Toute la lumière sur la rémunération des pdg

Publié le 28/05/2010 à 13:22

Toute la lumière sur la rémunération des pdg

Publié le 28/05/2010 à 13:22

Par Marie-Claude Morin

De gauche à droite, Olivier Gamache, Sebastian Van Berkom, Yvan Allaire et Louise Champoux-Paillé. Photo: Gilles Delisle.

Salaire, prime, options, régime de retraite... Cette année encore, la rémunération des présidents et chefs de la direction est bien complexe.

Selon une compilation préparée par Les Affaires, les pdg des 50 plus importantes entreprises québécoises ont gagné, au total, 123 millions de dollars (M$) au dernier exercice financier. C'est une hausse moyenne de 4 %, pendant une année marquée par une crise économique suivie d'un rebond.

PLUS: Téléchargez le classement de la rémunération des dirigeants d'entreprises québécoises en 2009.

Encore cette année, les grands écarts sont à l'ordre du jour. Tandis que E. Hunter Harrison (Canadien National) a empoché 17,3 M$, Jean Bédard (Sportscene) a gagné plutôt 0,36 M$. Si Pierre Duhaime, fraîchement nommé pdg de SNC-Lavalin, a vu sa rémunération bondir de 205 %, les pdg nommés en 2008 affichent une diminution de 50 à 76 %, puisqu'ils avaient alors reçu beaucoup d'options et d'actions.

Des 50 pdg, 16 n'ont reçu ni action, ni option. Par contre, Pierre-Karl Péladeau (Quebecor) s'est vu octroyer 5,7 M$ en options et E. Hunter Harrison, 4 M$ en actions. Six pdg n'ont pas reçu de prime en argent, mais 23 ont obtenu 500 000 $ ou plus.

Pour discuter des résultats obtenus, nous avons réuni quatre experts. Autour de la table : Yvan Allaire, président du conseil d'administration de l'Institut sur la gouvernance d'organisations privées et publiques, Louise Champoux-Paillé, membre du conseil d'administration du Mouvement d'éducation et de défense des actionnaires (MÉDAC), Olivier Gamache, pdg du Groupe investissement responsable (une firme spécialisée dans les politiques d'investissement), et Sebastian van Berkom, pdg de la firme de gestion Van Berkom et associés, et administrateur de l'Institut sur la gouvernance d'organisations privées et publiques.

Un clivage entre petites et grandes entreprises

Les dirigeants reçoivent une rémunération fort différente selon qu'ils sont des gestionnaires de carrière ou des pdg-fondateurs qui détiennent un grand nombre d'actions, constatent les experts. «Les entreprises contrôlées par un individu ou une famille, et celles où aucun actionnaire ne détient plus de 10 % du capital, évoluent dans deux univers complètement différents», dit Yvan Allaire.

Aux yeux de Sebastian van Berkom, la compilation montre clairement que «ce sont les gestionnaires de carrière qui exagèrent». «Les entrepreneurs qui ont un grand intérêt [actionnariat] dans l'entreprise sont beaucoup plus responsables quant à leur rémunération et à celle de tous leurs employés», fait-il valoir. Il cite l'exemple du Groupe MTY. Le pdg-fondateur, Stanley Ma, qui détient le quart des actions, se classe au 48e rang des dirigeants les mieux payés. «Les dirigeants les mieux rémunérés n'ont presque pas d'actions», ajoute M. van Berkom.

La modération des dirigeants qui détiennent beaucoup d'actions s'explique aussi par un raisonnement terre-à-terre, croit M. Allaire : «Les entrepreneurs comprennent que s'ils se versent un salaire de seulement 300 000 $, il sera difficile pour quelqu'un d'autre dans l'entreprise de demander plus», dit-il.

Par ailleurs, la plupart des entreprises familiales apprécient peu les options, puisque celles-ci diluent leur actionnariat.

S'armer de plusieurs critères

Les politiques de rémunération sont loin de se simplifier, comme en fait foi l'épaisseur croissante des circulaires de la direction. «Au milieu des années 1990, les circulaires comptaient une quarantaine de pages, dont trois pages sur la rémunération. Elles en comptent maintenant au total 150, voire 200 pages», dit Mme Champoux-Paillé.

Pour analyser correctement toute cette masse d'information, l'investisseur ne devrait pas hésiter à utiliser plusieurs critères. Par exemple, il devrait tenir compte du rendement total du titre boursier (y compris les dividendes). Pour compléter son analyse, l'investisseur peut aussi calculer le rendement sur le capital investi. Puisqu'il comprend la dette, cet indicateur est plus approprié que le rendement sur l'avoir des actionnaires.

En plus de l'actionnariat des dirigeants, les clauses en cas de vente de l'entreprise permettent d'évaluer à quel point les pdg et les actionnaires ont les mêmes intérêts. «Les conditions prévues dans ces clauses sont encore souvent très exagérées», prévient M. van Berkom. Par exemple, certaines entreprises prévoient que le pdg recevra une indemnité équivalant à trois à cinq fois son salaire en cas de changement de contrôle.

Louise Champoux-Paillé encourage pour sa part une évaluation globale, qui tient compte de l'effet des décisions du pdg sur les actionnaires, les employés, les fournisseurs, etc. «Le rendement d'un pdg ne doit pas être évalué seulement en fonction de ce qu'il apporte aux actionnaires. Il faut considérer l'ensemble des parties concernées», dit-elle.

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