Un oscar, ça ne change pas le monde, sauf que...


Édition du 26 Août 2017

Un oscar, ça ne change pas le monde, sauf que...


Édition du 26 Août 2017

Par Denis Lalonde

Même avec un oscar en poche, l'ingénieur du son et concepteur sonore Sylvain Bellemare garde les pieds sur terre.

«Il y a un mythe autour des gens qui remportent des oscars. Dans certains cas, ça ouvre des portes. Dans d'autres, ça ne change rien à leur carrière. Ça peut créer une certaine excitation dans le monde du cinéma québécois qu'un travailleur local remporte un oscar, mais ça reste plus de l'ordre de la satisfaction personnelle. C'est encore trop tôt pour parler de retombées économiques et de contrats supplémentaires», raconte celui qui a été récompensé pour son travail sur le film Arrival.

Le service de la conception sonore n'est pas vraiment glamour, explique-t-il. Denis Villeneuve ou Philippe Falardeau ont leur agent, qui leur offre des scénarios. Lui n'a pas de représentant. Il souligne également que le milieu du cinéma américain est parfois très protectionniste. «Des studios peuvent vouloir rester aux États-Unis même si des gens ont gagné un oscar à Montréal», lance-t-il.

Caroline Lacroix estime quant à elle qu'il est très difficile de mettre un montant sur les retombées économiques potentielles découlant de l'obtention d'un oscar pour l'industrie québécoise du cinéma et de la télévision. «Il faut voir, chaque année, quelle est la santé financière de l'industrie et isoler plusieurs facteurs, comme l'exposition dans les médias, les nominations aux Oscars et les prix remportés aux Oscars... Il faut posséder beaucoup de données», raconte-t-elle.

Grâce à «l'effet oscar» ?

Questionné à savoir si Montréal bénéficie d'un «effet oscar» grâce à la victoire du film Arrival pour le meilleur montage sonore, Pierre Moreau estime qu'il est encore trop tôt pour le mesurer. «Vous savez, certains tournages se réservent plusieurs mois à l'avance», dit-il.

Un avis que partage plus ou moins Michel Trudel. Ce dernier soutient que les prix remportés par Arrival aux Oscars et aux British Academy Film Awards pour le meilleur montage sonore contribuent à faire connaître l'expertise de Montréal. «Depuis les Oscars, le téléphone sonne plus souvent. Du côté des budgets, nous sommes 25 % en avance sur ce que nous avions dans le "pipeline" à la période correspondante il y a un an», confiait-il lorsqu'on l'a rencontré au mois d'avril.

Caroline Lacroix croit que les prix remportés par Arrival auront des répercussions positives sur l'industrie cinématographique montréalaise. «Au-delà de l'oscar remporté en février, il faut voir toutes les nominations qui ont été octroyées au cours des dernières années. On commence à avoir une belle brochette de producteurs québécois et des équipes dont on parle énormément. C'est surtout ça qu'il faut regarder», dit-elle.

Mme Lacroix estime que les commentaires positifs d'acteurs américains sur des producteurs québécois, par exemple ceux d'Amy Adams sur Denis Villeneuve (Arrival) ou de Reese Witherspoon sur Jean-Marc Vallée, ont aussi de belles répercussions sur le cinéma québécois. Witherspoon et Vallée ont collaboré pour le film Wild, sorti en 2014, et pour la série Big Little Lies, sortie cette année.

«Toutes les apparitions, toutes les mentions positives sur nos Québécois dans le monde, surtout quand ça sort de la bouche d'acteurs ou d'actrices, c'est de la publicité gratuite qui a une valeur exceptionnelle. C'est comme mener une campagne de relations publiques sans avoir à payer», affirme-t-elle.

Big Little Lies a d'ailleurs obtenu 16 nominations pour le gala des prix Emmy, qui récompense chaque année le meilleur de la télévision américaine. M. Vallée est en nomination au titre de meilleur réalisateur d'une minisérie. Le gala se tiendra le 17 septembre.

«Tout ça vient renforcer la perception qu'il y a beaucoup de talent à Montréal. Dans l'industrie, on veut s'entourer des meilleurs. Si on va chercher un Xavier Dolan, un Jean-Marc Vallée ou un Denis Villeneuve, c'est positif pour l'industrie cinématographique québécoise, car ces producteurs vont souvent favoriser les tournages ici, comme ç'a été le cas pour Arrival», dit-elle.

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