Pour la deuxième fois en un mois, le gouvernement américain vient à la rescousse d'une société privée: la Fed, qui n'avait pas bougé ce week-end pour éviter la faillite de la banque d'affaires Lehman Brothers, est finalement intervenue pour renflouer AIG, l'un des plus grands assureurs mondiaux, avec une injection de 85 milliards de dollars d'argent du contribuable.
À lire: le communiqué de la Fed.
Après les sauvetages de Fannie Mae et Freddie Mac, au début du mois, la Réserve fédérale a justifié sa nouvelle intervention par la nécessité d'éviter de perturber encore les marchés, ébranlés depuis deux jours par la faillite de Lehman Brothers et le rachat de Merrill Lynch, et fragiliser davantage l'économie américaine. AIG compte céder des avoirs pour rembourser ce prêt qui lui permet de souffler.
Dans le cadre de l'accord annoncé mardi soir, la banque centrale américaine va fournir un prêt d'urgence sur deux ans de 85 milliards de dollars à AIG, victime de la crise des subprime. Les tensions provoquées par l'effondrement du marché hypothécaire à risque et le resserrement consécutif du crédit (credit crunch) avaient mis en effet en grande difficulté l'assureur. En échange du prêt, l'Etat américain s'octroie une part de 79,9% du capital d'AIG et le droit d'effectuer des remplacements au sein de la direction.
Le gouvernement avait pris de la même façon le contrôle des géants du crédit hypothécaire Fannie Mae et Freddie Mac le 7 septembre dernier, quand le Département du Trésor s'était dit prêt à injecter jusqu'à 100 milliards de dollars (70,4 milliards d'euros) dans chacune des compagnies pour leur éviter la faillite.
La Fed dit vouloir empêcher de nouvelles turbulences sur des marchés très inquiets et protéger une économie déjà fragile. Un effondrement d'AIG aurait pu entraîner une hausse substantielle des coûts du crédit, une réduction de richesse des ménages et des performances plus faibles pour l'économie américaine, a expliqué la banque centrale américaine.
Le sauvetage d'AIG marque un revirement complet pour le gouvernement américain, qui s'était refusé ce week-end à utiliser l'argent du contribuable pour venir en aide à Lehman Brothers. Plombée par les pertes liées à ses avoirs dans le secteur immobilier, la banque d'investissement, institution vieille de 158 ans, avait été contrainte lundi de se placer sous la protection de la loi sur les faillites. Ce séisme à Wall Street avait été ressenti sur toutes les places financières mondiales.
La Maison Blanche a apporté mardi son soutien à la décision de la Fed de remettre à flot AIG. "Ces mesures sont prises pour promouvoir la stabilité des marchés financiers et limiter les dégâts sur l'économie dans son ensemble", a expliqué le porte-parole de la présidence américaine Tony Fratto.
Déjà mardi, la Fed avait décidé de maintenir son principal taux directeur
à 2% mais reconnu que les tensions sur les marchés financiers s'étaient accrues, laissant entendre qu'elle serait prête si nécessaire à une baisse des taux. Comme plusieurs autres banques centrales en Europe et en Asie, la Réserve fédérale avait également injecté des liquidités, pour un montant de 70 milliards de dollars, dans le système financier.
Après la décision de la Fed sur ses taux, la bourse de New York s'était reprise mardi, l'indice Dow Jones regagnant 141 points après avoir chuté lundi de plus de 500 points, sa plus forte baisse en points depuis les attentats du 11 septembre 2001. Le titre AIG avait lui plongé.
Les problèmes d'AIG venaient de ses activités d'assurance de titres adossés à des créances hypothécaires et d'autres emprunts risqués. Si le groupe en était arrivé à ne plus pouvoir tenir son engagement d'assureur, les investisseurs craignaient des conséquences encore plus graves pour l'économie américaine que la faillite de Lehman Brothers. Des inquiétudes encore accrues lundi après que plusieurs agences de notation financière eurent dégradé les notations d'AIG. Un effondrement de groupe aurait laissé ses clients, comme des banques et autres sociétés financières, sans protection face aux pertes.
