Québec n’a plus espoir d’élargir la Bourse du carbone
La Presse Canadienne|Mis à jour le 26 septembre 2024En mêlée de presse jeudi matin, Benoit Charette a laissé entendre qu’il y a quelques années, son obsession était d’ajouter d’autres adhérents au marché du carbone, mais ce n’est plus le cas. (Photo: Jacques Boissinot La Presse Canadienne)
Québec — Québec n’a plus espoir d’élargir la Bourse du carbone avec plusieurs autres partenaires.
Seul l’État de Washington pourrait se joindre dans un avenir rapproché au Système de plafonnement et d’échange de droits d’émission (SPEDE) mis en place par le Québec et la Californie, en vue de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES).
C’est ce qu’a indiqué le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, qui a à ce propos rencontré des partenaires américains la semaine dernière.
«Il y a quelques années, honnêtement, c’était un peu mon obsession, d’aller chercher de nouvelles adhésions, mais ce n’est plus le cas, la formule actuelle nous convient», a-t-il admis en mêlée de presse jeudi matin.
Selon lui, le marché du carbone a atteint un équilibre et l’arrivée de plusieurs nouveaux joueurs pourrait faire chuter le prix de la tonne d’équivalent de gaz carbonique, soit les droits d’émission que les entreprises québécoises et californiennes transigent actuellement. Les revenus générés par la vente de ces unités servent à financer les mesures de lutte contre les changements climatiques.
«On ne veut pas de nouveaux membres qui soient vendeurs, on veut des acheteurs de nos crédits pour éviter le déséquilibre commercial», a-t-il plaidé.
Il mise sur l’adhésion éventuelle de l’État de Washington, qui se prononcera par référendum sur cet enjeu le jour de l’élection présidentielle américaine.
«Avec l’État de Washington, ce serait très équilibré», a fait valoir le ministre.
L’Ontario avait joint le marché du carbone, puis s’était retiré en 2018. Le Manitoba avait aussi fait part de son intention de joindre le SPEDE en 2015, mais avait fait marche arrière.
Le marché du carbone fonctionne selon un mécanisme qui permet de réduire les émissions de GES: les entreprises des grands secteurs les plus polluants peuvent acheter aux enchères tous les trois mois des «unités», en quelque sorte des droits d’émission.
Aux enchères de février dernier, l’unité se transigeait à plus de 50$.
Année après année, le plafond des émissions autorisées diminue, ce qui pousse à la hausse le prix des unités et incite les entreprises à réduire leurs émissions, ou encore à acheter des «unités» dans l’autre territoire.
Le Québec a encaissé pas moins de 1,5 milliard $ grâce au marché du carbone l’an dernier, soit des recettes presque six fois plus élevées qu’à la création du marché du carbone il y a 10 ans.
En août, un avis du Comité consultatif sur les changements climatiques destiné au ministre de l’Environnement estimait que des «resserrements» étaient «essentiels» pour tirer le maximum du SPEDE.
Un des experts, Charles Séguin, suggérait de réduire les plafonds de 17 millions d’unités d’émission à l’horizon 2030, car le marché est actuellement en situation de surplus de droits d’émission.
Lorsqu’il y a une surabondance de droits, il est difficile de faire fléchir suffisamment nos émissions de GES.
Le Québec et la Californie doivent donc s’assurer «qu’ils n’intègrent pas un joueur qui, justement, vient avec une surabondance de droits et qui va venir empêcher le Québec et la Californie d’atteindre leurs objectifs», avait affirmé le professeur.
Par Patrice Bergeron