Logo - Les Affaires
Logo - Les Affaires

On ne magasinera plus nos vêtements de la même façon

La Presse Canadienne|Publié le 21 mai 2020

Quelques étapes supplémentaires s’ajouteront à l’« expérience client ».

Il n’y a pas si longtemps — trois mois, en fait —, acheter ses vêtements était une activité relativement simple: on entre dans un magasin, on essaie quelques articles, on prend ce qui nous plaît et on laisse le reste à la caisse. Ça, c’était avant le SRAS-CoV-2.

Alors que les commerces de détail commencent à rouvrir leurs portes au pays, quelques étapes supplémentaires s’ajouteront à l’« expérience client ». Faire la queue avant d’entrer dans le magasin, s’asperger les mains de désinfectant une fois à l’intérieur et suivre les repères de distanciation physique seront dorénavant monnaie courante pour assurer la sécurité des clients et du personnel.

Mais les experts affirment qu’il existe toujours un risque de contracter le nouveau coronavirus pendant son magasinage. « Si beaucoup de gens manipulent les articles — et ce sera le cas —, alors oui : ça pourrait être un problème », admet Satinder Kaur Brar, experte en biotechnologie environnementale et en décontamination à l’Université York, de Toronto.

Diane Brisebois, PDG du Conseil canadien du commerce de détail, affirme que les magasins mettent les bouchées doubles sur la formation de leur personnel pour désinfecter les zones sensibles, comme les terminaux de caisse, après le passage de chaque client, ainsi que sur un « assainissement strict et régulier » des surfaces dans le magasin.

Oui, mais qu’en est-il des vêtements eux-mêmes ? Le contact avec les vêtements peut être classé en deux types, explique Colin Furness, épidémiologiste à l’Université de Toronto : la navigation décontractée, lors de la recherche de sa taille, et le contact plus intime, lors de l’essayage.

Parce que les virus ne vivent pas aussi longtemps sur des matériaux souples ou poreux que sur des surfaces dures, le professeur Furness admet que les vêtements sont généralement plus sécuritaires. Mais si on touche chaque cintre en parcourant les rayons, que l’on manipule les fermetures ou les boutons en essayant un article, alors là, c’est une autre paire de manches.

« Sur la fermeture éclair et les boutons, vous pouvez vous attendre à ce que le virus survive plus d’une journée », estime M. Furness.

La plupart des détaillants permettent toujours à leurs clients d’essayer les vêtements — quoique Roots, par exemple, ne le fait pas. Selon Mme Brisebois, la capacité des cabines d’essayage sera réduite de moitié pour assurer une distanciation physique dans ce coin du magasin.

Le nettoyage des cabines d’essayage revêt également une grande importance. « Les employés désinfecteront la cabine après chaque client », soutient Mme Brisebois. Les magasins mettront aussi en « quarantaine » les vêtements qui ont été essayés, ou leur donneront un petit coup de vapeur, avant de les replacer en magasin.

Voici ce que les experts pensent de certaines de ces mesures de sécurité promises par les magasins :

La quarantaine

La plupart des magasins au Canada veulent mettre en quarantaine leurs vêtements pendant 24 à 72 heures. M. Furness estime qu’un délai d’un jour constitue « une précaution raisonnable à prendre ».

La professeure Brar, elle, favorise toutefois le principe de précaution, car nous ne savons pas combien de temps le virus peut survivre sur différents types de tissus. Une quarantaine d’une journée, ça peut suffire pour le coton, mais pas nécessairement pour les tissus synthétiques. « Je suppose qu’une semaine ouvrable serait suffisante — cinq jours », a-t-elle suggéré.

Le coup de vapeur

Mme Brar estime que ce serait là un truc « efficace », car les virus ne raffolent pas de l’humidité.

M. Furness est d’accord, mais il rappelle que l’on ignore à quelle température et pendant combien de temps on doit le faire avant que le virus soit désactivé. Mais il qualifie cette mise à mort d’« assez impressionnante ».

« J’aurais aimé qu’il y ait un peu plus de recherche pour le confirmer (…) mais en théorie, je dirais que ça devrait être mortellement efficace. »

Les gants

Les experts conviennent que demander aux employés ou aux clients de porter des gants lors du magasinage ne serait pas très efficace pour empêcher la propagation du coronavirus.

La professeure Brar rappelle que les gants pourraient en fait transporter le virus sur d’autres surfaces, en particulier lorsqu’ils sont utilisés pendant de longues périodes.

M. Furness croit lui aussi que les gants sont problématiques, car ils ne peuvent pas être désinfectés. Par contre, les mains, elles, peuvent l’être : il préférerait en fait que les gens se lavent les mains régulièrement.

Articles moins disponibles

Selon Mme Brisebois, la plupart des commerçants déplacent des articles derrière le comptoir ou un écran en plexiglas : les employés pourront remettre aux clients les articles qu’ils veulent voir de plus près, puis les désinfecter ensuite.

Les comptoirs de maquillage changent, eux aussi, explique Mme Brisebois : les magasins mettent en place une technologie vidéo afin de remplacer les échantillons qui seraient normalement utilisés par les clients pour essayer un produit.