Selon le ministre O’Regan, ce « combustible propre » pourrait fournir jusqu’à 30 % des besoins énergétiques du Canada.
Le gouvernement fédéral a présenté mercredi un plan visant à accroître considérablement l’utilisation de l’hydrogène comme carburant à faible émission de carbone, afin de contribuer à atteindre les objectifs canadiens de réduction des gaz à effet de serre.
« Cette stratégie nous lance à tous un défi: faire du Canada le premier producteur d’hydrogène à faible teneur en carbone au monde », a déclaré le ministre des Ressources naturelles, Seamus O’Regan. « Un mouvement se dessine à l’échelle mondiale et le Canada en tire parti. »
L’hydrogène est considéré comme une façon d’éliminer les émissions de carbone des secteurs difficiles à électrifier, comme le transport lourd ou la grosse machinerie. Ce gaz brûle sans émissions et peut être produit à l’aide de l’énergie éolienne ou solaire — on l’appelle alors « hydrogène vert ». Il peut aussi être produit en extrayant le carbone de combustibles fossiles comme le gaz naturel, après quoi ce carbone est stocké sous terre — on parle alors d’« hydrogène bleu ».
Selon le ministre O’Regan, ce « combustible propre » pourrait fournir jusqu’à 30 % des besoins énergétiques du Canada d’ici 2050. Il estime que cette industrie pourrait valoir 50 milliards $ et créer 350 000 emplois. « L’hydrogène pourrait transformer presque tous les secteurs de notre économie », a-t-il dit.
Corridor Montréal-Windsor
Le plan fédéral 2020-2050, publié mercredi, propose qu’au cours des cinq prochaines années, des pôles régionaux soient créés à travers le pays dans des zones où l’hydrogène répond aux besoins locaux ou si une expertise existe déjà.
La région d’Edmonton, par exemple, a accès à un gaz naturel abondant, à des installations performantes qui stockent du carbone sous terre et à des pipelines pour transporter à la fois le combustible et les gaz résiduaires.
Les ports côtiers en Colombie-Britannique, en Ontario, au Québec, au Manitoba et dans la région de l’Atlantique ont besoin de beaucoup de carburant pour le transport et pourraient servir aussi de terminaux d’exportation d’hydrogène, rappelle-t-on.
Le corridor de transport Montréal-Windsor-Detroit serait aussi une autre région à fort potentiel, « car il relie la demande en matière de transport à des centres industriels et de fabrication », souligne le plan fédéral. « Un centre régional d’hydrogène se trouvant le long de ce corridor contribuerait à regrouper l’offre et la demande de nombreuses sources, ce qui nous permettrait de réaliser de multiples économies d’échelle. »
Les aménagements hydroélectriques au Québec, en Colombie-Britannique et au Manitoba pourraient par ailleurs fournir de l’électricité propre et bon marché pour la production d’« hydrogène vert ».
« Bouée de sauvetage » pour le méthane ?
La stratégie sera financée à hauteur de 1,5 milliard $, une enveloppe annoncée la semaine dernière dans le cadre de la stratégie du gouvernement sur les changements climatiques.
Certains groupes environnementaux ont critiqué la portion du plan fédéral qui prévoit créer de l’hydrogène à partir du gaz naturel, car cela offre à l’industrie des combustibles fossiles une « bouée de sauvetage » alors que l’on devrait s’en éloigner, a déclaré Tom Green, de la Fondation David Suzuki.
Mais le ministre O’Regan soutient que l’hydrogène de toutes sources remplacera les carburants à plus haute teneur en carbone, ce qui contribuera à réduire les émissions globales du Canada.
Simon Dyer, de l’Institut Pembina, un groupe de réflexion sur les énergies propres, estime que les objectifs du gouvernement en matière d’hydrogène — qu’il soit « vert » ou « bleu » — ne seront atteints que si Ottawa respecte ses autres engagements climatiques.
« La Norme sur les combustibles propres, les réglementations sur le méthane et une augmentation constante de la tarification sur le carbone sont nécessaires pour attirer les investissements dans la production d’hydrogène à faible émission de carbone et renouvelable », a-t-il soutenu dans un communiqué.
Le document publié mercredi fournit quelques détails sur les dépenses. On indique qu’un financement à long terme en matière de recherche est nécessaire dans tous les aspects de cette technologie. Il faudra aussi investir dans la fiabilité et la sécurité des infrastructures, comme les stations de ravitaillement, les systèmes d’approvisionnement et de distribution, ainsi que les installations de stockage d’hydrogène et de dioxyde de carbone.