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Gazoduc et GNL à Saguenay: Legault doit dire non, selon le PQ

La Presse Canadienne|Publié le 03 juin 2019

«Même dans leur hypothèse conservatrice, il y a au moins 30 pour cent d'augmentation de GES.»

Le gouvernement Legault doit être cohérent: s’il vise sérieusement à réduire les émissions polluantes des États voisins en leur vendant l’hydro-électricité du Québec, il doit dire non au projet d’usine de gaz naturel à Saguenay, un chantier évalué à 14 milliards $.

Le Parti québécois (PQ) accuse ainsi le gouvernement de n’avoir « pas fait ses devoirs » dans ce dossier. Le projet dans son ensemble consiste en la construction d’un gazoduc de 750 km qui irait de l’Ontario transportant du gaz de l’Ouest jusqu’à une usine de liquéfaction à Saguenay, pour acheminer ensuite le gaz naturel liquéfié (GNL) vers l’Europe notamment.

Selon les calculs effectués à partir des scénarios des promoteurs par le porte-parole péquiste en Environnement et député de Jonquière, Sylvain Gaudreault, le projet a un potentiel d’augmentation des émissions de gaz à effet de serre (GES) de 30 pour cent.

Cela viendrait donc annuler les gains que le Québec prétend faire en exportant son hydro-électricité, une énergie propre, chez ses voisins dans l’est de l’Amérique du Nord.

«Le premier ministre François Legault nage en pleine contradiction, il n’a pas fait ses devoirs pour bien analyser le rapport sur le cycle de vie» de l’usine qui doit durer 25 ans, a déclaré M. Gaudreault dans une entrevue avec La Presse canadienne diffusée dimanche.

Le premier ministre ne cesse de marteler que le Québec fait plus que sa part en réduction des GES, car en exportant son hydro-électricité il réduit aussi les émissions de GES de ses voisins qui l’achètent au lieu de consommer l’électricité de centrales au charbon ou au gaz.

M. Legault a déjà exprimé un intérêt favorable envers le projet d’usine de GNL au Saguenay. Son ministre de l’Environnement, Benoit Charette, a quant à lui déjà laissé entendre qu’il pouvait dire non au projet.

Le promoteur fait valoir que son projet réduira les émissions de GES mondiales par la substitution, c’est-à-dire le remplacement de sources d’hydrocarbures plus polluantes. Or dans son analyse, M. Gaudreault a souligné qu’un seul des quatre scénarios évoqués par le promoteur, GNL Québec, consiste réellement en de la substitution du mazout ou du charbon par du gaz naturel.

Le député de Jonquière estime plutôt que dans les autres scénarios, le projet de Saguenay augmentera les émissions globales, quand le gaz remplacera par exemple l’énergie nucléaire, ou supplantera un autre approvisionnement déjà existant en gaz naturel.

«Même dans leur hypothèse conservatrice, il y a au moins 30 pour cent d’augmentation de GES», a estimé le député de Jonquière, après avoir fait les calculs pour les scénarios d’exportation en Europe, en Asie et Amérique du Sud.

«Dans un souci de cohérence avec notre position en faveur de la réduction des GES, ce projet ne se qualifie pas», a conclu M. Gaudreault, en rappelant que l’usine doit produire 11 millions de tonnes de gaz naturel liquéfié par an, soit le double de tout ce que le Québec consomme en un an.

Il est toutefois conscient que le projet suscite beaucoup d’intérêt dans la population et que sa position n’est pas nécessairement la plus populaire.

«Il y a un préjugé favorable dans la population, mais dès qu’on pose des questions et qu’on va plus loin, les gens sont beaucoup plus critiques, sceptiques», a-t-il assuré.

Il fait remarquer qu’un cycle de vie de 25 ans est très court après tout dans une région où des complexes industriels sont actifs depuis plus de 60 ans parfois. «Après, on va se ramasser avec une usine fermée et un passif environnemental.»

Le député péquiste incite plutôt le Québec et sa région à se tourner vers l’économie verte, qui crée des emplois plus rapidement que le modèle industriel du XXe siècle, selon une étude récente. Il a d’ailleurs obtenu de la Ville de Saguenay la mise sur pied d’une équipe de prospection pour des investissements en économie verte.

C’est cohérent avec la «mission» dont est investi le Québec comme le prétend le gouvernement Legault, soit de réduire les GES de nos voisins, a plaidé M. Gaudreault.

«Si on contribue à verdir les nations voisines, [ il ne faut donc pas laisser] l’Alberta et la Saskatchewan (d’où proviendra le gaz traité à Saguenay) venir plomber le bilan de GES du Québec et des autres États», a conclu l’élu péquiste.