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Philippe Leblanc

Entre les lignes

Philippe Leblanc

Expert(e) invité(e)

Aller à contre-courant

Philippe Leblanc|Publié le 07 avril 2023

Aller à contre-courant

(Photo: 123RF)

Cette semaine, je me permets d’utiliser un extrait de mon livre, Avantage Bourse. Il me semble approprié pour décrire une situation qui touche un secteur spécifique du marché depuis quelques semaines. Je crois que tout investisseur se doit de développer le réflexe d’examiner un secteur ou une industrie qui tombe en défaveur auprès des investisseurs – c’est souvent parmi les décombres qu’on réussit à trouver des occasions intéressantes!

Voici donc ce que j’ai écrit dans mon livre concernant le réflexe d’aller à contre-courant :

J’aime bien la citation de Wayne Gretzky selon laquelle «un bon joueur de hockey se positionne en fonction de l’endroit où est la rondelle. Un joueur d’exception se positionne là où la rondelle ira.»

Pour l’investisseur, cela signifie devoir chercher des occasions parmi les secteurs et les titres en défaveur, délaissés de la majorité des investisseurs, sachant qu’un jour ou l’autre la faveur reviendra.

Avec les années, j’estime avoir affûté cette qualité d’aller à contre-courant (ma conjointe vous dirait que c’est plutôt un défaut!). J’ai développé une réelle aversion pour ce qui me semble trop populaire et à la mode.

En revanche, j’ai un penchant marqué pour ce qui est unique et, parfois, un peu excentrique. Ce n’est peut-être pas une qualité dans la vie de tous les jours, mais cela me sert très bien dans mon travail. De fait, je crois que c’est une des plus grandes qualités d’un bon investisseur et assurément un réflexe essentiel pour obtenir des rendements qui se démarquent de ceux de l’ensemble du marché.

Cette capacité d’agir différemment sert aussi très bien en affaires et en sport. Une règle souvent très efficace en affaires est d’aller à contre-courant, ou à tout le moins différemment de ses concurrents. Toutes les plates-formes Web offrent une panoplie d’informations (météo, nouvelles, cotes boursières, etc.). C’est peut-être la raison pour laquelle Google a choisi de se démarquer en proposant une page Web totalement épurée. De son côté, Ikea s’est démarquée en offrant des meubles à prix modiques que ses clients doivent non seulement transporter eux-mêmes, mais aussi assembler.

Peut-être est-ce anecdotique, mais j’ai également noté au fil des ans que plusieurs des meilleurs investisseurs favorisent les sports individuels tels que le tennis, la course à pied, la natation ou le golf. À ma connaissance, peu d’entre eux ont pratiqué des sports d’équipe tels que le hockey, le soccer ou le football. Je ne crois pas que ce soit une coïncidence car je considère que tout investisseur « valeur » à long terme se retrouve régulièrement isolé des autres. En investissement, je ressens régulièrement la même sensation que lorsque je suis seul sur un court de tennis face à un adversaire, sans personne pour me conseiller.

Vous me voyez probablement venir. Depuis quelques semaines, dans la foulée des faillites de deux banques américaines (Silicon Valley Bank et Signature Bank), tout le secteur financier nord-américain a connu une forte correction. Depuis son sommet atteint le 7 février dernier, le fonds SPDR du secteur financier américain a perdu près de 20 % de sa valeur. La plupart des titres du secteur ont fortement corrigé. Je soupçonne que, comme c’est souvent le cas (face à l’incertitude, nombre d’investisseurs commencent par vendre et se posent ensuite des questions), certains titres de qualité ont été emportés par la tourmente générale.

Peut-être cette quête d’occasions ne donnera-t-elle pas de résultats tangibles cette fois-ci, mais le réflexe de chercher parmi les secteurs en défaveur est généralement rentable pour l’investisseur à long terme.

 

Philippe Le Blanc, CFA, MBA

Chef des placements chez COTE 100 et auteur du livre Avantage Bourse