Votre entreprise est-elle prête pour davantage d'innovation agile?


Édition du 28 Septembre 2019

Votre entreprise est-elle prête pour davantage d'innovation agile?


Édition du 28 Septembre 2019

Un des principes presque incontournables de la philosophie ­agile peut sembler le plus exigeant : celui d’avoir des rencontres continues avec au moins un client principal et, si possible, toutes les personnes concernées, afin de s’assurer que le projet correspond toujours aux objectifs. (Photo: 123RF)

En 2001, 17 développeurs de logiciels se sont rencontrés pour offrir une réponse concertée, en réaction à la rigidité des fonctionnements de travail auxquels ils étaient confrontés. Il en naquit le document qu'ils nommèrent Agile Manifesto. Ce manifeste devint rapidement une référence quant aux bonnes pratiques à utiliser dans tout le domaine de l'informatique et des technologies de l'information. Sa portée doit-elle cependant s'arrêter là ? Comment réagiriez-vous, à votre tour, si un vent d'inspiration agile venait frapper à la porte de votre entreprise ?

Le choix d'être plus agiles

Difficile, donc, de lire les valeurs de ce manifeste, et les principes qui les sous-tendent, sans se rappeler que les démarches qui privilégient les individus et les relations simples et adaptées au contexte sont loin d'être une chasse gardée de l'informatique. Le vice-président de la Communauté Agile de Montréal, Maël Rieussec, en convient sans l'ombre d'un doute: «La deuxième valeur du manifeste mentionne "des solutions opérationnelles, de préférence à une documentation exhaustive." Bien sûr, cette valeur s'applique aux logiciels, mais elle pourrait aussi s'appliquer à d'autres processus, comme le développement éventuel d'un nouveau costume pour le Cirque du Soleil. Si quelqu'un me présente une première ébauche du costume, un prototype, il y aura une plus grande valeur à améliorer ce prototype, sur lequel on peut se baser, que de le monter à partir d'une documentation qui s'étend sur plusieurs pages.»

Jusqu'où et comment est-il toutefois possible de faire appel au dernier des douze principes du manifeste, qui est de «réfléchir aux façons de devenir plus efficace, puis de modifier son comportement et de l'ajuster en conséquence», pour ensuite adapter le plus agilement possible l'ensemble de ces propositions aux contraintes de son industrie ? Selon Karl Lussier, chargé de cours à l'Université de Sherbrooke et codirecteur académique du microprogramme de deuxième cycle de formation sur mesure pour les gestionnaires de la Ville de Longueuil offert par cette même université, ce vent de transformation des pratiques vers des façons de faire plus souples et plus dynamiques se fait sentir même dans les domaines ayant la réputation de demeurer plus attachés à leurs procédures, ou encore, qui sont à mille lieues de l'informatique. Il affirme que pour accompagner ses étudiants dans leur apprentissage quotidien, il «n'a pas vraiment le choix d'être agile».

M. Lussier doit notamment faire appel à cette agilité afin d'aborder des aspects plus «politiques» et diplomatiques du partage des responsabilités. «Il y a plusieurs partenaires qui se partagent non seulement les ressources financières, mais aussi techniques et matérielles, souligne-t-il. Cela oblige à entrer dans un mode plus adaptatif. Au lieu de passer beaucoup de temps à vouloir planifier le projet au départ, il va falloir passer beaucoup plus de temps à mobiliser les gens, à voir si l'on s'entend sur le même projet. Cela, en soi, est déjà une autre démarche.»

Construire agilement la confiance

Un des principes presque incontournables de la philosophie agile peut sembler le plus exigeant. C'est celui d'avoir des rencontres continues avec au moins un client principal et, si possible, toutes les personnes concernées, afin de s'assurer que le projet correspond toujours aux objectifs. Il s'agirait du principe le plus rentable à long terme, d'après M. Rieussec. «Si le seul point de contact s'établit au début, puis qu'on se fait livrer le produit un an plus tard et que ce n'est pas ce que souhaitait le client, on a un an de travail à modifier, dit-il. En étant agile, le fait de découper les fréquences de rencontres en plus petites phases et de se voir régulièrement pour déterminer le statut et la façon d'améliorer les choses, ça donne l'option à l'équipe et aux clients de s'ajuster.»

La nécessité de répéter ces rencontres ne sert pas seulement à éviter les erreurs, mais aussi à s'adapter aux nouvelles demandes, en fonction de l'évolution des technologies, des savoirs et des occasions d'affaires qui entourent le client. Le vice-doyen à l'international de l'École des sciences de la gestion (ESG) de l'Université du Québec à Montréal, Yvan Petit, reconnaît toutefois que cet idéal de transparence - réalisé par des rencontres fréquentes avec les payeurs et les utilisateurs potentiels - exige que chacun se montre disponible et disposé à prendre la responsabilité d'offrir les réponses que l'on attend de lui. «Quand on parle de clients, cela peut être l'utilisateur. Dans le cas d'une banque, par exemple, cela pourrait être quelqu'un de l'institution qui joue le rôle d'utilisateur en expérimentant le produit à chaque étape, explique M. Petit. C'est donc plus exigeant pour l'utilisateur aussi, puisqu'on attend de lui des réponses rapides pour avancer et développer au fur et à mesure.»

Ainsi, les sources d'incertitude peuvent être mieux anticipées et prises en main, dès leur apparition, par tous les membres d'une équipe. Chacun des experts en gestion de projet rencontrés reconnaît que les bouleversements en cours de projet sont inévitables et rarement accueillis avec joie, qu'il s'agisse d'un problème d'approvisionnement ou de ressources humaines. Se préparer à cohabiter avec cette incertitude se révèle d'autant plus nécessaire que plusieurs attentes sont peu définies au départ, ce qui les rend peu propices à l'application d'une méthode de gestion de projet traditionnelle, basée avant tout sur le respect du plan initial.

M. Lussier évoque d'autres situations où une démarche agile atteint ses limites, justement parce qu'une grande planification peu propice aux modifications est établie dès le départ. Les mandataires du projet seraient donc moins disposés à s'adapter aux changements en cours de route. «Par exemple, avec les aménagistes, il faut prendre le temps de tout planifier au départ, de recueillir toutes les informations dont on a besoin pour procéder ; certaines cultures universitaires et formations nous amènent à agir plus de cette façon, tandis que d'autres cultures vont nous conduire à être beaucoup plus dans l'action rapidement, illustre-t-il. On veut être sur le terrain et avoir la rétroaction rapidement.»

Même si la culture se révèle plus propice à l'utilisation d'une démarche plus agile, encore faut-il avoir quelque chose de tangible - que les utilisateurs puissent comprendre - à montrer, pour que ceux-ci puissent fournir leur avis sur la question. Or, il n'est pas toujours possible d'entrevoir une réelle expérimentation avant la fin du processus, lors de la construction d'un pont, par exemple, car celui-ci doit nécessairement être construit par étapes.

Si plusieurs contraintes peuvent cependant freiner un élan aussi agile, la petite taille d'une équipe, elle, ne devrait pas figurer parmi les causes de réticence à opter pour viser la grande collaboration. Au contraire, assure le directeur des programmes de deuxième cycle en gestion de projet de l'ESG, Alejandro Romero-Torres. Les petits groupes de 10 à 12 personnes qui se connaissent davantage les unes les autres, qui ont leurs ressources à portée de main et qui sont en mesure de se remplacer au besoin sont même les mieux placés pour pratiquer l'agilité. «Lorsqu'on a des fournisseurs et qu'eux-mêmes ont des fournisseurs, ça devient plus compliqué, fait-il remarquer. Dans les petites équipes, il y a une meilleure cohésion.»

Comme l'annonce toutefois la visée de transparence de la méthode agile, un obstacle ainsi admis peut ouvrir à de nouvelles façons de voir. M. Petit a eu la chance d'étudier, en Afrique du Sud, des départements d'entreprises comptant plus de 6 000 personnes ayant trouvé le moyen de fonctionner ensemble sous ce mode. L'application de la philosophie agile à de vastes équipes est ensuite devenue un de ses champs de spécialisation. Il a même coécrit un ouvrage sur le sujet, intitulé Project Portfolios in Dynamic Environments: Organizing for Uncertainty, publié en 2012 par le Project Management Institute.

Le vent d'enthousiasme et de créativité suscité par la philosophie agile, tant sur le plan de la méthodologie que de son application concrète, ne semble pas près de se dissiper.

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La méthode repose sur quatre grandes valeurs de base :

  • les individus et leurs interactions, de préférence aux processus et aux outils
  • les solutions opérationnelles, de préférence à une documentation exhaustive
  • la collaboration avec les clients, de préférence aux négociations contractuelles
  • la réponse au changement, de préférence au respect d’un plan

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