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Métaux de transition énergétique: le Canada pourrait s’imposer

La Presse Canadienne|Publié le 09 novembre 2020

Plus d’un billion de dollars d’investissements seront nécessaires dans l’extraction ce cez métaux.

Le Canada a la possibilité de devenir un acteur important sur le marché des « métaux de transition énergétique » utilisés dans les véhicules électriques et les batteries de stockage d’énergie, mais il fait face à une vive concurrence de la part d’autres pays, en particulier de la Chine.

Le mois dernier, les gouvernements fédéral et ontarien ont annoncé qu’ils accorderont chacun 295 millions $ pour aider Ford Canada à fabriquer des véhicules électriques à Oakville, en Ontario, tout en s’engageant également à aider Fiat Chrysler dans ses projets d’investir jusqu’à 1,5 milliard $ dans son usine de Windsor, en Ontario.

Pendant ce temps, Elon Musk, le grand patron du fabricant de véhicules électriques Tesla, a promis de gros contrats aux sociétés minières du monde entier pour qu’elles augmentent la production de nickel pour les batteries dont ses véhicules auront bientôt besoin.

« Nous sommes très enthousiasmés par ces récentes annonces concernant l’électrification, car il n’y a absolument aucune raison pour que le Canada ne puisse pas être un plus gros fournisseur de ces matériaux cruciaux, commente Pierre Gratton, le PDG de l’Association minière du Canada. Mais nous allons devoir les trouver et les exploiter. »

Plus d’un billion de dollars d’investissements seront nécessaires dans l’extraction des principaux métaux de transition énergétique comme l’aluminium, le cobalt, le cuivre, le nickel et le lithium au cours des 15 prochaines années si on veut maintenir le réchauffement climatique à moins de deux degrés d’ici 2050, selon un récent rapport du cabinet de conseil Wood Mackenzie.

C’est presque le double des sommes investies au cours des 15 dernières années.

Comme le Canada est riche en cuivre, en aluminium et en nickel, il pourrait attirer une partie de ces investissements, selon l’auteur du rapport, Julian Kettle, vice-président des métaux et des mines de Wood Mackenzie. Toutefois, il est confronté aux mêmes problèmes financiers que le reste de la planète.

« Les prix pour toute une gamme de produits miniers sont inférieurs aux incitatifs, et certains de loin, mentionne-t-il. La transition énergétique commence et se termine avec les métaux, mais on semble l’oublier. »

Le coût des véhicules électriques devrait continuer de baisser pour atteindre la parité avec les véhicules à combustion interne en 2024 et 2025. La demande des consommateurs pourrait alors monter en flèche dans un très court laps de temps, prévoit M. Kettle.

Mais la planification, la conception et la construction d’une mine nécessitent de cinq à sept ans de travail, sans compter le temps nécessaire pour obtenir les autorisations réglementaires, ajoute-t-il.

Le Canada est considéré comme le cinquième producteur mondial de nickel, avec une extraction d’environ 181000 tonnes en 2019, contre 157000 en 2010, selon le ministère fédéral des Ressources naturelles, qui estime qu’environ 3 % des réserves mondiales se trouvent au Canada.

Le pays est loin dans le classement au chapitre du cobalt (3340 tonnes en 2019, contre 2600 en 2010) et du cuivre (544 000 tonnes en 2019, contre 508 000 en 2010), indique le ministère.

Il y a des dizaines de propositions pour construire des mines de lithium dans l’Est du Canada et pour tamiser le lithium des saumures des champs pétrolifères en Alberta. Toutefois, la seule mine en exploitation au Canada, la North American Lithium au Québec a été fermée. Toutefois, la société australienne Sayona semble toujours souhaiter en faire l’acquisition.

En mars, le Québec a prévu une enveloppe de 90 millions $ sur cinq ans pour valoriser les « minéraux critiques et stratégiques » comme le lithium, le cobalt, le graphite, le niobium et le titane.

Les risques liés à l’investissement dans l’extraction de métaux sont bien connus chez Sherritt International, qui extrait du cobalt et du nickel à Cuba et traite le métal dans une raffinerie en Alberta.

La société établie à Toronto a conclu une restructuration supervisée par le tribunal en août qui lui a permis de se sortir enfin de son lourd endettement résultant d’un investissement inopportun dans une mine de nickel au Madagascar en 2007, dit le PDG David Pathe.

La demande de nickel et de cobalt pour les batteries devrait augmenter, ajoute M. Pathe, mais les nouvelles mines ne seront probablement pas exploitées avant que le prix du nickel, actuellement à environ 7 $ US la livre, grimpe à 10 ou 12 $ US la livre.

Selon l’Association minière canadienne, la Chine produit 59 % de l’approvisionnement mondial en lithium, 70 % du graphite et 36 % du cobalt.

La Chine augmente également son contrôle sur le marché mondial du nickel, souligne M. Kettle.

« Pour les Chinois, le coût n’a pas d’importance. Ils ne s’inquiètent pas de la rentabilité. Ils veulent juste sécuriser le métal », souligne-t-il.

L’association minière du Canada a demandé plus d’argent pour CanmetMines, le principal centre de recherche du ministère fédéral des Ressources naturelles. Il souhaite également la création d’un fonds de 250 millions $ million pour la construction d’infrastructures nordiques afin de permettre une électrification accrue de l’exploitation minière.

« Le plus gros problème pour nous est que le Canada est un vaste pays, rappelle M. Gratton. Nous avons des gisements connus, mais ils sont éloignés, ils manquent d’infrastructures et ils ne sont tout simplement pas rentables. »