Vieux immeubles, nouvelle vie: comment gérer le patrimoine


Édition du 27 Janvier 2018

Vieux immeubles, nouvelle vie: comment gérer le patrimoine


Édition du 27 Janvier 2018

[Photo: Boyer Media]

Conserver les bâtiments patrimoniaux et publics est une tâche difficile. Non seulement les immeubles sont sous-entretenus, mais les gestionnaires connaissent souvent mal les meilleures pratiques et doivent composer avec des budgets restreints. Comment s'assurer que les décideurs sont réceptifs aux besoins et aux enjeux de la conservation du patrimoine bâti ?

L'Ordre des architectes du Québec (OAQ) estime que la réponse passe par l'adoption d'une politique de l'architecture par le gouvernement provincial. En ce qui a trait à la conservation du patrimoine bâti, celle-ci aurait deux objectifs : la sensibilisation et l'accompagnement.

« Une telle politique sensibiliserait le grand public et les donneurs d'ouvrages à la valeur de ce patrimoine. Elle prévoirait aussi de l'accompagnement pour les propriétaires dans le but de les aider à préserver l'aspect original de leur bâtiment », dit Nathalie Dion, la présidente de l'OAQ, qui sera conférencière le 13 février à l'événement Gestion d'immeubles publics, organisé par le Groupe Les Affaires. Elle mentionne en exemple l'Irlande, qui possède de l'expertise-conseil en conservation au sein même de son gouvernement.

Il y a environ dix ans, le pays s'est doté de sa deuxième politique nationale de l'architecture, qui comprend une solide vision de la conservation, même s'il entrait à ce moment-là en récession. « D'autres pays, comme la France et le Danemark, ont une vision comparable, indique Mme Dion. J'aime bien le cas de l'Irlande parce qu'il montre qu'on peut avancer malgré des conditions économiques difficiles. »

La clé est selon elle de mieux planifier et d'établir une liste des travaux les plus urgents. Un plan permet notamment aux décideurs de réaliser que de repousser toujours l'entretien peut coûter plus cher, à long terme, que de laisser les bâtiments vieillir - même si ça sauve de l'argent à court terme. C'est aussi une bonne façon de favoriser de meilleurs investissements : si la toiture ou les fenêtres choisies sont de piètre qualité, le gestionnaire de l'immeuble sera forcé de les changer ou de les entretenir plus rapidement.

« On comprend que les ressources financières du gouvernement sont limitées, dit Mme Dion. C'est justement un problème qu'une bonne planification aide à résoudre. »

Des outils et du soutien

Christina Cameron, professeure à l'École d'architecture de l'Université de Montréal et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en patrimoine bâti, estime qu'il existe déjà beaucoup de ressources à la disposition des décideurs. Le problème est qu'ils n'ont pas toujours le réflexe de les consulter ou de faire appel aux gens dotés des bonnes expertises.

« Quand il y a des rénovations à faire, les gestionnaires n'engagent pas toujours des architectes spécialisés en conservation, mais font parfois affaire avec des entrepreneurs qui ignorent les normes et les principes de conservation », dit-elle.

Il existe toutefois, selon elle, d'excellents outils pour soutenir les décideurs dans leurs tâches. Le document Normes et lignes directrices pour la conservation des lieux patrimoniaux au Canada, un manuel de conservation à portée pancanadienne, est un exemple. Le Répertoire canadien des lieux patrimoniaux, qui recense les lieux patrimoniaux reconnus pour leur valeur patrimoniale par les administrations municipale, provinciale, territoriale et fédérale du pays, en est un autre.

Ces outils permettent notamment de mieux connaître les pratiques recommandées et non recommandées en matière de conservation. On n'y retrouve donc pas des techniques de construction, mais bien des normes et des principes généraux. Ceux-ci indiquent, par exemple, qu'il est préférable de réparer plutôt que de remplacer les éléments caractéristiques du lieu, ou de faire des ajouts de telle sorte que les nouveaux éléments sont compatibles physiquement et visuellement avec le lieu patrimonial, qu'ils en sont subordonnés et qu'ils s'en distinguent.

Le Centre canadien d'architecture est un exemple de construction qui respecte ce dernier principe. Phyllis Lambert, celle qui l'a fondé en 1979, voulait que le musée soit bâti autour d'un bâtiment historique, la maison Shaughnessy. Selon Christina Cameron, c'est réussi. « Même si le musée est un bâtiment moderne, on y voit les échos de l'ancien bâtiment, explique-t-elle. Le nouveau musée laisse l'espace à la maison Shaughnessy. »

Mme Cameron ajoute que les gestionnaires qui ont besoin de soutien peuvent également faire appel à Héritage Montréal, un organisme qui donne entre autres des cours et des conseils dans le domaine de la conservation du patrimoine. La Fiducie nationale du Canada a également un programme dans le cadre duquel elle offre de l'expertise et de l'accompagnement pour des projets de régénération du patrimoine. Certaines firmes privées, comme le cabinet d'architecture montréalaise EVOQ, se spécialisent pour leur part en conservation. « Pour ceux qui veulent conserver le patrimoine, tout est là, même si les ressources auraient parfois avantage à être mieux connues. »

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