais certaines entreprises ont souligné être confrontées à un problème d’inventaire puisqu’ils ont en stock du glyphosate pour l’année à venir, a précisé M. Boyer.
Il espère que d’autres suivront l’exemple de Laval. Jusqu’ici Montréal a annoncé son intention d’interdire sur son territoire le glyphosate et Drummondville souhaite bannir les pesticides en milieu urbain.
Les petits drapeaux blancs pourraient aussi faire leur apparition dans d’autres municipalités québécoises au cours des prochaines semaines afin de sensibiliser les élus et les candidats.
Le pouvoir des municipalités
Si le secteur agricole représente le plus grand utilisateur de pesticides, le monde municipal a aussi un rôle à jouer sur cet enjeu en réglementant son usage esthétique, estime Vigilance OGM.
«La perspective d’avoir des changements efficaces et rapides en termes d’environnement, en ce moment, c’est au niveau municipal», a affirmé Laure Mabileau.
À ses yeux, il est présentement difficile de faire bouger le fédéral et le provincial sur l’enjeu des pesticides. «On dirait qu’ils sont sous l’emprise des lobbys», a-t-elle fait valoir, donnant en exemple les propositions récentes de l’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) de Santé Canada. Cette dernière suggère d’augmenter les limites maximales des résidus (LMR) de glyphosate pouvant rester sur certains aliments comme les noix et les légumineuses. La proposition découle d’une demande de l’entreprise Bayer, propriétaire de Monsanto, producteur de l’herbicide Roundup contenant du glyphosate. En raison d’une levée de boucliers face à ces propositions, Santé Canada a dû prolonger sa période de consultation publique jusqu’au 3 septembre. Vigilance OGM, qui prône plutôt une réduction des LMR, a d’ailleurs préparé un outil destiné au public pour faciliter sa participation à cette consultation.
L’ARLA suggère aussi la possibilité d’augmenter la présence de traces de pesticides sur les petits fruits après des demandes de la compagnie Syngenta et d’Agriculture et Agroalimentaire Canada, avait révélé Radio-Canada.