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Des producteurs de cannabis attendent pour cultiver en plein air

La Presse Canadienne|Publié le 17 mai 2019

«La culture en plein air pourrait être un modèle commercial viable.»

Avec le retour du temps doux, de nombreux producteurs de cannabis autorisés attendent toujours le feu vert d’Ottawa pour commencer une culture à l’extérieur _ mais leur temps est compté.

Santé Canada affirme avoir délivré une licence qui comprend la culture en plein air en date du 9 mai. Plusieurs entreprises misent sur le fait que ce genre de culture est moins dispendieuse que celle effectuée dans des serres ou des installations intérieures.

L’agence n’a pas voulu préciser quelle entreprise a obtenu son feu vert, pour des raisons de confidentialité, mais Good Buds, de Salt Spring Island, en Colombie-Britannique, croit qu’il s’agit d’elle, a affirmé son cofondateur, Tyler Rumi.

«Nous nous rongions un peu les sangs. On ne peut pas changer la saison à l’extérieur. Nous étions donc extrêmement reconnaissants et excités de l’obtenir quand nous l’avons eu», a-t-il raconté à propos de la licence délivrée le 10 mai.

Mais pour les nombreux autres producteurs autorisés encore dans la file d’attente, la fenêtre se referme tranquillement et menace de les empêcher de semer leurs plantes et de produire une récolte abondante à l’automne.

Au 31 mars, les demandes en attente pour des licences incluant les espaces extérieurs se dénombraient à 191. Ce nombre comprend autant les demandes pour cultiver que celles pour détruire et composter, a précisé la porte-parole de Santé Canada, Tammy Jarbeau.

Certaines de ces sociétés cherchent à accroître leur production de cannabis en prévision de la légalisation des produits dérivés et comestibles, attendue d’ici quelques mois.

En avril, CannTrust Holdings a annoncé avoir acheté 33 hectares de terres en Colombie-Britannique, dans le cadre d’un plan visant à acquérir 81 hectares destinés à la culture en plein air.

En mars, WeedMD a annoncé la conclusion de l’achat de 24 hectares en terrains supplémentaires adjacents à ses installations existantes à Strathroy, en Ontario. Il a ajouté avoir demandé une licence pour y étendre sa culture au-delà de ses serres.

Des coûts moins importants

48North Cannabis a déjà mis la main sur des terres agricoles dans Brant County, en Ontario, où elle a l’intention de cultiver du cannabis biologique. La cochef de la direction de l’entreprise, Jeannette VanderMarel, a indiqué avoir commencé à cultiver environ 40 000 plants à l’intérieur, dans le but de les transplanter à l’extérieur. Mais ultimement, elle aimerait bien que sa culture extérieure soit entamée avec des graines.

«Les plantes issues de graines possèdent un système de racines pivotantes plus solide, ce qui permet d’obtenir une plante plus robuste, a-t-elle expliqué. Il est important de faire pousser à partir des graines.»

Son objectif est de planter 300 000 plantes, dont environ 70 pour cent prendront entre 13 et 16 semaines pour passer de la semence à la récolte. Le reste sera constitué de cannabis à floraison automatique, insensible à la lumière, qui fleurira en permanence.

Selon Mme VanderMarel, la culture intérieure coûte environ 2 $ par gramme, ou entre 90 cents et 1 $ par gramme dans une serre. La culture de cannabis en plein air devrait être «nettement moins cher», au coût estimé de 25 cents par gramme.

Avec une licence de culture en plein air, 48North s’attend à pouvoir augmenter sa production et la faire passer de 5000 kilogrammes à plus de 45 000 kilogrammes.

La société s’attend à affecter 10 pour cent de sa récolte extérieure à la vente de fleurs séchées, et le reste à l’extraction et à l’utilisation dans des produits dérivés comme les produits comestibles.

48North croit que la délivrance de sa licence d’extérieur est «imminente».

«Santé Canada est bien consciente de nos réalités saisonnières et de la nécessité de planter rapidement», a observé Mme VanderMarel.

Cependant, contrairement aux serres ou aux entrepôts intérieurs, il est à craindre que les cultures en plein air soient exposées aux éléments et aux effets potentiels des pesticides produits par les fermes voisines.

«Si tout se passe bien, la culture en plein air pourrait être un modèle commercial viable, mais le potentiel de perte ou de production d’une culture non conforme est plus élevé que dans les installations intérieures», a observé Brenna Boonstra, directrice de la qualité et de la réglementation pour le cabinet de conseil Cannabis Compliance. « Dans une culture extérieure, les animaux nuisibles sont plus difficiles à contrôler, la lumière est imprévisible, le sol peut être contaminé et les dommages causés par les intempéries sont une possibilité réelle. »

Mme VanderMarel a déclaré avoir pris contact avec ses voisins agriculteurs de Brant County et leur avoir demandé de ne pas cultiver de produits nécessitant l’utilisation de pesticides pour atténuer les risques.

«Nous les paierons volontiers (…) juste pour nous assurer de ne pas avoir de contamination», a-t-elle ajouté.

Le cofondateur de Good Buds, Alex Rumi, a déclaré que c’était pour cette raison que son entreprise s’était installée à Salt Spring Island, où de nombreuses fermes familiales n’utilisent pas de pesticides.

«Nous avons vérifié auprès de nos voisins comment ils procédaient. Nous sommes assez certains que le risque est très faible.»